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Le modèle social en péril ?

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Dans un ouvrage engagé, Michel Chauvière, directeur de recherche au CNRS,poursuit sa réflexion sur le basculement du secteur social dans une logique de marché. Et invite à revenir à ses fondamentaux.

Dans le droit fil de son ouvrage précédent (1) et de ses engagement militants, Michel Chauvière, directeur de recherche au CNRS, dénonce la destruction du modèle social historique sous la pression du marché et de la généralisation du modèle de l’entreprise. Le « carré des intelligences », qui s’était bâti autour de quatre registres indissociables – les droits, les institutions, les savoirs et la clinique –, serait sacrifié au nom de l’idéologie gestionnaire et de la performance. Ce sont les effets de ce « grand retournement » sur les pratiques et les représentations – on passerait d’une culture analogique à une culture numérique-algorithmique – qu’il examine avant d’en tirer des propositions pour une « politique alternative ».

Si Michel Chauvière met en évidence l’inflation législative et réglementaire des années 2000 – faisant le distinguo entre les politiques « constitutives » (dont la loi organique relative aux lois de finances et la révision générale des politiques publiques) et « protectrices » ou « répressives » –, il l’attribue au seul « néolibéralisme agressif ». Un prisme qui obère la complexité des mouvements à l’œuvre comme l’évolution des publics ou les transformations de l’environnement. S’il ne s’agit pas de sous-estimer les tendances négatives, et inquiétantes, relevées ici – la survalorisation du résultat chiffré liée à la nouvelle gestion publique, l’introduction avec les appels d’offres d’une logique de marché, la remise en question du mode de gestion associatif… –, rien ne semble toutefois définitivement joué. Plusieurs constats sont justes, mais le sociologue minimise le jeu des acteurs. D’abord, des fédérations associatives qui accompagnent le processus législatif et réglementaire en amont et en aval et sont présentes dans les instances de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) et de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), dont la doctrine n’est pas stabilisée. Ensuite, des professionnels à travers leurs initiatives. A cet égard, si l’auteur insiste à juste titre sur l’importance de la formationet de la recherche, secteurs qu’il connaît bien, pour contrer le rabaissement du travail social à la prestation de services, il passe un peu rapidement sur les hautes écoles professionnelles d’action sociale et de santé et ne dit rien du projet de conférence de consensus sur la recherche dans le champ social. C’est pourtant là aussi que se joue la résistance. Non pas sans doute, comme il est envisagé ici, pour revenir à un modèle qui avait aussi ses rigidités, mais pour permettre à la culture professionnelle de s’adapter aux nouveaux enjeux. Certes, la tâche est difficile, mais la bataille, comme l’écrit l’auteur lui-même, « n’est pas définitivement perdue ».

L’intelligence sociale en danger – Michel Chauvière – Ed. La découverte – 21 €
Notes

(1) Trop de gestion tue le social (Ed. La découverte, 2007) – Voir ASH n° 2533 du 30-11-07, p. 37.

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