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ROMAN

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BRAS DE FER CONTRE L’ENNUI. En choisissant Les Mouettes, une maison de retraite de la banlieue parisienne, Julienne, 85 ans, espérait finir sa vie sereinement. « Pourquoi Les Mouettes si loin de la mer ? Je ne sais pas. Peut-être histoire de faire rêver. » La vieille dame est encore en pleine forme – 20/20 à l’indicateur de Katz, qui mesure la dépendance – mais elle ne veut pas « être prise au dépourvue quand la dépendance sera venue ». Pourtant, celle-ci viendra plus vite que prévu, dans cet établissement où les résidents sont infantilisés, privés de liberté d’action et de pensée. Julienne, qui pensait qu’elle y serait « à l’abri », se sent peu à peu niée, gommée, piégée malgré sa vitalité. Quand l’aide médico-psychologique, qui lui ouvre ses volets le matin, annonce « la nuit est finie », elle entend « la vie est finie ». Le pire, pour elle, ce sont les vieux ! « C’est terrible de n’être plus regardée que par eux. De ne plus entendre, de ne plus voir qu’eux […]. Certains mâles ne sont pas supportables : le plastron taché, la braguette jamais nette, la main déformée, la lippe pendante comme un coing pourri, la dent noire et l’œil vitreux, ils ne parlent pas, ils crient », soupire-t-elle.

Elle s’ennuie. Jusqu’au jour où l’une de ses voisines de chambre, qui s’est cassée le bras en tombant, lui assure qu’on l’a poussée. L’événement la sort de sa torpeur. De la maltraitance ? Commence alors une sorte d’enquête que Julienne retranscrit dans son journal et qui se transforme en un bras de fer entre la pensionnaire et l’administration. Notre héroïne prendra même la tête d’une fronde qui secouera la résidence… momentanément.

L’histoire qu’a concoctée Elisabeth Laureau-Daull, enseignante en lettres et en philosophie dont c’est le premier roman, est pleine de fraîcheur malgré un thème et un titre peu vendeurs. L’auteure dresse le portrait d’une femme forte et libre, enseignante passionnée, dont la vie – on l’apprend au fil des pages – ne fut pas vraiment rose. Le syndrome de glissement se lit avec délectation tant les réflexions de cette vieille dame sur les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sont impitoyables et son humour à toute épreuve. N’affirme-t-elle pas : « Quand j’ai eu 80 ans, j’ai décidé qu’Alzheimer ne pouvait plus m’attraper. Décision unilatérale, c’est évident. » Un personnage truculent.

Le syndrome de glissement – Elisabeth Laureau-Daull – Ed. Arléa – 17 €

Culture

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