Au 1er décembre 2011, il y avait près de 63 000 hommes en prison. On estime que 40 % d’entre eux auraient un ou plusieurs enfants. Ce sont donc entre 70 000 et 80 000 jeunes qui sont touchés par l’emprisonnement de leur père. Mais ce dernier joue-t-il vraiment son rôle paternel ? Comment se sentir parent malgré l’éloignement ? Pour aider des pères incarcérés à prendre et à tenir une place auprès de leurs enfants, un groupe de soutien à la parentalité a été organisé pendant huit ans à la maison d’arrêt de Gradignan (Gironde) par Christiane Dufourcq-Chappaz, cadre pédagogique en institut régional de formation en travail social et surtout, en l’occurrence, bénévole au sein d’une association dédiée à l’aide aux familles concernées par la détention. Ouvert aux seuls volontaires qui s’engagent à une présence régulière un après-midi par semaine pendant trois mois, ce groupe d’une dizaine de pères n’est pas un groupe de parole – même si, bien sûr, on peut aussi y parler de soi et d’éducation. Il s’agit d’un atelier de confection de jouets ou d’objets pour les enfants. Des « objets relais », précise l’auteure, se référant à « l’objet transitionnel » du psychanalyste Winnicott (1896-1971), qui fait lien entre le monde interne du tout-petit et la réalité extérieure. Moyen parmi d’autres de dire à ses enfants que la séparation n’empêche pas l’affection, ces présents jettent un pont sur l’absence avec la double ambition de faciliter le développement de l’enfant et la réinsertion du détenu.
Etre père malgré tout. Univers carcéral et parentalité – Christiane Dufourcq-Chappaz – Ed. Chronique sociale – 14,50 €