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Hébergement d’urgence : un rapport parlementaire plaide pour l’ouverture de nouvelles places

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Les députés Danièle Hoffman-Rispal (PS, Paris) et Arnaud Richard (UMP, Yvelines) ont mené, durant 12 mois et en collaboration avec la Cour des comptes, une évaluation des premiers résultats de la « refondation » de la politique de l’Etat en matière d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans abri. Ils ont présenté le fruit de leurs travaux le 26 janvier au comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) de l’Assemblée nationale (1). Leur rapport complète celui des sages de la rue Cambon présenté aux membres du CEC en décembre dernier (2), qui pointait les lacunes de la politique d’hébergement et dont les députés « approuvent l’ensemble des recommandations ». Ils y ajoutent toute une série de propositions.

Un dispositif d’hébergement sous-dimensionné

C’est une position qui va à l’encontre de celle du gouvernement (3) mais qu’ils partagent avec la Cour des comptes : Danièle Hoffman-Rispal et Arnaud Richard estiment nécessaire l’ouverture de places nouvelles dans les zones tendues, le dispositif d’hébergement demeurant à leurs yeux « quantitativement sous-dimensionné malgré des efforts substantiels dans la période récente ». Les parlementaires soulignent à cet égard le déficit du nombre de places par rapport au nombre des personnes sans domicile : « 80 000 places pour environ 150 000 personnes ». Ce processus d’ouverture de places nouvelles devrait, pour eux, être mis en œuvre « au regard d’une analyse préalable et approfondie des besoins manquants dans chaque territoire ». Néanmoins, afin de contribuer à ce processus et d’« enclencher l’effort nécessaire pour le respect de l’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence », ils demandent que soit envisagée sans délai la pérennisation de tout ou partie des places supplémentaires ouvertes chaque hiver.

L’importance d’une action publique préventive

Convaincus qu’il existe « des dispositions susceptibles d’agir positivement sur le flux des “canaux d’alimentation” du sans-abrisme », les députés estiment que l’action publique ne doit « en aucune manière baisser les bras s’agissant de la prévention ». Ils approuvent à cet égard la recommandation de la Cour des comptes de renforcer les outils de prévention de la mise à la rue et d’étudier les coûts publics comparés d’un maintien dans le logement et d’une mise à l’abri au titre de l’hébergement d’urgence. Ils proposent en plus, de leur côté, d’« orienter résolument – le cas échéant en leur attribuant une feuille de route définie par la loi – l’activité des CCAPEX [commissions de coordination des actions de prévention des expulsions] vers l’étude des dossiers individuels d’impayés de loyer, notamment les plus complexes et les plus susceptibles de conduire à la mise à la rue des ménages concernés » (4).

Les députés estiment également, au-delà, qu’il faut promouvoir les communes qui construisent pour les plus démunis. Ils proposent ainsi que soit mise à l’étude une modification de la loi de solidarité et de renouvellement urbains imposant à certaines communes un quota de 20 % de logements sociaux dans l’ensemble de leur parc. Pistes proposées : le relèvement de ce taux dans les zones tendues ou bien encore la bonification pour le calcul de ce taux des logements sociaux construits en prêts locatifs aidés d’intégration et des places de pensions de famille.

Renforcer l’accompagnement social

Danièle Hoffman-Rispal et Arnaud Richard s’arrêtent également, dans leur rapport, sur « l’accompagnement social dans le logement », qui est une des composantes de la stratégie gouvernementale du « logement d’abord ». Ils se disent ainsi « favorables à la création de “plateaux techniques” constitués de travailleurs sociaux des CHRS [centres d’hébergement et de réinsertion sociale] ayant vocation à procéder à l’accompagnement social – “hors les murs” du centre – des personnes logées au titre du “logement d’abord” ».

La constitution de ces « plateaux techniques » serait aussi, pour eux, l’occasion de relancer la mise en place du « référent », qui devait représenter un lien personnel et individuel entre la personne hébergée ou logée et les travailleurs sociaux techniquement compétents. De nombreuses associations regrettent que ce volet de la refondation soit « à ce jour resté sans suite », notent les députés.

Un débat nécessaire autour de l’accueil des sans-papiers

La Cour des comptes l’a regretté dans son rapport : la situation des sans-papiers n’est pas traitée en tant que telle dans le cadre de la politique d’hébergement. Pourtant, nombre d’entre eux sont hébergés durablement, notamment dans des hôtels quand il s’agit de familles avec enfants, au titre de l’hébergement d’urgence. Rebondissant sur cette critique, Danièle Hoffman-Rispal et Arnaud Richard estiment que cet état de fait mériterait de faire l’objet d’un débat public sur l’adéquation de ces parcours, « nombreux, banalisés, accompagnés et financés sur fonds publics », avec les questions qui traversent la société sur les principes et les conditions d’accueil des étrangers. Pour eux, des questions de fond, sensibles, se posent, quand on voit que la précarité vécue par un ménage étranger sans titre de séjour correspond à un coût substantiel pour l’Etat. « On peut évoquer, à ce titre, l’interdiction de travailler des demandeurs d’asile – et donc la nécessité de les héberger ou de les aider à se loger, parfois à l’hôtel –, le cantonnement à l’hébergement d’urgence, souvent à l’hôtel là aussi, des familles déboutées du droit d’asile » ou bien encore « les conditions et la durée moyenne du processus de régularisation des sans-papiers ».

Une loi de programmation pour accompagner la refondation

Plus largement, les rapporteurs souhaitent « relever le niveau de priorité collective accordée aux personnes sans domicile et sans abri ». « La politique publique tendant à réinsérer les personnes sans domicile et plus largement très précarisées ne peut en tout état de cause réussir que si la société est ouverte et considère […] que ces personnes n’en sont pas exclues », expliquent-ils, partageant en cela le sentiment de certaines associations qu’il s’agit d’une question « à la fois culturelle et de priorité politique ». Sur ce dernier point, ils proposent la discussion et l’adoption, dès le début de la prochaine législature, d’un projet de loi d’orientation et de programmation pluriannuelle visant notamment à mettre en place « une série de dispositions et d’engagements traduisant concrètement une priorité collective nouvelle accordée au sort des personnes sans domicile et les plus précarisées ». Dans leur esprit, ce texte « serait défendu par un ministre de plein exercice, le cas échéant directement rattaché au Premier ministre ».

GRAND FROID : BENOIST APPARU VEUT QUE 100 % DES DEMANDES D’HÉBERGEMENT SOIENT SATISFAITE

Le secrétaire d’Etat chargé du logement a annoncé le 31 janvier, sur Canal +, qu’il avait demandé aux préfets de prendre en charge « 100 % des demandes » d’hébergement d’urgence pendant la vague de grand froid qui sévit actuellement en France. Benoist Apparu a, au passage, affirmé que des places supplémentaires allaient être disponibles.

« Par exemple, sur l’Ile-de-France nous avons ouvert 80 places la semaine dernière, on va ouvrir 150 places cette semaine », a-t-il indiqué. « Le nombre de places ouvertes toute l’année, c’est 117 000, 25 % de plus qu’en 2007. Pendant cette période hivernale, on a ouvert 10 000 places de plus et on peut monter jusqu’à 19 000 places. Donc on a encore des marges de manœuvre pour ouvrir dès cette semaine toutes les places indispensables pour nous permettre de résoudre cette question », a-t-il poursuivi. Evoquant le problème posé par « les personnes qui ne souhaitent pas un hébergement » d’urgence, le secrétaire d’Etat a précisé que ces dernières pourraient y être forcées si le froid les mettait en danger de mort.

Notes

(1) Rapport disp. sur www.assemblee-nationale.fr.

(2) Voir ASH n° 2738 du 23-12-11, p. 14.

(3) Rappelons que pour le secrétaire d’Etat chargé du logement et sa ministre de tutelle, il est possible, à capacités constantes, de « limiter la demande par la prévention et de mieux y répondre par l’accélération des sorties vers le logement ».

(4) Les CCAPEX rassemblent les principaux acteurs susceptibles de concevoir et mettre en œuvre les voies et moyens permettant à un ménage de surmonter des difficultés de paiement de leur loyer (maire de la commune concernée, organismes payeurs des aides au logement, etc.). politique Économique et sociale

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