L’histoire est à peine croyable : Hélène Nicolas est une jeune femme de 25 ans, autiste diagnostiquée « déficitaire à 80 % ». Jamais scolarisée, elle n’a – selon ses propres mots – « jamais appris à lire, à écrire, à parler ». C’est par ses propres moyens, enfermée dans sa bulle, qu’elle a acquis des connaissances. Elle ne parle toujours pas, mais réussit à lire et à écrire. Comme elle ne peut pas tenir un crayon ni utiliser un clavier, elle communique avec des lettres majuscules tracées sur des morceaux de carton qu’elle dispose un à un sur une feuille blanche. Et ce qu’elle écrit n’a rien de banal : ce sont des œuvres d’une grande force poétique. Une énigme.
Après une rencontre avec le metteur en scène Arnaud Stéphan, la jeune virtuose rédige un texte qui reçoit les encouragements du Centre national du théâtre. Le jeune homme l’a monté sous forme de monologue en novembre dernier dans le cadre du festival Mettre en scène en Ille-et-Vilaine, sous le titre A nos étoiles. Le livre tiré de cette aventure, lui, s’intitule Raison et Acte dans la douleur du Silence et est signé « Babouillec autiste sans paroles », un nom qu’Hélène s’est choisi à partir du diminutif que lui donnaient ses parents. Sur une cinquantaine de pages, l’auteure joue avec les sonorités, évoque sa famille, Tintin (!), sa maladie : « L’autisme n’est pas une jungle mais un désert édulcoré. Je le sillonne chaque jour pour trouver la sortie. » C’est un monologue intérieur qu’elle livre au tout-venant, un poème dramatique, incisif, révolté : « Etre autiste, c’est affronter l’hostilité », semble-t-elle crier à travers les lignes, avant de s’indigner plus loin : « Placardée autiste très déficitaire et sans retour on a essayé d’éteindre ma lumière. J’ai refusé cet enfermement pénitentiaire dans ma propre cellule corporelle pour rester libre dans ma réflexion. » Inclassable et bouleversant.
Raison et Acte dans la douleur du Silence – Babouillec autiste sans paroles – Ed. Christophe Chomant éditeur – 12,50 € –
Etre autiste
Concept ordinaire de l’autocritique
Les ordres bousculent l’initiative itinérante. Tu es en chemin d’exécution d’un acte dicté par ta raison,
Quelqu’un t’interpelle, Otage de ton Silence, tu perds la Raison de ton Acte.
Livré à toi-même, ordre ou désordre, seul responsable, tu plonges dans le plus proche état disponible, égarant le mode d’emploi du contrat social.
KO relationnel puis Big Bang émotionnel
La faute à qui tout ça ?
Edifiante question. Est-on responsable de nos déficiences ? Les autres sont-ils garants de nos absences ?