Christophe ne se souvient plus du prénom de ses parents, ni de la date, ni même de son âge. Sur son visage, on ne discerne aucune émotion. Il a été victime d’un accident de parcours, d’un accident de la vie : un accident vasculaire cérébral. Durant plusieurs mois, Emmanuel Finkiel a filmé ses efforts quotidiens pour tenter de « réparer » son cerveau « cassé » – ainsi que ceux de deux autres patients d’un centre de rééducation de la région parisienne. Chantal, elle, n’« imprime » plus. Elle ne se reconnaît pas sur les photos, ne sait plus lire. Avant sa lésion cérébrale, elle était directrice d’une agence bancaire. Le second Christophe, jeune père de famille, était comptable avant qu’un portique ne lui tombe sur la tête. Conscient de ses déficiences, il a du mal à s’exprimer et souffre d’une hémiplégie faciale. Il refuse de se regarder dans un miroir. Le centre de rééducation est comme un cocon où ces trois personnages cérébrolésés sont sans arrêt « stimulés », notamment à coups de séances d’orthophonie, de kinésithérapie. Le temps passe et les progrès sont faibles dans ce documentaire sous forme d’éphéméride sensible et émouvant. Même si le réalisateur traque les différentes situations, la lenteur du film retranscrit bien celle de leur rééducation, les efforts constants et répétés, le chemin fastidieux qui devrait les mener – ou pas – à recouvrer leur identité. La caméra s’arrête longuement sur les visages, si bien que le spectateur se retrouve dans un face-à-face avec les personnages, pour mieux ressentir leur détresse. Au cœur de Je suis, aussi, les soignants, leur patience et leur enthousiasme pour les petits pas réalisés par les patients, mais aussi les familles bienveillantes, qui prouvent que rien ne s’accomplit tout seul.
Je suis – Emmanuel Finkiel – 1h36 – En salles