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La loi de finances pour 2012

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S’inscrivant dans un contexte tendu et incertain, la dernière loi de finances initiale du quinquennat de Nicolas Sarkozy contient un ensemble varié de mesures sociales et fiscales touchant aussi bien au domaine de l’emploi, de l’insertion, du handicap ou du logement qu’aux services d’aide à domicile, aux fonctionnaires, aux anciens combattants ou bien encore aux étrangers. Tour d’horizon des principales dispositions.

La loi de finances pour 2012 a été adoptée le 21 décembre au terme d’un parcours particulièrement mouvementé, marqué par un chassé-croisé tendu entre le Sénat – à majorité de gauche – et l’Assemblée nationale. Chaque chambre remodelant le texte à chaque lecture et défendant, selon les propres termes de la ministre du Budget, « deux conceptions irréconciliables de la politique budgétaire ». Au final, conformément à la Constitution, c’est la version votée par l’Assemblée nationale qui a prévalu.

Placé sous le signe de l’austérité et de la pression des marchés financiers, le texte met en musique plusieurs mesures des deux plans de rigueur annoncés en août puis en novembre, mêlant hausses ciblées d’impôts et coupes dans les dépenses.

Il contient aussi et surtout tout un ensemble de mesures fiscales et sociales. Certaines tendent à reconduire des dispositifs, à les pérenniser ou à les supprimer, en particulier dans les domaines de l’emploi, de l’insertion et de la formation. D’autres constituent de véritables nouveautés, comme par exemple la création d’un fonds destiné à apporter une aide ponctuelle aux services d’aide et d’accompagnement à domicile confrontés à des difficultés financières, l’instauration d’une taxe sur les loyers élevés des micro-logements, la création d’une « aide mutualisée » à la scolarisation des enfants handicapés en milieu scolaire ou bien encore l’instauration d’un jour de carence pour les fonctionnaires malades. Deux articles tirent par ailleurs les conséquences de décisions du Conseil constitutionnel déclarant contraires à la Constitution des dispositions concernant les pensions des fonctionnaires, tandis qu’un autre poursuit le processus de réforme des taxes versées à l’Office français de l’immigration et de l’intégration engagé par la loi de finances pour 2009.

Signalons que la loi de finances pour 2012 a été construite sur une prévision de croissance de l’économie française de 1 %. Une prévision d’ores et déjà dépassée dans la mesure où elle a déjà été révisée à la baisse dans le cadre du projet de loi de finances rectificatif pour 2012, en cours d’examen au Parlement.

I. LES MESURES RELATIVES À L’ACTION SOCIALE

Trois mesures sont à retenir dans la loi de finances pour 2012 au chapitre de l’action sociale : la création d’un fonds de restructuration des services d’aide et d’accompagnement à domicile ; la création d’une « aide mutualisée » à la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire ; et la prorogation du crédit d’impôt « équipement » pour personnes âgées et handicapées.

A. UN FONDS DE RESTRUCTURATION DES SERVICES D’AIDE À DOMICILE (ART. 150 DE LA LOI)

C’était une promesse faite par la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale lors des IIes assises nationales de l’aide à domicile, ainsi qu’une recommandation du rapport « Poletti » (1) : la loi de finances pour 2012 prévoit une dotation de 50 millions d’euros destinée à apporter une aide financière ponctuelle aux services d’aide et d’accompagnement autorisés ou agréés qui servent des prestations en direction des publics fragiles (personnes handicapées, personnes âgées, mais aussi mineurs et jeunes majeurs) se trouvant en difficulté financière. Elle sera versée en deux tranches de 25 millions en 2012 et en 2013.

Autre nouveauté à noter : des expérimentations relatives aux modalités de tarification des services d’aide et d’accompagnement à domicile s’occupant de personnes âgées ou handicapées, autorisés au titre de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles (CASF), peuvent être menées à compter du 1er janvier 2012, sans excéder toutefois une durée de 3 ans. Elles doivent respecter un cahier des charges approuvé par arrêté.

1. LE CADRE GÉNÉRAL DU FONDS

Ce sont les agences régionales de santé qui répartiront les crédits entre les structures à l’issue d’une instruction par la commission de coordination des politiques publiques de santé dans les domaines des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux.

Ces crédits donneront lieu à la signature d’une convention de financement entre le gestionnaire du service et les financeurs qui fixera les obligations respectives des parties signataires, notamment au regard des objectifs contractuels permettant de déterminer les conditions financières et organisationnelles de retour à l’équilibre financier. Pour les services d’aide et d’accompagnement autorisés, cette convention de financement pourra prendre la forme d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens n’excédant pas 3 ans et financé par un forfait global.

2. LES BÉNÉFICIAIRES DU FONDS

Les services éligibles au fonds de restructuration sont les services d’aide et d’accompagnement à domicile relevant des 1° et 2° de l’article L. 311-1-2 du CASF, c’est-à-dire les services d’aide à domicile autorisés et agréés.

Autre condition : il faut que ces services soient « confrontés à des difficultés financières avec des conséquences potentielles sur l’emploi et l’offre de services aux personnes fragiles », a indiqué le gouvernement dans l’exposé des motifs.

Par ailleurs, ils doivent servir majoritairement des prestations en direction des publics fragiles, publics visés par le 1°, 6° et 7° de l’article L. 312-1 du CASF : personnes handicapées, personnes âgées, mais aussi mineurs et jeunes majeurs.

3. LES MODALITÉS D’INSTRUCTION ET DE SÉLECTION DES DOSSIERS

La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a précisé, dans une circulaire diffusée le 19 décembre dernier, les modalités d’instruction et de sélection des dossiers (2).

a. Le dossier de demande

Les services d’aide à domicile avaient jusqu’au 30 janvier pour remettre au directeur général de l’ARS un dossier de demande par lettre recommandée.

Un service, précise la circulaire, est entendu comme une unité de gestion qui peut être une structure juridique, un groupement de structures juridiques, une fédération départementale d’associations ou un établissement identifié par un numéro d’autorisation ou d’agrément. Dans le cas d’un groupement ou d’une fédération, le dossier devait comporter les données financières relatives à chaque service le composant. Le dossier de demande devait donc comprendre les rapports d’activité du service pour les années 2008 à 2010 ainsi que, par service en difficulté, les documents suivants :

 les documents budgétaires et comptables des années 2008 à 2012 ;

 la copie du jugement du tribunal de commerce en cas de sauvegarde ou de redressement judiciaire ;

 pour les services autorisés et tarifés par le conseil général, les copies des arrêtés de tarification pour les années 2008 à 2011 ;

 tout rapport d’audit de la situation du service effectué depuis 2010 par un prestataire externe.

b. Les services exclus

Entre le 20 janvier et le 15 février, les ARS ont effectué un premier examen des dossiers reçus, examen consistant à exclure :

 tout dossier incomplet ou envoyé hors délais ;

 les services qui se trouvent déjà en situation de liquidation judiciaire ;

 ceux qui ne sont pas à jour des obligations déclaratives fiscales et sociales (3) ;

 les services trop récents pour savoir s’ils sont viables économiquement (créés après le 1er janvier 2008) ;

 ceux dont le volume d’activité, en nombre d’heures, en direction des publics fragiles représente moins de 70 % du volume d’heures total ;

 ceux dont les indicateurs financiers, résultats et fonds propres, sont positifs sur les années 2009 et 2010 (4).

c. Un plan de redressement des comptes

Les services considérés comme éligibles à l’issue de la première phase de sélection ont été contactés par les ARS et devaient leur renvoyer au plus tard le 15 février un document explicitant les pistes opérationnelles permettant un redressement des comptes dans un délai de 3 ans (qui peut être porté à 5 ans pour les services de taille importante), comprenant notamment des actions de réduction et de maîtrise des coûts (notamment par le déploiement de la télégestion) ainsi que des actions d’accroissement des recettes. Les services ont dû également inclure dans ce document des propositions sur le montant de l’aide qu’ils estiment nécessaire pour soutenir leur plan de redressement.

S’agissant des services autorisés, les ARS doivent transmettre ce document aux services du conseil général afin qu’ils puissent expertiser les solutions proposées et leur faire part des solutions déjà envisagées dans le cadre de la procédure de tarification.

d. L’examen en commission

Du 15 février au 15 mars, les ARS et les conseils généraux procéderont à une instruction des dossiers retenus. Ceux-ci seront examinés en mars et en avril par la commission de coordination des politiques publiques de santé dans le domaine des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux instituée auprès de chaque agence. Cet examen comportera plusieurs étapes :

 l’audition du service sur ses difficultés et son plan de redressement ainsi que des différents financeurs ;

 l’explicitation et la synthèse des principaux éléments financiers du dossier ;

 la détermination des principaux objectifs assignés aux services (avec les financeurs et les services) ;

 le recensement des autres aides publiques ou privées aux entreprises et associations, qu’elles qu’en soient la nature et l’origine (5).

La commission émettra un avis circonstancié sur l’éligibilité du service à l’aide et fera une proposition de contractualisation indiquant les objectifs de retour à l’équilibre et le montant de l’aide.

e. La décision et le versement de l’aide

La décision relative au montant de l’aide reviendra aux ARS, qui devront également tenir compte :

 de la densité de l’offre disponible sur un territoire, en privilégiant les services qui couvrent des zones où l’offre est moins abondante et où les difficultés économiques pourraient aboutir à une insuffisance de l’offre en direction des publics fragiles et à une rupture de service (absence de reprise possible des heures par un autre prestataire) ;

 et des efforts de restructuration déjà fournis par les services dans les années passées.

Les agences devront transmettre à la mi-avril à la CNSA la liste des services retenus et le montant de l’aide contractualisée pour que la caisse puisse déléguer les crédits de paiement nécessaires à la signature de contrats pluriannuels de retour à l’équilibre avec les services (6). Le versement de 50 % du montant total de l’aide interviendra à la signature du contrat. Le solde sera versé en 2013 en fonction du respect par le service de ses engagements et au plus tard avant la fin du premier semestre.

B. LA SCOLARISATION DES ENFANTS HANDICAPÉS EN MILIEU ORDINAIRE (ART. 128)

Aujourd’hui comme hier, il revient à la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) de déterminer si la scolarisation d’un enfant handicapé en milieu ordinaire requiert une aide individuelle, apportée par des assistants d’éducation. Au vu des réflexions menées et exprimées à l’occasion de la conférence nationale du handicap réunie le 8 juin 2011, le gouvernement a jugé nécessaire d’octroyer de nouvelles prérogatives à ces commissions, afin que les enfants qui ne souffrent pas d’un handicap grave et dont la scolarisation en milieu ordinaire n’implique pas une aide individuelle, puissent bénéficier d’un accompagnement complémentaire à celui que leur prodigue le personnel éducatif présent dans les écoles.

Il s’agissait, autrement dit, de trouver une solution intermédiaire entre l’intégration scolaire assurée directement par les enseignants (pour les handicaps les plus légers) et l’accompagnement individuel pour les enfants scolarisés en milieu ordinaire présentant les handicaps les plus lourds. La loi de finances pour 2012 en pose les bases à travers la création d’une « aide mutualisée » à la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire.

En clair, « si la scolarisation d’un élève n’implique pas une aide individuelle mais que les besoins de ce dernier justifient qu’ils bénéficient d’une aide mutualisée » – c’est-à-dire d’une aide apportée simultanément à plusieurs élèves –, la CDAPH peut dorénavant en arrêter le principe (code de l’éducation [C. éduc.], art. L. 351-3 modifié). « Cette aide mutualisée [sera] apportée par 2 300 nouveaux assistants d’éducation, à compter de la rentrée 2012, qui s’ajouteront aux 2 000 assistants d’éducation mis en place depuis la rentrée 2011 et qui apportent une aide individuelle », ont expliqué les rapporteurs de la loi au Sénat, Thierry Foucaud (groupe communiste) et Claude Haut (PS) (Rap. Sén. n° 107, tome III, annexe 13, Foucaud et Haut, nov. 2011, page 74).

Que ce soit pour apporter une aide individuelle ou mutualisée, les assistants d’éducation peuvent être recrutés sans condition de diplôme si l’aide en question ne comporte pas de soutien pédagogique. Un décret doit venir préciser les modalités concrètes de l’aide ainsi apportée aux élèves handicapés. Il portera notamment sur la désignation des assistants d’éducation et la nature de l’aide apportée (C. éduc., art. L. 351-3 modifié).

A noter : la possibilité de recruter des assistants d’éducation « pour l’aide à l’inclusion scolaire des élèves handicapés » – notion qui remplace celle d’aide à l’accueil et à l’intégration » de cette population -, y compris en dehors du temps scolaire est étendue aux établissements scolaires privés sous contrat, après accord du directeur académique des services de l’Education nationale (C. éduc., art. L. 916-1 modifié).

C. LA PROROGATION DU CRÉDIT D’IMPÔT « ÉQUIPEMENT » POUR PERSONNES ÂGÉES ET HANDICAPÉES (ART. 82)

Le dispositif, institué en 2005, devait en principe prendre fin le 31 décembre dernier. La loi du 28 décembre 2011 proroge de 3 ans, à partir du 1er janvier 2012, le crédit d’impôt sur le revenu accordé aux personnes physiques propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit de leur habitation principale, qui y effectuent des dépenses d’installation ou de remplacement d’équipements spécialement conçus pour les personnes âgées ou handicapées.

Par conséquent, il s’applique désormais à ces équipements (code général des impôts [CGI], art. 200 quater A modifié) :

 payés entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014 dans le cadre de travaux réalisés dans un logement achevé ;

 intégrés à un logement acquis neuf entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014 ;

 intégrés à un logement acquis en l’état futur d’achèvement ou que le contribuable fait construire, et achevé entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2014.

Rappelons que le taux du crédit d’impôt va de 15 à 30 % du montant des dépenses d’installation ou de remplacement des équipements, dans la limite de 5 000 € pour une personne seule et de 10 000 € pour un couple marié soumis à imposition commune. L’aide fiscale ainsi consentie porte sur le matériel et les travaux de pose.

II. LES MESURES SUR L’EMPLOI, L’INSERTION ET LA FORMATION

La loi de finances pour 2012 reconduit la modalité de financement dérogatoire du revenu de solidarité active pour les jeunes de moins de 25 ans, pérennise le taux d’aide maximal dérogatoire de l’Etat pour les contrats uniques d’insertion conclus par les ateliers et chantiers d’insertion, transfère à Pôle emploi la gestion des indus des allocations de solidarité ou bien encore ponctionne à nouveau le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels au bénéfice de plusieurs organismes intervenant dans le champ de l’emploi et de la formation professionnelle. Elle supprime par ailleurs l’allocation spéciale du Fonds national de l’emploi. Enfin, elle proroge le dispositif d’exonérations fiscales et sociales dans les zones franches urbaines tout en incitant les entreprises qui s’y implantent à recourir davantage à l’emploi local.

A. LE FINANCEMENT DÉROGATOIRE DU RSA « JEUNES » (ART. 149)

La loi de finances pour 2012 reconduit la modalité de financement dérogatoire du revenu de solidarité active (RSA) versé aux jeunes actifs de moins de 25 ans remplissant une condition d’activité professionnelle préalable, catégorie éligible à cette prestation depuis le 1er septembre 2010.

En effet, contrairement au dispositif de droit commun qui prévoit un financement par le département du RSA « socle » – ex-revenu minimum d’insertion – et un financement par le Fonds national des solidarités actives (FNSA) du RSA servi en complément des revenus d’activité, l’intégralité du RSA versé aux jeunes de 18 à 24 ans a été prise en charge par le FNSA en 2010 et a continué à l’être en 2011. Ce mode de financement est donc à nouveau maintenu en 2012.

Pour justifier cette dérogation, le gouvernement explique, dans l’exposé des motifs de la loi, que « la mise en place récente du RSA jeunes et le caractère encore progressif de la montée en charge de ce nouveau dispositif ne [permettent] pas de déterminer, de manière suffisamment fiable et précise, la part respective que représentera, en régime de croisière, les volets “socle” et “activité” du RSA jeunes ».

B. LE TAUX DE PRISE EN CHARGE DES CUI DANS LES ATELIERS ET CHANTIERS D’INSERTION (ART. 151)

La loi de finances pour 2012 pérennise le taux d’aide maximal dérogatoire de l’Etat pour les contrats uniques d’insertion (CUI) conclus par les ateliers et chantiers d’insertion.

Rappelons que, avant 2010, les ateliers et chantiers d’insertion qui recrutaient en contrats aidés pouvaient en principe bénéficier d’un taux de prise en charge majoré allant jusqu’à 105 % du SMIC brut (contre 95 % du SMIC), ce qui reste encore inférieur au coût total du travail qui s’établit à 113 % du SMIC brut. Or la loi du 1er décembre 2008 qui a créé le CUI – entré en vigueur le 1er janvier 2010 – a prévu que, pour ce contrat, l’aide financière versée à l’employeur ne doit pas excéder 95 % du SMIC brut. Pour ne pas pénaliser les ateliers et chantiers d’insertion, les lois de finances pour 2010 et pour 2011 ont prévu que le montant de l’aide financière pouvait, en dernier lieu jusqu’au 31 décembre 2011, être porté jusqu’à 105 % du montant brut du SMIC par heure travaillée, dans la limite de la durée légale hebdomadaire du travail. La loi de finances pour 2012 supprime toute référence à cette date butoir (code du travail [C. trav.], art. L. 5134-30-1 modifié).

A noter : le gouvernement précise, dans l’exposé des motifs, que cette pérennisation du dispositif n’exclut pas « qu’il puisse être modifié dans le cadre, plus global, des travaux sur la réforme du financement du secteur de l’insertion par l’activité économique ».

C. LE TRANSFERT À PÔLE EMPLOI DE LA GESTION DES INDUS DES ALLOCATIONS DE SOLIDARITÉ (ART. 61)

Le législateur a cherché à simplifier et à accroître l’efficacité du recouvrement des indus de prestations versées par Pôle emploi, que ce versement intervienne pour son propre compte ou pour celui de l’Etat, du Fonds de solidarité ou encore de certains employeurs, notamment publics (l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics administratifs…). Dans cette optique, la loi de finances pour 2012 permet à Pôle emploi d’assurer de façon autonome la gestion de ces indus – qu’il partageait auparavant avec les pouvoirs publics – et renforce les règles permettant d’en limiter le nombre. A cet effet, trois nouveaux articles sont insérés dans le code du travail :

 l’article L. 5426-8-1 permet à Pôle emploi, en l’absence de contestation de l’allocataire débiteur, d’obtenir le remboursement de toute somme indûment versée par retenues sur les échéances à venir dues à quelque titre que ce soit. Ainsi, un indu d’allocation d’assurance chômage peut être récupéré sur une échéance à venir d’allocation de solidarité versée pour le compte de l’Etat. Le montant des retenues ne peut toutefois pas dépasser un plafond fixé par voie réglementaire, sauf en cas de remboursement intégral de la dette en un seul versement si le bénéficiaire opte pour cette solution ;

 l’article L. 5426-8-2 habilite Pôle emploi à recourir à la contrainte – après mise en demeure – pour le recouvrement des sommes qu’il a indûment versées. Délivrée dans des délais et selon des conditions qui seront fixés par voie réglementaire, cette contrainte comportera tous les effets d’un jugement et conférera le bénéfice de l’hypothèque judiciaire, à défaut d’opposition du débiteur devant la juridiction compétente ;

 l’article L. 5426-8-3 complète le dispositif en autorisant Pôle emploi à différer ou abandonner la mise en recouvrement des allocations, aides, ainsi que toute prestation indûment versées pour son propre compte, celui de l’Etat, du Fonds de solidarité ou d’un employeur.

D. UN NOUVEAU PRÉLÈVEMENT SUR LE FPSPP (ART. 153)

Comme la loi de finances pour 2011 l’avait déjà fait, la loi de finances pour 2012 prévoit de ponctionner à nouveau 300 millions d’euros sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) et d’affecter cette contribution à plusieurs organismes intervenant dans le champ de l’emploi et de la formation professionnelle.

Pour mémoire, créé par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, le FPSPP est chargé à la fois de recueillir un pourcentage de la participation des employeurs à la formation professionnelle, ainsi que les excédents des organismes paritaires collecteurs agréés au titre de la professionnalisation et du congé individuel de formation, de contribuer au financement d’actions de formation professionnelle et d’organiser la péréquation des sommes dédiées à la professionnalisation et au congé individuel de formation.

La répartition des 300 millions d’euros se fait de la façon suivante :

 25 millions d’euros au bénéfice de Pôle emploi pour le financement de l’allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation ;

 75 millions d’euros au bénéfice de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, dont 54 millions d’euros pour la mise en œuvre des titres professionnels délivrés par le ministère chargé de l’emploi et 21 millions d’euros affectés à la participation de l’association au service public de l’emploi ;

 200 millions d’euros au bénéfice de l’Agence de services et de paiement pour financer la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle.

La loi prévoit, comme la dernière fois, le versement de ces prélèvements en deux fois, avant le 31 janvier 2012 et avant le 31 juillet 2012.

Un décret est attendu pour préciser les modalités de mise en œuvre de ces prélèvements.

E. LA SUPPRESSION DE L’ALLOCATION SPÉCIALE DU FNE (ART. 152)

La loi de finances pour 2012 supprime l’allocation spéciale du fonds national de l’emploi (AS-FNE) à compter du 1er janvier 2012 (C. trav., art. L. 5123-2-2° et L. 5123-7 abrogés).

Accordée dans le cadre d’une procédure de licenciement économique, sur la base d’une convention passée entre l’Etat et l’entreprise concernée, l’AS-FNE permettait de verser un revenu de remplacement à des salariés âgés dont l’emploi est supprimé et dont les perspectives de reclassement sont réduites. Elle pouvait bénéficier à des salariés de plus de 57 ans (56 ans à titre dérogatoire) et était d’un montant égal à 65 % environ de leur salaire brut antérieur jusqu’à l’âge de leur départ en retraite. Le financement de ce dispositif de préretraite était assuré par une contribution de l’employeur, du salarié, de l’Unedic et de l’Etat. Désormais, les employeurs en difficulté économique ne peuvent donc plus demander la conclusion d’une convention au titre de l’AS-FNE. Les conventions conclues avant le 1er janvier 2012 continuent toutefois de produire leurs effets jusqu’à leur terme.

Pour justifier la suppression du dispositif, le gouvernement a notamment invoqué le faible volume d’entrées depuis 2007. La ministre chargée de l’apprentissage et de la formation professionnelle qui défendait la mesure devant l’Assemblée nationale a ainsi expliqué, le 4 novembre devant les députés, que le FNE avait été « fortement utilisé au cours des années 1990, avec près de 50 000 entrées en 1993 et un volume maximum de 180 000 bénéficiaires indemnisés ». Toutefois, « au cours de ces dernières années, [il] a été réservé aux restructurations touchant les salariés les plus fragiles sur les territoires en difficulté ». Tant et si bien que, « à la fin du mois d’août 2011, seulement 492 entrées dans le dispositif ont été enregistrées depuis le début de l’année pour 214 conventions conclues ». « Toujours au mois d’août 2011, a encore précisé Nadine Morano, le nombre total d’allocataires était de 5 675. » « Pour 2012, sur la base d’un rythme d’entrées égal à celui constaté sur la période allant de janvier à août 2011, le nombre moyen mensuel d’allocataires [était] estimé à 3 962 » (J.O.A.N. [C.R.] n° 101 [2] du 5 novembre 2011, page 7268).

A noter : la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle avait, dès le mois d’octobre 2011, suspendu le dispositif de préretraite licenciement. Ainsi, toute demande de convention déposée après la date de notification de son instruction n° 2011-23 du 10 octobre 2011 prévoyant cette suspension, ne pouvait plus faire l’objet d’un avis favorable (7).

F. LES ZONES FRANCHES URBAINES (ART. 157)

1. LA PROROGATION DU DISPOSITIF

La loi de finances pour 2012 proroge le dispositif des zones franches urbaines (ZFU) jusqu’au 31 décembre 2014, alors qu’il devait s’éteindre au 31 décembre 2011 (CGI, art. 44 octies A, art. 1383 C bis et art. 1466 A).

Instaurées par la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, les zones franches urbaines sont destinées à relancer l’activité économique et à favoriser l’insertion sociale et professionnelle dans les quartiers sensibles. Les entreprises qui s’implantent dans ces zones tout en remplissant certains critères légaux bénéficient d’une exonération fiscale et d’une exonération de charges sociales.

La loi aménage au passage le dispositif pour les contribuables qui créent des activités dans une ZFU à compter du 1er janvier 2012 et emploient au moins un salarié au cours de l’exercice ou de la période d’imposition au titre desquels l’exonération fiscale s’applique. Elle relie en effet l’attribution de l’exonération fiscale au bénéfice de l’exonération sociale en précisant que ce dernier est apprécié à la clôture de l’exercice ou de la période d’imposition au titre duquel ou de laquelle l’exonération s’applique. Lorsque le contribuable n’a pas bénéficié de l’exonération sociale de façon permanente au cours d’un exercice ou d’une période d’imposition, le bénéfice exonéré est corrigé proportionnellement à la période au cours de laquelle l’exonération sociale s’est appliquée. Lorsque le bénéfice est exonéré partiellement (rémunération comprise entre 1,4 et 2 SMIC), les plafonds d’exonération fiscale de 100 000 € par contribuable et la majoration de 5 000 € par nouveau salarié embauché sont ajustés dans les mêmes proportions que le bénéfice exonéré (CGI, art. 44 octies A modifié).

2. LE RENFORCEMENT DE LA CLAUSE D’EMBAUCHE

Parallèlement, la loi de finances tend à inciter davantage les entreprises à recourir à l’emploi local. Jusqu’alors, pour bénéficier des exonérations de charges sociales, l’entreprise devait, à partir de la troisième embauche, employer au moins un tiers de salariés résidant en ZFU ou en zone urbaine sensible (ZUS). Cette clause dite « sociale » ou « d’embauche » est renforcée, l’idée étant que le pourcentage de salariés résidant en ZFU ou en ZUS soit d’au moins 50 %.

Ainsi, pour les entreprises créées ou implantées dans une zone franche urbaine à compter du 1er janvier 2012, le bénéfice de l’exonération de charges sociales est dorénavant subordonnée, lors de toute nouvelle embauche, à la condition que, à la date de cette embauche (loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, art. 13 III nouveau) :

 le nombre de salariés résidant en ZFU ou en ZUS (8), en contrat à durée indéterminée ou déterminée d’au moins 12 mois et ayant un horaire de travail contractuel au moins égal à une durée fixée par décret (9), soit égal au moins à la moitié du total des salariés employés dans les mêmes conditions ;

 ou bien que le nombre de salariés, embauchés à compter de la création ou de l’implantation de l’entreprise et remplissant les mêmes conditions de travail et de résidence que celles énoncées ci-dessus, soit égal à la moitié du total des salariés embauchés dans les mêmes conditions au cours de la même période.

Ces dispositions s’appliquent pendant 5 ans à compter de la création ou de l’implantation de l’entreprise dans une zone franche urbaine.

A noter : l’exonération d’imposition sur les bénéfices attachée au dispositif des ZFU est également, à compter du 1er janvier 2012, subordonnée au respect de cette clause d’embauche.

À SUIVRE

Ce qu’il faut RETENIR

 Aide à domicile. Un fonds de restructuration de 50 millions d’euros est créé pour aider les services d’aide à domicile en difficulté financière.

 Handicap. Les enfants ne souffrant pas d’un grave handicap et scolarisés en milieu ordinaire peuvent bénéficier d’une « aide mutualisée ».

 Dépendance. Le crédit d’impôt « équipement » du domicile pour les personnes âgées et/ou handicapées est prorogé jusqu’au 31 décembre 2014.

 Ateliers et chantiers d’insertion. Le taux de prise en charge des contrats uniques d’insertion est pérennisé à 105 % du SMIC.

 Pôle emploi. Le recouvrement des indus de prestations versées par Pôle emploi, en particulier les allocations de solidarité, est amélioré.

 Préretraite-licienciement. L’allocation spéciale du Fonds national de l’emploi est supprimée depuis le 1er janvier 2012.

 ZFU. Le dispositif des zones franches urbaines est prorogé jusqu’au 31 décembre 2014 et est aménagé pour inciter davantage les entreprises à recourir à l’emploi local.

PLAN DU DOSSIER

DANS CE NUMÉRO

I. Les mesures relatives à l’action sociale

A. Un fonds de restructuration des services d’aide à domicile

B. la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire

C. La prorogation du crédit d’impôt « équipement » pour personnes âgées et handicapées

II. Les mesures sur l’emploi, l’insertion et la formation

A. Le financement dérogatoire du RSA « jeunes »

B. Le taux de prise en charge des CUI dans les ateliers et chantiers d’insertion

C. Le transfert à Pôle emploi de la gestion des indus des allocations de solidarité

D. Un nouveau prélèvement sur le FPSPP

E. La suppression de l’allocation spéciale du FNE

F. Les zones franches urbaines

DANS UN PROCHAIN NUMÉRO

III. Les mesures relatives aux pensions des fonctionnaires

IV. Les dispositions concernant les étrangers

V. Les mesures relatives aux anciens combattants

VI. Les mesures relatives au logement

LE GEL DU BARÈME DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

Pour une fois, la loi de finances ne contient pas, cette année, de dispositions actualisant le barème de l’impôt sur le revenu en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation (hors tabac).

Le gouvernement a en effet décidé, dans le cadre du « plan de retour à l’équilibre des finances publiques » dévoilé par le Premier ministre le 7 novembre dernier, de geler le barème de l’impôt sur le revenu afférent aux revenus de 2011 (impôt exigible en 2012) au niveau de celui des revenus de 2010 (10).

Cette mesure a été traduite, sur le plan législatif, dans la quatrième loi de finances rectificative pour 2011. Ce texte prévoit également le gel, à ce même niveau, du barème de l’impôt sur le revenu afférent aux revenus « des années suivantes ». Rappelons que le plan de rigueur prévoit la non-indexation du barème – et donc son maintien à son niveau actuel – en 2012 et 2013.

À RETENIR ÉGALEMENT

EMPLOI (ART. 154)

Le dispositif arrivait à terme au 31 décembre 2011. La loi de finances pour 2012 proroge de 2 ans – et donc jusqu’au 31 décembre 2013 – les exonérations sociales et fiscales en faveur des entreprises qui exercent une activité dans les bassins d’emploi à redynamiser.

REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE (ART. 8)

La loi de finances ajuste de manière pérenne le droit à compensation des départements métropolitains au titre de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA), qui s’est traduite par la prise en charge par les départements du montant forfaitaire majoré du RSA (anciennement allocation de parent isolé). Elle ajuste par ailleurs de manière ponctuelle la compensation versée aux départements métropolitains à ce titre pour les années 2009, 2010 et 2011, et établit la compensation due aux départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin au titre de la généralisation du RSA en outre-mer, entrée en vigueur le 1er janvier 2011. Enfin, le texte définit les modalités de compensation des charges résultant de la mise en œuvre du RSA à Mayotte à compter du 1er janvier 2012.

INSERTION (ART. 32)

Créé par la loi de finances pour 2006 pour, à l’origine, compenser en partie le surcoût du revenu minimum d’insertion pour les collectivités territoriales, le Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion (FMDI) est reconduit pour un an supplémentaire. Le FDMI étant réparti à partir des données recensées au cours de l’année qui précède celle de son versement, la loi de finances pour 2012 prévoit, en plus de cette reconduction, plusieurs dispositions de coordination permettant de prendre en compte la généralisation au 1er janvier 2011 du revenu de solidarité active dans les départements d’outre-mer, qui s’est accompagnée dans ces territoires de la mise en œuvre, selon un régime particulier, du contrat unique d’insertion.

Notes

(1) Voir ASH n° 2741-2742 du 13-01-12, p. 5.

(2) Circulaire n° DGCS/SD3A/ 2011/480 du 19 décembre 2011, NOR : SCSA1135160A, disponible sur http://circulaire. legifrance.gouv.fr.

(3) Toutefois, une mesure d’assouplissement permet de considérer que les structures qui sont engagées dans un processus de régularisation de leurs paiements sont éligibles au fonds.

(4) Néanmoins, si la situation estimée en 2011 fait apparaître une brutale et importante dégradation de la situation financière du service, celui-ci doit joindre une note décrivant cette situation afin, par exemple, de montrer qu’elle relève d’une difficulté structurelle. Dans ce cas, et de façon exceptionnelle, le service est éligible au fonds après vérification par l’ARS.

(5) Il s’agit notamment des aides relevant de la section IV du budget de la CNSA pouvant être allouées soit par les conseils généraux, les organismes paritaires collecteurs agréés et les têtes de réseau de l’aide à domicile dans le cadre des conventions départementales et nationales signées avec la CNSA, soit par les ARS elles-mêmes dans le cadre de leurs enveloppes régionales. Les agences doivent dans ce cas veiller à éviter toute redondance dans les financements attribués au titre de l’aide du fonds de restructuration et au titre de ces conventions.

(6) Un modèle de contrat-type est annexé à la circulaire de la DGCS du 19 décembre 2011.

(7) Voir ASH n° 2729 du 21-10-11, p. 7.

(8) Il s’agit plus précisément de la ZUS de l’unité urbaine dans laquelle est située la ZFU.

(9) Cette condition d’horaire de travail contractuel existait déjà auparavant mais avec une durée fixée à 16 heures par semaine ou 69 heures par mois (heures complémentaires non comprises).

(10) Sur le barème 2010, voir ASH n° 2697 du 18-02-11, p. 43.

Le cahier juridique

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