Répondant à une requête présentée par plusieurs associations de défense des droits des étrangers (1), le Conseil d’Etat a, le 26 mars, annulé la décision par laquelle, le 18 mars 2011, le conseil d’administration de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a ajouté l’Albanie et le Kosovo à la liste des pays d’origine de demandeurs d’asile considérés comme « sûrs ». C’est la troisième fois en quatre ans que la Haute Juridiction corrige ainsi la liste établie par l’office. En 2008, déjà, elle en avait retiré l’Albanie en raison de « l’instabilité du contexte politique et social » propre à ce pays (2)… avant, donc, que le gouvernement ne le réintègre trois ans plus tard (3).
Selon les termes de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est considéré comme « sûr » un pays qui « veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l’état de droit, ainsi que des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ». Or, aux yeux des sages, ni l’Albanie – « en dépit des progrès accomplis » –, ni le Kosovo ne présentaient, à la date de la décision attaquée, les caractéristiques justifiant leur inscription sur la liste des pays d’origine « sûrs ». Le Conseil d’Etat pointe en particulier « l’instabilité du contexte politique et social propre à ces pays » ainsi que « les violences auxquelles sont exposées certaines catégories de leur population, sans garantie de pouvoir trouver auprès des autorités publiques une protection suffisante ». Conséquence de l’annulation de la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides : la circulaire du 26 mars 2011 du ministère de l’Intérieur, qui en prévoit l’application (4), est elle aussi annulée.
Pour mémoire, les demandes d’asile déposées par les ressortissants de pays d’origine « sûrs » suivent une procédure spécifique, plus rapide et non assortie de droits sociaux. En outre, en cas de rejet de la demande d’asile par l’OFPRA, le recours devant la Cour nationale du droit d’asile n’est pas suspensif. Le demandeur peut donc être renvoyé dans son pays d’origine dans l’attente de la décision.
Après l’arrêt du Conseil d’Etat et en tenant compte de la dernière décision du conseil d’administration de l’OFPRA – qui a ajouté quatre pays à la liste en décembre dernier (5) –, 18 pays sont désormais considérés comme pays d’origine « sûrs » : l’Arménie (retirée par le Conseil d’Etat en juillet 2010 avant d’être réintégrée par l’OFPRA en décembre 2011), le Bangladesh, le Bénin, la Bosnie-Herzégovine, le Cap-Vert, la Croatie, le Ghana, l’Inde, l’île Maurice, le Mali (uniquement pour les hommes), la Macédoine, la Moldavie, la Mongolie, le Monténégro, le Sénégal, la Serbie, la Tanzanie et l’Ukraine.
(1) Elena France, Association avocats pour la défense des droits des étrangers, Forum réfugiés, France terre d’asile.