C’qu’il était beau, mon HLM !

Séquence nostalgie. Des films en super-8 défilent sur l’écran : en couleurs passées, des adultes en sous-pulls colorés, des enfants qui jouent aux poupées, des immeubles en construction, des vraies bougies dans les sapins de Noël. Ce sont les années 1960-1970. Cela se passe dans les environs de Paris, dans ces « villes nouvelles » qui n’en portent pas encore le nom. Ces films amateurs racontent la banlieue telle qu’elle était, telle qu’elle a évolué. Juvisy, Saint-Michel-sur-Orge, Massy, Les Ulis… Des villes situées dans le département de l’Essonne, où l’on ne se rend pas pour se promener mais où vit une grande partie des Franciliens. Parmi eux, le couple Blondiaux, installé depuis 1968 à la cité Bois des Roches de Saint-Michel-sur-Orge. Venus de la campagne, ils ont vu les tours pousser autour de leur HLM, les routes se terminer, les commerces éclore. Et ont filmé cette évolution avec leur première caméra. Il existait alors une véritable mixité sociale dans les logements sociaux – « Les gens arrivaient tous et démarraient ensemble, ils étaient acteurs de cette nouvelle cité » ; « On filmait nos immeubles car on les trouvait beaux, parce qu’on y a vécu heureux » –, qui commence à se déliter à partir de 1975 : les familles habitant les premières HLM mettent de l’argent de côté pour déménager dans des pavillons et sont remplacées par des populations plus précaires. Comment des quartiers construits il y a peu de temps ont-ils pu si rapidement être assimilés à des images d’échecs et de marginalité ? C’est ce à quoi tente de répondre le documentaire Ils ont filmé les grands ensembles, en confrontant les vidéos d’hier aux images d’aujourd’hui. Laurence Bazin et Marie-Catherine Delacroix, respectivement monteuse et fondatrice de l’association Cinéam, qui collecte et numérise des films amateurs tournés en Essonne de 1920 à nos jours, sont à l’origine de ce film. Les observant, les fouillant, elles font advenir ce qu’ils disent de leur époque, de cet urbanisme, de la famille… Se dessine ainsi une histoire intime de ces grands ensembles.