La loi a prévu la participation des allocataires du revenu de solidarité active (RSA) au fonctionnement des équipes pluridisciplinaires chargées notamment de rendre un avis sur les réorientations de titulaires (1), ou encore sur les décisions de réduction ou de suspension de la prestation. Mais elle n’est pas toujours mise en œuvre par les conseils généraux. Conformément au souhait du secteur associatif, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a mandaté cinq organisations (2) pour analyser, dans huit départements, la façon dont les allocataires du RSA sont intégrés à ces équipes.
De la synthèse de ces enquêtes (3), il ressort que les conditions de mise en œuvre de cette participation sont très diverses. Certains départements mettent en place des « groupes ressources » qui rassemblent des bénéficiaires. Ils constituent des espaces de parole plus libres que les équipes pluridisciplinaires et représentent « un vivier » lorsqu’il faut renouveler les représentants des allocataires. Pour désigner ces derniers, les organisations plébiscitent le volontariat (plutôt que le tirage au sort) à condition justement que le dispositif de « mobilisation des bénéficiaires s’appuie sur un groupe ressources, la désignation entre pairs issus d’un même groupe ressources donnant plus de force au mandat ». Quelques conseils généraux financent des associations qui coordonnent la démarche participative dans le département.
Autre constat : la nécessité de former les représentants des allocataires. Outre un volet « information » (règles de fonctionnement de l’équipe pluridisciplinaire…), certains départements mettent en place des formations plus spécifiques, à la prise de parole en public par exemple. Ces formations permettent aux allocataires de s’approprier le dispositif et l’environnement dans lequel ils vont intervenir, notamment la compréhension du langage administratif. Là encore, l’appui sur un groupe ressources permet de compléter l’offre de formation pour répondre à des besoins qu’il aura permis d’exprimer. Le rapport note cependant que la formation doit concerner l’ensemble des membres des équipes pluridisciplinaires (élus, professionnels, animateurs) « afin de mieux situer l’intervention du représentant des bénéficiaires du RSA ».
Le fonctionnement des équipes diffère d’un département à l’autre. Dans certaines, les dossiers présentés sont anonymisés, dans d’autres, ils ne le sont que pour les représentants des allocataires – les autres membres de l’équipe ayant accès aux noms –, « ce qui est jugé inéquitable ». Il apparaît en outre difficile de mobiliser des bénéficiaires volontaires lorsque les missions de l’équipe pluridisciplinaire se limitent à proposer des sanctions et des suspensions d’allocation. Certains représentants font part, dans ce cas, de leur peur d’être instrumentalisés. Enfin, les organisations pointent les bénéfices de la présence d’un animateur qui garantit que tous les représentants trouvent leur place dans l’équipe.
La participation des titulaires du RSA à l’équipe pluridisciplinaire est positive à plusieurs titres. Elle « apporte un regard spécifique qui complète celui des autres membres » et favorise la pédagogie et la transparence dans la prise de décision. Néanmoins, les auteurs soulignent sa principale limite : la présence des représentants des bénéficiaires ne vient pas « directement influer la prise de l’avis par l’instance ».
Pour les allocataires, cette participation permet l’acquisition de connaissances, en particulier sur le RSA. Elle renforce l’estime qu’ils ont d’eux-mêmes, leur donne le sentiment d’avoir une place, d’être utiles et permet de démystifier l’administration. A titre collectif, la participation redonne du crédit à l’institution, contribue à changer le regard des professionnels sur les allocataires et crée du lien social.
Parmi ses préconisations, la DGCS suggère de développer les groupes ressources pour inscrire la participation dans une démarche globale. Elle propose aussi de rédiger, au niveau national, un document d’accompagnement des conseils généraux qui présente le dispositif, le rôle du représentant des bénéficiaires du RSA en équipe pluridisciplinaire, le sens et l’intérêt de sa participation ainsi que des exemples de bonnes pratiques.
(1) Vers les structures d’insertion sociale ou vers Pôle emploi et les organismes concourant au service public de l’emploi.
(2) L’Agence nouvelle des solidarités actives, ATD quart monde, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, la Mission régionale d’information sur l’exclusion en Rhône-Alpes et l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux.
(3) Disp. sur