« Donner la parole aux jeunes en situation de handicap » : c’est l’objectif du collectif interassociatif « Droit au savoir » qui milite pour l’éducation et l’insertion professionnelle des jeunes handicapés. A l’occasion de ses dix ans, ce dernier a rendu publique le 21 mars une enquête sur le ressenti et les conditions de vie et d’études des jeunes handicapés (1). 329 lycéens et étudiants handicapés ont répondu à plus de 80 questions via Internet. 60 % des répondants ont moins de 21 ans. Deux tiers sont étudiants, 26 % lycéens et 7 % ont arrêté leurs études. Si tous les types de handicap sont représentés, les auteurs notent, parmi les étudiants, une surreprésentation des handicaps auditifs et une sous-représentation des situations de handicap cognitif et psychique. Il ressort de cette enquête que les jeunes handicapés ont des aspirations et mènent une vie assez proches de celles de leurs pairs, mais que des difficultés subsistent, notamment en matière d’accessibilité. Par ailleurs, la présence des familles reste encore souvent indispensable pour les accompagner.
Un lycéen sur deux est dans une filière professionnelle. Quant aux étudiants, 60 % suivent à l’université des cursus variés (sciences humaines et sociales, lettres et langues, sciences du langage, arts, sciences et technologie, sciences économiques…). Interrogés sur leurs besoins pour accéder aux savoirs, près de la moitié des lycéens expriment avoir besoin de l’aide d’une auxiliaire de vie scolaire mais aussi d’un aménagement d’emploi du temps. Les étudiants sont plus critiques que les lycéens à l’égard des différentes aides dont ils bénéficient : 24 % de leurs besoins sont non couverts, comme la reprise de cours par les professeurs, l’aide à la communication ou le soutien pédagogique et linguistique. En revanche, lycéens et étudiants handicapés sont très satisfaits de bénéficier d’un temps supplémentaire pour leurs examens.
La famille reste très importante, notamment pour l’aide au travail personnel à domicile. Seul un étudiant sur cinq a recours à un professionnel rémunéré. L’accompagnement des actes de la vie quotidienne sur le campus passe pour 24 % des jeunes par un membre de leur famille. En revanche, pour l’accessibilité pédagogique, les jeunes sont majoritairement aidés par la mission « handicap » de l’université ou par une association.
Un étudiant sur quatre se déclare insatisfait de l’accessibilité des lieux de vie et d’études, notamment des amphis, de la cafétéria, du resto U ou de la bibliothèque. 37 % des jeunes ont des difficultés pour se rendre sur le lieu d’études, nombreux sont ceux qui utilisent un transport adapté. Côté loisirs, la moitié des jeunes se rend au moins une fois par mois au théâtre, au cinéma ou à un concert mais, là encore, la non-accessibilité des lieux reste un frein pour 21 % d’entre eux et 12 % déclarent ne jamais assister à une activité culturelle. Quant au sport, 43 % (surtout des déficients moteurs et des personnes atteintes d’une maladie invalidante) n’en pratiquent jamais.
Deux tiers des étudiants et un tiers des lycéens ne vivent plus chez leurs parents et un jeune sur deux poursuit ses études dans un département différent de celui de sa famille. 15 % des étudiants interrogés vivent à l’étranger, principalement aux Etats-Unis, au Canada et au Royaume-Uni. Interrogés sur le niveau d’études qu’ils souhaitent atteindre, deux tiers des étudiants visent « au moins le niveau master » et 14 % un doctorat. Parmi les lycéens, un tiers seulement envisage d’aller au-delà du baccalauréat. Pour la plupart des jeunes, le choix des études n’est pas dicté par la situation de handicap. 58 % ont même un projet professionnel précis. 81 % des étudiants se déclarent satisfaits de leur orientation ainsi que de la conformité du cursus suivi par rapport à leurs attentes. Néanmoins 16 % des jeunes ont choisi leur lieu d’études en fonction de l’accessibilité de l’établissement.
Reste que les jeunes se sentent « majoritairement stigmatisés », notent les auteurs. Ainsi 62 % des répondants se sont déjà trouvés dans des situations de malaise, 47 % déclarent également avoir été victimes de moqueries. Enfin 30 % font état de refus de droit de la part d’une institution. Ils jugent aussi « pénalisants » les retards de traitement des dossiers des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) souvent de plus de quatre mois, voire de neuf mois.
Leurs ressources sont semblables à celles des jeunes de leurs âges. 30 % des répondants sont boursiers. La famille est mise à contribution dans un cas sur deux, l’aide sociale représente un quart des autres aides financières. 51 % d’entre eux ont un job d’été et 22 % déclarent une activité rémunérée. Enfin 48 % des répondants bénéficient de l’allocation aux adultes handicapés. Parmi ceux qui ne perçoivent aucune allocation, les auteurs notent une forte proportion de déficients cognitifs et psychiques ainsi que de jeunes atteints d’une maladie invalidante.
(1) Présentée lors du colloque « Liberté des choix, égalité des droits, les jeunes en situation de handicap prennent la parole ! » à Paris – Enquête disponible sur