TRÈS LOIN DU VILLAGE. Dans son village natal, en Afghanistan, les problèmes de luttes et de meurtres liés au badal (vengeance) sont le quotidien. Parfois, les familles s’entretuent même pendant plusieurs générations. En effet, les Pachtounes sont très soucieux de leur honneur, et il suffit d’un mot de travers, d’un regard mal interprété, pour déclencher des hostilités. C’est une histoire de badal qui a décidé Nouri Khan Zazaï à partir, à l’âge de 16 ans, au lendemain de ses fiançailles. La seule façon de sauver sa peau. Alors que la plupart des récits de demandeurs d’asile racontent leur périple ou les difficultés qu’ils ont à vivre en France, Je suis un Pachtoune d’Afghanistan laisse une large place à la genèse de l’aventure de Nouri Khan. Il raconte sa vie dans les montagnes de Zazaï, ses amis, sa famille, sa promise. Il explique les tenants et les aboutissants qui l’ont conduit à tout quitter pour tenter sa chance en Angleterre. En septembre 2008, il est parti en pleine nuit, pour que personne ne le voie. Dans son récit, on croise une multitude de passeurs, les amitiés créées sur la route, les gens qui l’ont aidé et ceux qui l’ont trahi. A ses côtés, on traverse aussi de nombreux pays – l’Iran, la Turquie, le Kurdistan, la Grèce… Et l’on entrevoit sa vie actuelle, à Paris, où il a finalement préféré rester, après tant d’échecs à franchir la Manche. C’est en France qu’il va à l’école, après avoir été pris sous l’aile de Lisa Vitturi, sociologue et assistante de service social, à qui il a confié son histoire. « J’étais bien, là-bas, avant d’être menacé et de devoir partir pour sauver ma vie ou par peur de devenir moi-même un meurtrier. Depuis que je suis ici, j’ai appris beaucoup de choses, je suis plus instruit et, surtout, j’ai des amis de divers pays et religions. […] Ma vie d’avant me manque malgré tout, mais je ne sais pas si je pourrais encore vivre comme au village : j’ai trop changé et je pense différemment de l’époque où je suis parti, lorsque je connaissais seulement ma province. » Ses rêves, à présent ? Avoir un avenir en France, obtenir son permis de séjour et finir sa formation dans la restauration. « Après cela, je pourrai travailler très dur et payer mes dettes pour lever l’hypothèque sur mes terres. »
Je suis un Pachtoune d’Afghanistan. Récit d’un jeune réfugié – Lisa Vitturi et Nouri Khan Zazaï – Ed. du Cygne – 19 €