« Pire que rien ! », telle est la réaction de la CFDT Santé-sociaux au lendemain de la conférence salariale annuelle des établissements et services sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif (voir ce numéro, page 11) qui a fixé le taux d’évolution des dépenses de personnel à 0,8 % pour 2012. Unanimes, les syndicats d’employeurs et de salariés dénoncent ce chiffre qui est, souligne la Fédération nationale de l’action sociale-FO, « inférieur aux augmentations de salaires liées à l’ancienneté pour la branche de l’aide à domicile et pour la convention collective du 15 mars 1966 ». De même, le Syndicat des employeurs associatifs de l’action sociale et santé (Syneas) note que, dans la mesure où ce taux ne couvre pas l’augmentation mécanique de la masse salariale (1 %), il se traduit en réalité par une baisse de 0,2 %. Il s’insurge contre « l’asphyxie qui guette les associations du secteur social et médico-social, dont l’action constitue pourtant une réponse face à la précarité ». Constatant que « les pouvoirs publics continuent d’appréhender ce secteur uniquement sous l’angle réducteur du coût alors que les missions exercées relèvent de l’intérêt général », il envisage d’interpeller les parlementaires et les candidats à la présidentielle « pour faire valoir sa position ».
Par ailleurs, Anne Taquet, secrétaire générale de l’Union fédérale de la santé privée-CGT, déplore que la conférence salariale « n’ait donné lieu à aucune discussion sur la reconnaissance des salaires », et note que la plupart des 47 accords nationaux conclus en 2011 dans le secteur, « ne portent pas sur les salaires mais sur d’autres sujets ».
Pour Philippe Calmette, directeur général de la Fegapei (Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées), ces annonces vont se traduire par une baisse du pouvoir d’achat des salariés et la perte d’attractivité du secteur pour les jeunes professionnels. En outre, souligne-t-il, il sera impossible dans ce contexte de développer des politiques salariales qui permettent de compenser les écarts entre les jeunes professionnels et les plus anciens. Les employeurs n’auront d’autre choix que de diminuer l’emploi, ce qui aura des conséquences négatives sur l’accompagnement des personnes. Il déplore « la vision exclusivement comptable des pouvoirs publics qui devraient, au contraire, considérer qu’investir dans le secteur social et médico-social, c’est investir sur la santé des populations de demain et pour les économies d’après-demain ».
De leur côté, les salariés de la branche de l’aide à domicile vont devoir faire face à une troisième année blanche, la valeur du point n’ayant pas été revalorisée depuis le 1er avril 2009. La situation est critique « puisque les neuf premières tranches de salaires de la catégorie A et les quatre premières de la catégorie B sont immergées sous le SMIC, ce qui concerne 40 % du personnel » (1), explique Laurence Jacquon, juriste à l’Union nationale ADMR (Association du service à domicile). Ayant anticipé les annonces de la conférence salariale, les partenaires sociaux de la branche se sont malgré tout engagés, lors de la commission mixte paritaire (CMP) du 26 janvier dernier, à négocier « a minima un accord pour sortir les premières tranches de salaires de l’immersion sous le SMIC », a indiqué Manuella Pinto, responsable des relations sociales à l’UNA (Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles), même si l’agrément d’un tel accord risque d’être difficile à obtenir. Concrètement, a-t-elle précisé, il pourrait s’agir de prendre des « mesures catégorielles, telles que la modification des coefficients immergés sous le SMIC ». Les employeurs devraient faire des propositions aux syndicats de salariés dès la CMP du 22 mars.
(1) Concrètement, cela concerne 100 000 salariés sur un total de 220 000 salariés.