La révision des règles sur l’octroi des aides d’Etat aux services d’intérêt économique général (SIEG), telle qu’adoptée par la Commission européenne le 20 décembre, fait la part belle aux services sociaux d’intérêt général (SSIG). Pour la première fois, l’exécutif européen réserve en effet un traitement spécifique à ces services en raison de leur faible impact sur la concurrence au sein du marché intérieur, ce dont se félicite le collectif SSIG (voir ce numéro, page 23).
Ces nouvelles règles – également dénommées « paquet Almunia », du nom du commissaire européen chargé de la concurrence – doivent remplacer le « paquet Monti-Kroes » de juillet 2005 sur les compensations d’obligations de service public en faveur des SIEG. Depuis leur présentation en septembre dernier (1), elles ont été soumises à la consultation des Etats membres et ont ainsi un peu évolué pour tenir compte des commentaires formulés dans ce cadre. Le nouveau « paquet Almunia » se compose de quatre textes (2) :
une communication qui apporte des éclaircissements sur les notions fondamentales relatives aux SIEG (aide, activité économique, mandat…) ;
une décision qui exempte les Etats membres de l’obligation de notifier à la Commission européenne les compensations de services publics accordées pour certaines catégories de SIEG ;
une communication qui donne un cadre permettant d’apprécier les montants de compensation élevés accordés à des opérateurs en dehors du secteur des services sociaux ;
une nouvelle proposition de règlement relatif aux aides « de minimis », c’est-à-dire les aides d’importance mineure qui ne sont pas qualifiées d’aides d’Etat, et échappent donc à la réglementation afférente.
Les trois premiers textes s’appliqueront à compter du 31 janvier 2012, sans qu’il y ait besoin de consulter le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. Le nouveau règlement sur les aides « de minimis » doit, quant à lui, recevoir l’aval des parlementaires européens et du Conseil. La Commission européenne mise sur une adoption de ce quatrième volet au printemps 2012.
Le « paquet Almunia » exempte tous les services sociaux de l’obligation de notifier à la Commission européenne les compensations de service public qui leur sont accordées, quel que soit le montant reçu. Actuellement, le droit européen permet aux Etats membres, sous certains conditions, d’accorder un soutien financier (compensation) aux SIEG afin de leur permettre d’accomplir leur mission de service public. La Commission est, pour sa part, chargée d’apprécier l’aide d’Etat que suppose cette compensation et de veiller à ce qu’il n’y ait pas « surcompensation », c’est-à-dire de vérifier que le montant de l’aide ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés et ne fausse donc pas la concurrence. Pour cela, elle demande une notification préalable du projet d’aide.
Jusqu’à présent, seuls le logement social et les hôpitaux étaient exemptés de cette notification préalable. A partir du 1er janvier 2012, ce sera aussi le cas de tous les « services d’intérêt économique général répondant à des besoins sociaux dans le domaine de la santé et des soins de longue durée, de la garde d’enfants, de l’accès au marché du travail et de la réinsertion sur ce dernier, ainsi que de l’aide aux groupes vulnérables et de leur inclusion sociale ». Ils devront toutefois remplir certaines conditions fondamentales en matière notamment de transparence (publication du montant de l’aide accordée…), de mandatement et d’absence de surcompensation.
Les autres SIEG, eux, bénéficieront d’une exemption de notification si le montant de la compensation est inférieur à 15 millions d’euros par an (contre 30 millions actuellement).
Le projet de règlement sur les aides « de minimis » prévoit, quant à lui, d’exempter de notification ou d’autorisation préalable les « petits services publics sans danger pour la concurrence » lorsque les compensations qui leur sont octroyées ne dépassent pas 500 000 € sur trois ans (contre 200 000 € actuellement et 450 000 € dans la proposition de septembre dernier). Pour être qualifiée d’aide « de minimis », l’aide devait, dans la version initiale du règlement, être octroyée par une autorité locale représentant une population de moins de 10 000 habitants à une entreprise dont le chiffre d’affaires annuel ne devait pas dépasser 5 millions d’euros au cours des deux exercices fiscaux précédents. A la suite de nombreuses critiques (3), ces deux seuils ont été supprimés.
(2) Ces quatre textes sont disponibles sur
(3) Notamment celles du Sénat français qui, dans une résolution adoptée le 13 décembre, réclamait le retrait de la condition de la taille de la collectivité. Plus globalement, les sénateurs demandaient que la publication du « paquet Almunia » soit repoussée après l’adoption d’un cadre général et transversal tel qu’une directive-cadre relative aux SIEG ou aux SSIG.