La volonté d’apaiser la polémique, récemment réactivée entre les partisans de la psychanalyse dans le traitement de l’autisme et leurs opposants – principalement les associations de parents – (1), a certainement guidé l’élaboration des recommandations conjointe de la HAS (Haute Autorité de santé) et de l’ANESM (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux) sur la prise en charge de l’autisme et autres troubles envahissants du développement (TED) chez l’enfant et l’adolescent (2). Reste que l’objectif ne semble pas atteint au vu des réactions suscitées par ce document rendu public le 8 mars (voir ce numéro, page 25).
Les recommandations de bonnes pratiques professionnelles jugent en effet que « l’absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur les approches psychanalytiques et la psychothérapie institutionnelle ». Lesquelles sont qualifiées d’« interventions globales non consensuelles ». Pour autant, le document laisse la porte entrouverte puisqu’il invite les centres hospitaliers universitaires et les autres organismes ayant une mission de recherche (centres de ressources autisme, universités, laboratoires de recherche, centres régionaux pour l’enfance et l’adolescence inadaptées, etc.) à développer la recherche clinique afin d’évaluer l’efficacité de ces « pratiques non évaluées par des études contrôlées pour lesquelles il existe une divergence des avis des experts ».
Par contre, la position de la HAS et de l’ANESM est plus tranchée sur d’autres types d’intervention. Ces deux instances affirment ainsi être « formellement opposées » à l’utilisation de la pratique du « packing » (3) « en dehors de protocoles de recherche autorisés respectant la totalité des conditions définies par le Haut Conseil de la santé publique ». Selon elle, « en l’absence de données relatives à son efficacité ou à sa sécurité, du fait des questions éthiques soulevées par cette pratique et de l’indécision des experts en raison d’une extrême divergence de leurs avis, il n’est pas possible de conclure à la pertinence [de cette pratique], même restreinte à un recours ultime et exceptionnel ».
Au-delà de la controverse, les recommandations préconisent la mise en place d’un « projet personnalisé d’interventions », support visant à favoriser et faciliter la cohérence et la continuité du parcours des jeunes autistes. Et qui suppose d’associer l’enfant ou l’adolescent. A cet effet, il importe, selon le document, d’informer l’enfant et de rechercher sa participation aux décisions qui le concernent eu égard à son niveau de maturité et de compréhension, et de tenir compte de ses goûts et centres d’intérêt. Pour ceux s’exprimant peu oralement, d’autres outils de communication alternative ou augmentée (pictogrammes, images, écrit, etc.) doivent être utilisés. De leur côté, les parents ne doivent pas être mis à l’écart, poursuit la recommandation, mais au contraire être pleinement associés à l’élaboration du projet.
En pratique, les deux autorités prônent de débuter de manière précoce, avant les 4 ans de l’enfant, ces interventions personnalisées, qui doivent être « globales et coordonnées » et « fondées sur une approche éducative, comportementale et développementale » (méthodes ABA, Teacch…). En outre, elles préconisent leur mise en place dans les trois mois suivant le diagnostic et une évaluation au moins annuelle.
Enfin, concluent les recommandations, « aucune approche éducative ou thérapeutique ne peut […] prétendre restaurer un fonctionnement normal, ni même améliorer le fonctionnement et la participation de la totalité des enfants/adolescents avec TED ». Aussi le document appelle-t-il les parents à la prudence face à des interventions présentées comme permettant de supprimer complètement les manifestations des TED. De même, la HAS et l’ANESM rappellent qu’« aucun traitement médicamenteux ne guérit l’autisme ou les TED ».
(2) « Autisme et autres troubles envahissants du développement : interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent » – Disponible sur
(3) Méthode à base d’enveloppements corporels humides visant à lutter contre les automutilations.