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Le gouvernement annonce plus de moyens pour l’exécution des peines et la prévention de la récidive

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Conformément à une demande du président de la République en septembre dernier (1), un projet de loi de programmation relatif à l’exécution des peines pour la période 2013-2017 a été présenté en conseil des ministres le 23 novembre. Un texte que Nicolas Sarkozy entend faire adopter avant la fin de la législature et qui est censé, selon la chancellerie, « garantir l’effectivité de l’exécution des peines, renforcer les dispositifs de prévention de la récidive et améliorer la prise en charge des mineurs délinquants ». Ce projet de loi arrive à point nommé pour le gouvernement, à la suite du viol et du meurtre d’une jeune fille au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire) par un adolescent placé sous contrôle judiciaire pour avoir déjà commis un viol sur une mineure un an auparavant dans le Gard. Jugé comme « réinsérable et ne présentant pas de dangerosité » par des experts psychiatres, le jeune homme, mis en examen, était soumis à une obligation de suivi psychiatrique et de scolarisation dans un internat. D’autres mesures, qui n’ont pas besoin d’être traduites dans une loi, complètent le projet de loi de programmation.

Améliorer la prise en charge des mineurs délinquants

Afin que l’« affaire du Chambon-sur-Lignon » ne se reproduise pas, le Premier ministre a, lors d’une réunion qui s’est tenue le 21 novembre, donné un certain nombre d’instructions aux ministres de la Justice, de l’Intérieur et de l’Education nationale ainsi qu’à la secrétaire d’Etat à la santé. Il a tout d’abord demandé à Michel Mercier et à Luc Chatel de « prévoir qu’il ne soit plus possible d’inscrire un élève dans un établissement scolaire sans avoir informé de façon complète notamment le chef d’établissement et le psychiatre chargé du suivi […], dans le respect des règles sur le secret des enquêtes. Pour les crimes les plus graves, le garde des Sceaux demandera aux parquets de requérir le placement en centre éducatif fermé [CEF] jusqu’au jugement » ou le maintien en détention provisoire, a ajouté François Fillon. Une circulaire en ce sens devrait être diffusée aux parquets dès la semaine prochaine. Cette mesure – que les acteurs de la protection judiciaire de la jeunesse contestent (voir réactions, page 23) – pourra être mise en œuvre notamment grâce à la création de 20 CEF supplémentaires par transformation de foyers d’hébergement existants, a rappelé le ministre de la Justice. Et 90 emplois d’éducateurs seront programmés, dont 60 sur le budget 2012. Toujours en ce qui concerne les CEF, le garde des Sceaux a indiqué que des pédopsychiatres – actuellement présents dans 13 centres – devront assurer une permanence dans 25 autres établissements. A ce titre, 37 emplois équivalents temps plein seront créés, a-t-il assuré.

Par ailleurs, le projet de loi de programmation prévoit que la prise en charge du mineur par le service éducatif de la PJJ devra être faite dans un délai de cinq jours au maximum à compter de la date de son jugement. Ce qui nécessitera de renforcer les effectifs de ce service, « notamment dans 29départements retenus comme prioritaires », a expliqué le ministre de la Justice. Pour cela, 120 emplois d’éducateurs seront créés dès 2013 pour une mise en œuvre de la mesure au 1er janvier 2014.

Enfin, l’« affaire du Chambon-sur-Lignon » pose la question du secret professionnel partagé entre la justice, l’école et la santé. Une question qui, selon le Premier ministre, devrait être résolue par un amendement au projet de loi de programmation.

Prévenir la récidive

« La prévention de la récidive doit être une priorité absolue de tous les services de l’Etat, et en particulier de tous ceux qui ont à gérer les questions liées aux viols et aux crimes sexuels », a martelé le Premier ministre. C’est pourquoi le ministère de la Justice va mettre en place des outils visant à mieux évaluer le profil des personnes condamnées. Le diagnostic à visée criminologique, qui doit être généralisé au 1er mars 2012, et le suivi différencié mis en œuvre par les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) en sont des exemples (2). Afin de permettre l’évaluation approfondie et régulière des personnes condamnées à de longues peines qui présentent un « degré de dangerosité supérieur », Michel Mercier a confirmé la construction de trois centres nationaux d’évaluation, en plus de ceux de Fresnes (Val-de-Marne) et de Réau (Seine-et-Marne), et la création de 50 emplois supplémentaires. Devrait en outre être créé un second établissement spécialisé dans la prise en charge des détenus souffrant de troubles graves du comportement. De plus, François Fillon a demandé à Michel Mercier et à Nora Berra d’évaluer les moyens de prise en charge psychiatrique des criminels violents, « tant pour évaluer leur dangerosité que pour leur délivrer les soins que l’autorité judiciaire leur impose de suivre ». Les conclusions et les recommandations des ministres devront lui être remises « au plus vite ».

Par ailleurs, des pratiques innovantes de prise en charge des délinquants devraient être généralisées et élaborées par une équipe pluridisciplinaire.

Le projet de loi de programmation prévoit également de confier les enquêtes présentencielles au secteur associatif habilité, « ce qui permettra aux conseillers d’insertion et de probation de se recentrer sur le suivi des personnes condamnées », estime le garde des Sceaux. Ce sont ainsi 130 emplois de conseillers qui pourront être redéployés.

Pour assurer l’efficacité de la prévention de la récidive, certaines mesures du récent rapport des inspections générales des finances et des services judiciaires sur l’organisation et le fonctionnement des SPIP devraient être mises en œuvre (3). Michel Mercier a indiqué que seront ainsi élaborés un référentiel d’activité afin de préciser les missions de ces services, un organigramme de référence et des indicateurs fiables de mesure de la charge de travail et des résultats. Il a en outre précisé que les SPIP pourraient bientôt bénéficier du renfort d’équipes mobiles (88 emplois supplémentaires d’ici à 2013) en cas de pic d’activité et qu’il introduirait « plus de souplesse dans la gestion des effectifs [des services] ». Cette réorganisation des SPIP s’accompagnera de la création de 103 emplois de psychologues, a précisé le ministre.

Assurer l’exécution des peines

Selon la chancellerie, 85 000 peines étaient en attente d’exécution en juin dernier. Afin de remédier à cette situation, le projet de loi de programmation prévoit de renforcer les services de l’application et de l’exécution des peines, en créant 120 postes de magistrats et 89 emplois de greffiers.

Le ministre de la Justice a en outre rappelé qu’un bureau d’exécution des peines doit être implanté dans toutes les juridictions. Pour cela, 15,4 millions d’euros ont été programmés en loi de finances pour 2012 et devront notamment permettre de recruter 207 emplois supplémentaires de greffiers et de fonctionnaires.

Augmenter la capacité du parc pénitentiaire

Selon les vœux de Nicolas Sarkozy, 30 000 places de prison supplémentaires devraient être ouvertes d’ici à 2017, portant leur nombre total à 80 000. Et, dans ce cadre, des structures spécifiques pour les personnes condamnées à de courtes peines (4) – actuellement hébergées dans des maisons d’arrêt et confrontées à des codétenus aux profils parfois différents – seront construites. Au final, cela implique de revoir la classification des établissements pénitentiaires. Aujourd’hui, le code de procédure pénale distingue les maisons d’arrêt des établissements pénitentiaires (centres de détention et maisons centrales). Le projet de loi de programmation propose donc une nouvelle typologie, pour parler d’établissements à sécurité renforcée, normale, adaptée et allégée. Pour le garde des Sceaux, « cette nouvelle classification favorisera la différenciation des régimes et l’élaboration de parcours d’exécution des peines pour chaque condamné », telles que prévues par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 (5).

Notes

(1) Voir ASH n° 2724 du 16-09-11, p. 17.

(2) Voir ASH n° 2733 du 18-11-11, p. 16.

(3) Voir ASH n° 2733 du 18-11-11, p. 15.

(4) Selon le garde des Sceaux, 50 % des peines en attente d’exécution sont inférieures ou égales à trois mois.

(5) Voir ASH n° 2682 du 12-11-10, p. 43.

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