Quel est votre regard sur ces dix ans ?
Il est tout d’abord difficile, du fait d’une période très mouvementée, de dresser un bilan sur l’évolution subie ou voulue du secteur : je suis arrivé avec la loi 2002-2, je repars avec les suites de la loi « hôpital, patients, santé et territoires », une réforme de l’Etat et une réforme des collectivités inachevées, auxquelles s’ajoute un contexte de crise ! J’ai essayé dans cet environnement de créer les conditions pour que le secteur non lucratif de solidarité soit plus uni, plus visible, plus fort. Au sein de l’Uniopss, qui fédère 101 adhérents nationaux et 23 Uriopss, cette unité nécessite une construction patiente, notamment parce qu’elle implique d’avoir une présence sur les territoires. Mais les fondements sont là : nous partageons des missions et un projet communs. En revanche, l’organisation d’une représentation cohérente et transversale du secteur n’a pas beaucoup avancé, alors que l’affirmation de ce besoin n’a jamais été aussi forte.
Pour quelles raisons ?
Nous n’avons pas trouvé le facteur déclenchant qui permettrait d’être unis sans perdre ce qui fait la diversité du secteur. Les régulations nouvelles nécessitent des recentrages, notamment sur des préoccupations technico-financières, et ont renforcé une tendance naturelle des associations à la dispersion, même si on peut penser que, localement, les choses peuvent davantage évoluer du fait des contraintes liées aux parcours des usagers ou aux objectifs de mutualisation. La dispersion des conventions collectives et l’articulation entre ce qui relève du mouvement associatif et des syndicats d’employeurs, doivent encore faire l’objet d’une vision politique partagée. Le secteur doit aussi faire reconnaître ses spécificités au sein du secteur de l’économie sociale et solidaire, qui s’organise tout en étant lui-même très disparate.
La parole politique de l’Uniopss est néanmoins visible…
Le conseil d’administration a, en effet, pris conscience de la dimension politique et transversale de nos prises de position, comme le démontre le contenu de notre plateforme présidentielle. Nous arrivons à concilier une militance raisonnée, parfois reprochée par nos adhérents, et la contribution, tant bien que mal, à l’élaboration des politiques publiques, même si elles ne vont pas dans le sens que nous souhaitons. J’estime d’ailleurs que l’Uniopss devra aussi se prononcer sur des questions plus larges : le rôle de la solidarité dans le financement de la protection sociale, une répartition plus juste et plus équilibrée entre fiscalité nationale et fiscalité locale, les moyens de sortir de l’enchevêtrement des compétences des collectivités et de l’abondance des normes. Reste que notre travail d’expertise reste trop souterrain et mériterait d’être reconnu par davantage de communication. C’est, en outre, un service difficile à financer.
Vos moyens sont-ils à la hauteur ?
Notre budget structurel (3,5 millions d’euros) est resté pratiquement le même en dix ans ! Nous avons entamé en 2010 une refondation de notre modèle économique qui prend appui sur celle des cotisations, dont le système doit être plus équitable et plus performant. L’objectif est qu’elles représentent 50 % de notre budget d’ici à 2015, contre environ 33 % aujourd’hui.
Quels sont les chantiers à venir ?
Parvenir à plus de lisibilité et de transversalité va certainement nécessiter de revoir à nouveau notre organisation. Après une mission de deux mois d’observation auprès de l’équipe, d’une vingtaine d’adhérents et des Uriopss, Nicolas Clément devrait prochainement produire un bilan et des propositions devant le bureau. Je continuerai à assurer les représentations extérieures jusqu’à la fin juillet pour qu’il puisse se consacrer au projet interne.