La Commission européenne, emmenée par le social-démocrate José Manuel Barroso, a reconnu pour la première fois le rôle des revenus minimums dans la lutte contre la pauvreté et l’amélioration de la qualité des emplois. C’est en effet l’une des mesures clés de son nouveau « paquet pour l’emploi » qu’elle a présenté le 18 avril.
Cette initiative, intitulée « Vers une reprise génératrice d’emploi », est composée d’une communication et de neuf documents de travail des services de la Commission (1). Elle vise tout particulièrement à stimuler la création d’emplois, à résoudre le problème de l’inadéquation des compétences, notamment en rapprochant les milieux éducatifs et professionnels, et à améliorer la mobilité de la main-d’œuvre, tout en associant davantage les partenaires sociaux. Bien qu’il s’agisse de mesures indicatives et non contraignantes, la Commission européenne a d’ores et déjà affirmé qu’elle s’en inspirerait lors de l’examen des plans budgétaires des Etats membres. Ses propositions doivent être examinées en profondeur les 6 et 7 septembre prochains, à l’occasion d’une conférence de haut niveau sur le thème de l’emploi.
La communication identifie une série de mesures pour éviter les pièges des bas salaires, y compris l’instauration d’un revenu minimum obligatoire, la réduction de la fiscalité sur le travail et l’introduction, dans certaines situations, de prestations complémentaires en faveur des travailleurs. Jusqu’ici persuadée que les salaires minimums étaient un frein à l’embauche, la Commission européenne reconnaît pour la première fois leur pertinence pour lutter contre la pauvreté et améliorer la qualité des emplois. « C’est une question d’économie et de justice sociale », affirme-t-elle pour justifier ce tournant idéologique. Elle soutient plus particulièrement l’introduction de revenus minimums « ajustés, en concertation avec les partenaires sociaux, pour refléter l’évolution de la conjoncture économique générale » et, au besoin, « différenciés en fonction des secteurs pour préserver la demande de main-d’œuvre ». A l’heure actuelle, il n’existe pas de salaire minimum obligatoire en Autriche, en Allemagne, en Italie et dans les pays scandinaves, même si la majorité des travailleurs de ces pays sont couverts par des accords sectoriels négociés collectivement.
Convaincue que la mobilité de la main-d’œuvre pourrait concourir à la croissance économique et à la hausse du nombre d’emplois, la Commission européenne encourage les Etats membres à lever les obstacles juridiques et pratiques à la libre circulation des travailleurs. Elle les invite plus particulièrement à permettre aux ressortissants des autres Etats membres d’avoir accès à leur fonction publique et à appliquer l’exportation des prestations de chômage pour une période de six mois au maximum pour les chômeurs qui partent s’installer dans un autre Etat membre afin d’y trouver un emploi. Elle demande en outre aux neuf pays qui maintiennent encore des restrictions à l’accès au marché du travail pour les Roumains et les Bulgares, dont la France, de les supprimer avant la fin de la période de transition fixée à 2013. De son côté, la Commission s’engage à lancer une consultation sur les possibilités d’immigration économique avant la fin 2012.
Parmi les autres mesures non contraignantes préconisées, la Commission européenne suggère de soutenir davantage les entreprises à caractère social, d’exploiter le potentiel élevé de création d’emplois du secteur de la santé et de faciliter la création d’emplois par des aides à l’embauche. Elle propose également de renforcer la gouvernance européenne via un tableau de bord permettant de suivre l’avancement des plans nationaux pour l’emploi et une intervention plus soutenue des instruments de financement de l’Union européenne pour la mise en œuvre des politiques de l’emploi.
(1) Parmi ces documents figurent notamment un document de consultation sur les possibilités de création d’emplois de qualité dans les services aux personnes et aux ménages, un document d’analyse sur les tendances et les défis des marchés du travail, un document de consultation sur un cadre de qualité pour les stages, un rapport sur l’avancement de l’initiative sur les perspectives d’emploi des jeunes, une évaluation de la notion de flexisécurité et un document sur la réforme des services européens pour l’emploi.