Pourquoi cette démarche ?
La société change de façon phénoménale. L’Etat est en retrait alors que les besoins sociaux explosent. Les associations, face à une demande multiforme, doivent apporter des réponses sans en avoir les moyens. Pour s’adapter à ce contexte inédit et permettre au monde associatif de réagir, nous avons, dès 2010, lancé une démarche d’analyse prospective, « Faire ensemble 2020 ». Pour construire nos hypothèses, nous avons rencontré des experts, consulté les acteurs de terrain à travers 60 groupes locaux et un sondage réalisé auprès de 1 300 responsables associatifs.
Qu’avez-vous constaté ?
Une profonde inquiétude quant aux années à venir. 91 % des répondants (dirigeants, bénévoles et salariés) prévoient d’importantes difficultés budgétaires à l’horizon 2020. 78 % pensent que l’Etat aura « un rôle marginal dans le partenariat public des associations ». Si 77 % estiment que les associations devront s’orienter de plus en plus vers des activités marchandes pour trouver de nouvelles ressources, ils ne sont que 46 % à adhérer à cette idée. Ils sont aussi sceptiques sur l’aptitude du secteur à mieux organiser sa gouvernance (renouvellement des dirigeants, équilibre entre salariés et bénévoles…). Malgré ce sombre état des lieux, 78 % des acteurs estiment que les associations auront les capacités de peser sur les transformations futures de la société.
Quel avenir pour les associations en 2020 ?
Nous avons élaboré quatre scénarios plausibles. Le premier est le plus sinistre : dans une société où la marchandisation et l’individualisme l’emportent, les associations sont préoccupées par leur survie et cherchent à s’adapter pour devenir compatibles avec le marché. Elles ont renoncé à jouer un rôle politique. Les projets financés par les pouvoirs publics sont peu issus de leur réflexion. Ils relèvent de la gestion technocratique et les associations ne sont plus que des prestataires de services. Le deuxième scénario est proche du modèle britannique : l’Etat, qui édicte contrôles et normes, délègue une grande partie des services publics aux associations. Ces dernières se sont adaptées au modèle économique dominant mais l’innovation associative est compromise.
Le troisième scénario a votre faveur…
Oui, dans cette hypothèse, l’économie sociale et solidaire est une force économique et politique. Les entreprises s’impliquent dans le partenariat avec les associations et l’essentiel de la protection sociale est préservée. L’acte III de la décentralisation a eu lieu et l’échelon local devient le lieu de la construction de réponses plus individualisées, notamment pour ce qui concerne l’accompagnement des personnes et le respect de leurs droits. Ce scénario n’est possible que si le mouvement associatif se mobilise d’une seule voix. Enfin, le dernier scénario est plus idyllique. Un nouveau mode d’économie se développe et transforme le rapport à l’activité productive. Les associations sont parvenues à imposer le principe d’un encastrement du marché dans des règles décidées de manière démocratique. Les entreprises ont mis à leur agenda leur participation à la construction de l’intérêt général.
Et maintenant ?
Les scénarios ont été discutés lors de l’Université d’automne. Nous allons mettre en débat le matériau récolté lors de ces journées afin d’apporter des outils conceptuels et méthodologiques au monde associatif pour qu’il construise son avenir.
(1) Présentés lors de l’Université d’automne de la Fonda les 22 et 23 novembre à Paris –