C’est une approche compréhensive du handicap, intégrant les différentes dimensions d’un être humain – à la fois sujet, organisme et individu social – que proposent les auteurs réunis dans cet ouvrage par Pierre Ancet, philosophe, et Noël-Jean Mazen, juriste spécialisé en éthique. Parce que « l’être humain n’existe qu’en fonction d’une relation véritable à l’autre », souligne Noël-Jean Mazen, respecter la personne en situation de handicap impose de l’écouter, même si ses capacités à se faire entendre sont des plus réduites. Mais si aucun handicap ne justifie que la recherche de la volonté de l’intéressée soit sacrifiée, force est de constater la tendance très répandue à infantiliser la personne vulnérable, qui voit sa subjectivité ignorée, voire déniée. Que ce soit par manque d’investissement, de respect, de reconnaissance ou par excès de soins, d’attention, de précaution, etc., « l’expérience clinique nous indique que la personne handicapée, quel que soit son handicap, est plus à risque d’être traitée comme une chose », témoigne Anne Aubert Godard, psychologue clinicienne et psychanalyste, à la lumière de sa propre expérience du handicap moteur. C’est aussi en tant que « chercheur de l’intérieur », spécialiste en sciences de l’éducation atteint d’infirmité motrice cérébrale, que Jean-Marc Bardeau-Garneret insiste, quant à lui, sur le travail psychique que suppose la construction d’un « soi handicapé », consistant à prendre conscience de ses capacités comme de son besoin d’aide. Les adolescents ou jeunes adultes qui « n’ont pas pu intégrer la part “handicapée” d’eux-mêmes […] vont à la rencontre de l’échec et du désespoir », ajoute-t-il.
Culture
Le « soi handicapé »
Article réservé aux abonnés
Ethique et handicap – Sous la direction de Pierre Ancet et Noël-Jean Mazen – Ed. Les Etudes hospitalières – 34 €