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Les modifications apportées par la loi « Fourcade » à la loi « HPST »

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Sans remettre en cause les grands principes de la loi « hôpital, patients, santé et territoires » du 21 juillet 2009, la loi « Fourcade » du 10 août 2011 lui apporte des corrections. Plusieurs dispositions concernent les établissements et services sociaux et médico-sociaux : précisions sur les exonérations de la procédure d’appel à projet, clarification du statut des médecins libéraux qui interviennent en EHPAD… Des retouches sont également apportées dans le secteur sanitaire.

La loi du 10 août 2011 modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (dite loi « HPST ») a finalement été publiée au Journal officiel amputée de près de la moitié de ses articles, à la suite d’une décision de censure du Conseil constitutionnel.

Portée par le sénateur (UMP) Jean-Pierre Fourcade, la proposition de loi visait initialement à corriger quelques dispositions de la loi du 21 juillet 2009. Plus précisément, l’objectif poursuivi était « d’aménager certaines mesures dont l’application est apparue trop complexe ou excessivement lourde administrativement et qui ont été très mal perçues par les professionnels de santé », a expliqué la rapporteure de la loi à l’Assemblée nationale, la députée (UMP) Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 9). Le texte s’est ensuite considérablement enrichi au cours des débats parlementaires pour comporter dans sa version finale quatre fois plus d’articles que la proposition de loi d’origine. Mais il a finalement subi la censure du Conseil constitutionnel. Le 4 août, la Haute Juridiction a en effet déclaré près de la moitié des articles contraires à la Constitution en les jugeant sans lien avec le texte d’origine ou, lorsqu’ils ont été introduits après la première lecture du texte au Parlement, sans lien avec une disposition restant encore en discussion. Parmi les dispositions invalidées, figurent notamment la prise en charge par l’assurance maladie des frais de transport des enfants accueillis dans les centres d’action médico-sociale précoce ainsi que l’article qui précisait le régime des sanctions prononcées lorsqu’il est fait obstacle au contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ou encore les mesures de coordination en matière de contentieux tarifaire. Le dépistage systématique de la surdité chez les nourrissons n’a pas non plus franchi le cap du Conseil constitutionnel.

La censure ne porte toutefois pas sur la pertinence des dispositions, qui sont donc susceptibles d’être reprises ultérieurement dans un vecteur législatif adapté, a relevé le ministère de la Santé dans un communiqué du 4 août. Ce qui est le cas du dépistage systématique de la surdité chez les nourrissons, puisqu’il était déjà prévu dans une proposition de loi adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 30 novembre 2010 (1).

Au final, la loi dite « Fourcade » comporte une série de mesures qui concernent les établissements et les services sociaux et médico-sociaux ainsi qu’un volet sanitaire. Elle procède par ailleurs à la ratification de l’ordonnance du 23 février 2010, dite de coordination avec la loi « HPST » (2), lui conférant ainsi une valeur législative (art. 64 de la loi).

I. LES MESURES RELATIVES AU SECTEUR MÉDICO-SOCIAL

Simplifier et affiner les règles relatives au secteur médico-social qui avaient été fixées par la loi « HPST ». Tel est l’objectif poursuivi par la loi du 10 août 2011 à travers plusieurs mesures : clarification des conditions de transformation des établissements sociaux et médico-sociaux au regard de la procédure d’autorisation par appel à projet, adaptation des processus de financement de la formation par la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, sécurisation du statut des groupements de coopération sociale et médico-sociale. La loi « Fourcade » aménage aussi certaines règles applicables dans les centres d’action médico-sociale précoce, les structures d’addictologie et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Une mesure concerne par ailleurs les schémas régionaux relatifs aux centres d’accueil pour demandeurs d’asile et aux services tutélaires.

A. LA PROCÉDURE D’APPEL À PROJET (ART. 38, III DE LA LOI)

La loi « HPST » du 21 juillet 2009 a instauré une procédure d’appel à projet à laquelle doivent se soumettre les établissements et services sociaux et médico-sociaux pour obtenir une autorisation (3). Sont concernés par l’autorisation les projets de création, de transformation et d’extension d’établissements ou de services sociaux et médico-sociaux. Certains projets (opération de regroupement d’établissements ou de services sans financement public, changement de l’établissement ou du service sans financement public et sans transformation) sont logiquement exclus de la procédure d’appel à projet dans la mesure où ils ne sont pas soumis à autorisation. Ces situations ont été précisées par un décret du 26 juillet 2010 qui a fixé les modalités d’application de la nouvelle procédure (4). Dans les autres cas, les structures sont exclues de la procédure d’appel à projet sans pour autant être dispensées de solliciter une autorisation.

« Une lecture combinée des dispositions législatives et réglementaires laisse […] supposer que les transformations sans changement de la catégorie de bénéficiaires sont non seulement exemptées de la procédure d’appel à projet mais également de l’autorisation », explique la députée Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 171). Afin de lever les ambigüités, la loi « Fourcade » du 10 août 2011 prévoit donc explicitement que les transformations sans modification de la catégorie de prise en charge, au sens du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles (CASF) qui fixe les différentes catégories d’établissements et de publics pris en charge, sont exonérées de la procédure d’appel à projet (CASF, art. L. 313-1-1, III nouveau). « Ces opérations ne sont, en revanche, pas exemptées de la procédure d’autorisation préalable », indique la rapporteure (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 171).

Par ailleurs, la loi « HPST » a prévu que les opérations de regroupement d’établissements et services préexistants sont exonérées de la procédure d’appel à projet si elles n’entraînent pas des extensions de capacités supérieures à 30 % ou 15 places ou lits de la capacité initiale autorisée et si elles ne modifient pas les missions des établissements et services. Il est désormais précisé que cette deuxième condition s’entend comme la non-modification de la catégorie de prise en charge, au sens du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles (CASF, art. L. 313-1-1, II modifié).

B. LES CENTRES D’ACTION MÉDICO-SOCIALE PRÉCOCE (ART. 47, II)

Deux mesures de la loi « Fourcade » concernant les centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP) réparent des erreurs introduites par la loi « HPST ».

A noter : le Conseil constitutionnel a par ailleurs censuré l’article 39 de la loi qui instaurait la prise en charge par l’assurance maladie des frais de transport des enfants et des adolescents suivis par des CAMSP ou des centres médico-psycho-pédagogiques.

1. LA COMPÉTENCE CONJOINTE DU DIRECTEUR DE L’ARS ET DU PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL

La loi « HPST » a placé les centres d’action médico-sociale précoce sous la coupe exclusive du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS). Mais, dans le même temps, elle les a également soumis à la compétence conjointe du directeur général de l’ARS et du président du conseil général. Rappelons que ces structures, financées à 80 % par l’assurance maladie et à 20 % par le département, relevaient, avant la loi « HPST », d’une autorisation délivrée conjointement par le préfet de département et le président du conseil général.

La loi « Fourcade » répare l’erreur de la loi « HPST » et confirme que les CAMSP relèvent bien de la compétence conjointe du directeur général de l’ARS et du président du conseil général (CASF, art. L. 313-3, al. 3 modifié).

2. PAS DE CPOM OBLIGATOIRE

La loi « HPST » a soumis les établissements relevant de la compétence tarifaire exclusive du directeur de l’agence régionale de santé ou du préfet de région qui atteignent un certain seuil à l’obligation de signer un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM), en y incluant les CAMSP. Or ces centres ne relèvent pas de la coupe exclusive du directeur de l’ARS, comme le confirme la loi « Fourcade » (voir ci-dessus). Cette deuxième erreur est donc corrigée : les centres d’action médico-sociale précoce ne sont pas soumis à l’obligation de signer un CPOM (CASF, art. L. 313-12-2, al. 1 modifié).

C. LES CSAPA ET LES CAARUD (ART. 38, I ET II)

Jusqu’à présent, la durée de la première autorisation des centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) et des centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (Caarud) était fixée à 3 ans, au lieu de 15 ans pour les autres établissements médico-sociaux. La loi du 10 août 2011 supprime cette mesure (CASF, art. L. 313-1, al. 2 supprimé). Pour les nouveaux CSAPA et Caarud, la durée de la première autorisation est donc désormais de 15 ans. Les autorisations de 3 ans déjà accordées à des structures et qui étaient en cours de validité au 11 août 2011 – date de publication de la loi – sont quant à elles automatiquement prolongées dans la limite de 15 ans (art. 38, II de la loi).

D. LES EHPAD ET LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ LIBÉRAUX (ART. 7)

Empêcher que les interventions des professionnels de santé libéraux dans les établissements de santé, sociaux ou médico-sociaux soient requalifiées en activités salariées et soumises aux cotisations sociales afférentes. C’est l’objectif de l’article 7 de la loi face aux pratiques d’un certain nombre d’Urssaf, explique la rapporteure Valérie Boyer. Un problème déjà soulevé lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. A l’époque, rappelle la députée, le gouvernement estimait qu’« une circulaire serait suffisante pour préciser aux Urssaf les conditions d’exercice des professionnels libéraux dans les structures tant sanitaires que sociales ». Mais ces instructions n’ont pas été données, déplore-t-elle (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 76). Le Parlement y a donc remédié en indiquant que les professionnels de santé qui exercent à titre libéral au sein d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) avec lequel ils ont conclu un contrat de coordination sont présumés ne pas être liés par un contrat de travail avec l’établissement (CASF, art. L. 314-12 al. 4 nouveau). Pour mémoire, la signature du contrat de coordination est obligatoire pour les médecins traitants et les masseurs-kinésithérapeutes depuis le 1er avril 2011 (5).

E. LES GROUPEMENTS DE COOPÉRATION SOCIALE ET MÉDICO-SOCIALE (ART. 34)

En alignant le régime juridique du groupement de coopération sociale ou médico-sociale (GCSMS) sur celui des groupements de coopération sanitaire (GCS), la loi « HPST » du 21 juillet 2009 et son ordonnance de coordination du 23 février 2010 ont complexifié les règles applicables tout en créant des ambigüités juridiques. La loi « Fourcade » revient sur ces mesures.

1. LE REFUS DE LA QUALITÉ D’ÉTABLISSEMENT

Depuis la loi « HPST », le groupement de coopération sanitaire peut être « de moyens » ou « d’établissements ». Dans le deuxième cas, il est érigé en établissement de santé avec les droits et obligations afférents. L’alignement du régime juridique des GCSMS sur celui des GCS a introduit une incertitude sur la transposition ou non, au secteur social et médico-social, de la distinction entre groupements « de moyens » et groupements « d’établissements ».

Pour lever cette incertitude, la loi du 10 août 2011 indique explicitement que le groupement de coopération sociale ou médico-sociale n’a pas la qualité d’établissement social ou médico-social (CASF, art. L. 312-7 modifié). Il s’agit d’éviter que les dispositions introduites par la loi « HPST », puis par son ordonnance de coordination, ne permettent aux GCSMS d’« acquérir la qualité d’établissement social ou médico-social en dehors du régime de l’autorisation », indique l’exposé des motifs de la loi.

2. LA DÉTERMINATION DU STATUT PUBLIC OU PRIVÉ

Les groupements de coopération sociale et médico-sociale obéissent aux mêmes règles que les groupements de coopération sanitaire « de moyens » pour la détermination de leur statut public ou privé. La loi « Fourcade » simplifie ces règles en revenant à celles qui étaient applicables avant la loi « HPST », à savoir :

 le GCS de moyens est une personne morale de droit public lorsqu’il est constitué exclusivement par des personnes de droit public ou par des personnes de droit public et des professionnels médicaux libéraux ;

 le GCS de moyens est au contraire une personne morale de droit privé lorsqu’il est constitué exclusivement par des personnes de droit privé.

La règle de détermination du statut public ou privé en fonction de la provenance des apports au groupement ou, s’il est constitué sans capital, en fonction des participations à ses charges de fonctionnement est donc supprimée. Les groupements mixtes retrouvent par ailleurs la possibilité de choisir librement le statut juridique public ou privé en l’inscrivant dans leur convention constitutive (code de la santé publique [CSP], art. L. 6133-3, I modifié).

F. LE BUDGET « FORMATION » DE LA CNSA (ART. 37)

La loi du 10 août 2011 vise à tirer les conséquences de la création des agences régionales de santé sur le processus de décision et de financement relatif aux projets financés par la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) au titre de la section IV de son budget. Pour mémoire, la section IV est consacrée à la promotion des actions innovantes, à la formation des aidants et des accueillants familiaux et à la professionnalisation des métiers de services.

1. LA DÉLÉGATION D’UNE PARTIE DES CRÉDITS AUX ARS

Avant la réorganisation des services déconcentrés de l’Etat, les projets financés par la section IV de la CNSA devaient être agréés par l’autorité compétente de l’Etat, c’est-à-dire par les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS) après avoir recueilli l’avis de la caisse. Or les agences régionales de santé qui se sont substituées aux DDASS sont des établissements publics administratifs qui ne peuvent valider des projets au nom de l’Etat, explique Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 169).

C’est pourquoi la loi « Fourcade » supprime cette mesure et prévoit en contrepartie que la CNSA peut déléguer une partie des crédits de la section IV aux ARS (CASF, art. L. 14-10-5, IV modifié). Cela permet « d’éviter que l’ensemble des dossiers, notamment ceux d’intérêt régional et infrarégional, ne soient traités par le niveau national ». Les agences, en tant qu’ordonnateurs secondaires de l’exécution des dépenses relatives à la section IV, « devront alors rendre compte annuellement de la conformité de ces dépenses aux objectifs assignés à la section IV » (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 169).

2. LA CRÉATION D’UNE SECTION UNIQUE

Jusqu’à présent, la section IV du budget de la CNSA était divisée en deux sous-sections, l’une pour les crédits consacrés au secteur des personnes âgées et l’autre pour ceux dédiés au secteur du handicap.

La caisse a rencontré des difficultés pour dépenser le budget de cette section qui représente un peu plus de 69 millions d’euros. En 2010, les réserves de la section IV s’élevaient à près de 124 millions d’euros, souligne Valérie Boyer. « En effet, explique-t-elle, il est impossible dans une convention de modernisation conclue avec un service d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) qui intervient auprès des deux publics, d’isoler ce que relève de la sous-section “personnes âgées” de la sous-section “personnes handicapées”. Or la CNSA [était] obligée de procéder à une telle répartition, sur une base statistique arbitraire qui n’a pas de sens budgétairement » (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 169). La loi « Fourcade » supprime donc la division en deux sous-sections et réunit les deux secteurs dans une section unique commune pour mutualiser les financements attribués aux mêmes types d’actions quel que soit le public concerné (CASF, art. L. 14-10-5, IV modifié). Ainsi, tout en simplifiant les procédures administratives de la caisse, cette mesure devrait permettre de limiter les réserves de la section IV.

G. LES SCHÉMAS RÉGIONAUX D’ORGANISATION SOCIALE ET MÉDICO-SOCIALE (ART. 40)

La loi « Fourcade » comble un oubli de la loi « HPST » en fixant les modalités de consultation sur les schémas régionaux d’organisation sociale et médico-sociale élaborés par le préfet de région et relatifs :

 aux centres d’accueil pour demandeurs d’asile ;

 aux services et personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs ;

 aux délégués aux prestations familiales.

Il est désormais prévu que ces schémas sont arrêtés après consultation des unions, fédérations et regroupements représentatifs des usagers et des gestionnaires de ces établissements et services dans des conditions qui seront définies par décret (CASF, art. L. 312-5 modifié). En effet, justifie Valérie Boyer, « les appels à projets devant découler des priorités établies dans les schémas, il est indispensable que les principaux acteurs du secteur soient directement associés à l’élaboration du schéma » (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, pages 176 et 177).

II. LES MESURES RELATIVES AU SECTEUR SANITAIRE

Dans le prolongement de la loi « HPST », la loi « Fourcade » comporte diverses mesures visant à permettre l’accès de tous à des soins de qualité.

Pour lutter contre les « déserts médicaux », elle encourage l’exercice professionnel regroupé, notamment en clarifiant le statut des maisons de santé.

Mais, dans le même temps, elle atténue la portée des mesures visant à améliorer la répartition géographique des professionnels. D’autres mesures portent sur les centres de santé, la planification sanitaire, les données de santé et les tarifs des actes médicaux.

A. LES MAISONS DE SANTÉ (ART. 2, I)

Créées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les maisons de santé « ont été conçues comme une réponse au manque d’attractivité de certains territoires pour les médecins libéraux et aux nouvelles aspirations des jeunes professionnels », rappelle Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 53).

Tout en précisant le statut de ces dispositifs, la loi « HPST » a restreint leur composition aux professionnels médicaux et aux auxiliaires médicaux dans l’objectif d’exclure les professionnels de santé dont tout ou partie de l’activité est commerciale. Afin de promouvoir les maisons de santé, la loi « Fourcade » renforce leur statut juridique en les dotant de la personnalité morale. Elle élargit en outre leur composition aux pharmaciens. Elle précise que les activités réalisées par les professionnels de la maison de santé doivent être assurées dans le cadre du projet de santé qu’ils élaborent et dans le respect d’un cahier des charges fixé par arrêté. Le projet de santé doit être compatible avec les orientations des schémas régionaux de mise en œuvre du projet régional de santé en matière de prévention, d’organisation de soins et d’organisation médico-sociale. Il doit être signé par chacun des professionnels de santé membre de la maison de santé. Le projet de santé peut également être signé par toute personne dont il prévoit explicitement la participation aux actions envisagées. Sans changement, il est transmis pour information au directeur général de l’ARS (CSP, art. L. 6323-3 modifié).

D’autres précisions portent sur les informations confiées par un patient aux professionnels de la maison de santé (voir page 50).

A noter : toujours pour lutter contre les « déserts médicaux », la loi permet aussi le regroupement des professionnels de santé au sein d’une société interprofessionnelle de soins ambulatoires lorsque le statut de la maison de santé n’est pas adapté.

B. LES CENTRES DE SANTÉ (ART. 15)

La loi « Fourcade » précise les pouvoirs du directeur général de l’ARS à l’égard des centres de santé.

En définissant les centres de santé comme des structures sanitaires de proximité dispensant principalement des soins de premier recours, la loi « HPST » a conforté ces structures. Un décret du 30 juillet 2010 a fixé leurs conditions techniques de fonctionnement et a défini les prérogatives de l’ARS (6). Ce texte a ainsi prévu que lorsque le directeur général de l’agence régionale de santé constate que les conditions de fonctionnement d’un centre de santé ne permettent pas d’assurer la qualité et la sécurité des soins, il le notifie par courrier à son gestionnaire et lui demande de faire connaître ses observations ainsi que les mesures correctrices adoptées ou envisagées. En l’absence de réponse ou en cas de réponse insuffisante dans ce délai, il enjoint au gestionnaire du centre de santé de prendre toutes dispositions nécessaires à la cessation des manquements dans un délai déterminé et en constate l’exécution. Ce texte, constate Valérie Boyer, ne donne « pas de moyens très efficaces en cas d’inertie persistante du centre » (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, pages 176 et 177).

La loi « Fourcade » confère donc, d’une part, une base légale à cette procédure et, d’autre part, donne des pouvoirs supplémentaires au directeur général de l’ARS. Elle renvoie pour cela à un décret le soin de fixer les conditions dans lesquelles, en cas de manquement compromettant la qualité et la sécurité des soins dans un centre de santé, le directeur général de l’agence régionale de santé peut (CSP, art. L. 6323-1, al. 9 à 12 nouveaux) :

 enjoindre au gestionnaire du centre d’y mettre fin dans un délai déterminé ;

 en cas d’urgence tenant à la sécurité des patients ou de non-respect de l’injonction, prononcer la suspension immédiate, totale ou partielle, de l’activité du centre, assortie d’une mise en demeure de prendre les mesures nécessaires ;

 maintenir cette suspension jusqu’à ce que ces mesures aient pris effet.

D’autres précisions portent sur les informations confiées par un patient à un professionnel du centre de santé (voir page 50).

C. LE PROJET RÉGIONAL DE SANTÉ

Plusieurs mesures visent à simplifier et à sécuriser la procédure d’élaboration du projet régional de santé (PRS), créé par la loi « HPST ».

1. LA PUBLICATION ÉLECTRONIQUE (ART. 36)

Le projet régional de santé doit dorénavant faire l’objet avant son adoption d’une publication sous forme électronique (CSP, art. L. 1434-3 modifié). Cette mesure offre une « large transparence » et favorise la concertation, relève Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 166).

2. LES CONSULTATIONS (ART. 36)

La loi « HPST » a prévu que le projet régional de santé est arrêté par le directeur général de l’ARS et qu’il doit faire l’objet d’un avis de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie, des collectivités territoriales et du préfet de région. Or cette mesure a pour effet de soumettre le document à toutes les communes de la région. « La réalisation de cette consultation pose des problèmes pratiques considérables qui résultent du nombre de collectivités à consulter (entre 1 000 et 3 000 pour la majorité des agences régionales de santé), du volume des documents concernés (plusieurs centaines de pages) et du calendrier contraint par l’objectif de publication du projet régional de santé avant fin 2011 », explique Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 166). Aussi la loi « Fourcade » prévoit-elle désormais que la conférence régionale de la santé et de l’autonomie, le préfet de région et les collectivités territoriales disposent de 2 mois, à compter de la publication de l’avis de consultation sur le projet régional de santé au recueil des actes administratifs de la préfecture de région, pour transmettre leur avis à l’agence régionale de santé (CSP, art. L. 1434-3 modifié).

3. LE RISQUE DE CONTENTIEUX

La loi entend réduire le risque contentieux qui résulte du fait que « l’illégalité pour vice de forme du PRS peut être invoquée par la voie de l’exception [7] à tout moment par un promoteur d’activité de santé ou médico-sociale soumise à une autorisation fondée sur le PRS » (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 166). Elle prévoit ainsi que l’illégalité pour vice de forme ou de procédure du projet régional de santé et de ses composantes ne peut être invoquée par voie d’exception après un délai de 6 mois à compter de la prise d’effet du document concerné (CSP, art. L. 1434-3-1 nouveau).

D. LES ANCIENS SCHÉMAS RÉGIONAUX D’ORGANISATION SANITAIRE (ART. 35, I)

Les anciens schémas régionaux d’organisation sanitaire, dits de troisième génération ou « SROS III », sont prorogés jusqu’à la publication des schémas régionaux d’organisation des soins instaurés par la loi « HPST ». Ces derniers, en tant que schémas de mise en œuvre des projets régionaux de santé sont dénommés « SROS-PRS ».

Les SROS III devaient être renouvelés, en fonction des échéances propres à chaque région, entre décembre 2010 et juillet 2011. La loi « HPST », qui les a supprimés, a prévu la publication des SROS-PRS pour la fin de l’année 2011. Or il n’était « pas envisageable en pratique que les ARS travaillent parallèlement à réexaminer en totalité les SROS III qui ont perdu leur base légale et à élaborer les SROS-PRS », explique Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3293, Boyer, avril 2011, page 163). La prorogation des SROS III permet donc d’éviter une période de vide juridique de plusieurs mois dans les outils de régulation à la disposition des ARS.

La loi « Fourcade » permet en outre au directeur général de l’ARS de réviser le SROS III. Dans ce cas, seul l’avis de la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie compétente pour le secteur sanitaire est requis, précise-t-elle.

E. LA TRANSMISSION D’INFORMATIONS

Plusieurs mesures de la loi du 10 août 2011 visent à organiser les transmissions entre les professionnels d’informations relatives aux patients ainsi qu’à améliorer l’accès de ces derniers à certaines informations, notamment aux tarifs pratiqués par les professionnels et les établissements de santé.

1. DANS LES MAISONS ET LES CENTRES DE SANTÉ (ART. 2, II)

La loi « Fourcade » aménage les règles relatives au secret médical en prévoyant que les informations concernant une personne prise en charge par un professionnel de santé au sein d’une maison ou d’un centre de santé sont réputées confiées par la personne aux autres professionnels de santé de la structure qui la prennent en charge sous deux réserves (CSP, art. L. 1110-4, al. 4 à 6 nouveaux) :

 le recueil du consentement exprès de la personne, par tout moyen, y compris sous forme dématérialisée, le consentement étant valable tant qu’il n’a pas été retiré selon les mêmes formes ;

 de l’adhésion des professionnels de santé concernés au projet de santé de la structure.

La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé (CSP, art. L. 1110-4, al . 7 nouveau).

2. LES DISPOSITIFS MÉDICAUX (ART. 13)

La loi « HPST » avait renforcé l’information des patients lorsque l’acte délivré par un professionnel de santé libéral inclut la fourniture d’un dispositif médical. Ainsi, pour mémoire, l’information délivrée gratuitement au patient devait comprendre, de manière dissociée, le prix d’achat de chaque élément de l’appareillage proposé, le prix de toutes les prestations associées, ainsi qu’une copie de la déclaration de fabrication du dispositif médical. La loi « Fourcade » fait machine arrière. « Jugée diffamante et délicate à mettre en œuvre », la mesure relative au prix d’achat « risque de ne jamais être appliquée par les professionnels », explique Valérie Boyer (Rap. A.N. n° 3623, Boyer, juillet 2011, page 33). Par conséquent, l’information délivrée au patient doit désormais simplement dissocier le prix de vente de l’appareil proposé (au lieu du prix d’achat) du montant des prestations de soins assurées par le praticien. Elle devra en outre être conforme à un devis type défini conjointement par l’assurance maladie et les organisations représentatives des professionnels de santé concernés avant le 1er janvier 2012. A défaut d’accord dans ce délai, le devis type sera fixé par décret. La loi précise également que l’information écrite délivrée au patient doit mentionner le lieu de fabrication du dispositif médical et que le professionnel de santé doit remettre au patient les documents garantissant la traçabilité et la sécurité des matériaux utilisés. Ces obligations sont étendues aux professionnels de santé exerçant en centres de santé (CSP, art. L. 1111-3, al. 1 modifié).

3. LE DOSSIER MÉDICAL SUR CLÉ USB (ART. 30)

La loi « Fourcade » prévoit l’expérimentation d’un dossier médical implanté sur un support portable numérique sécurité (type clé USB) pour les assurés sociaux atteints d’une affection de longue durée. Déjà votée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 puis dans celui de la loi « HPST », cette mesure avait été annulée à deux reprises par le Conseil constitutionnel pour des raisons de pure forme. Une proposition de loi prévoyant cette expérimentation avait par ailleurs été adoptée en premier lecture à l’Assemblée nationale en mars 2010. La loi « Fourcade » reprend donc l’idée et indique que l’expérimentation doit démarrer avant le 31 décembre 2011 et se dérouler jusqu’au 31 décembre 2013. Les modalités d’application de l’expérimentation, notamment les conditions garantissant la sécurisation des informations recueillies et la confidentialité des données, doivent encore être fixées par un décret pris après avis de la commission nationale de l’informatique et des libertés. La liste des régions où aura lieu l’expérimentation sera fixée par l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (CSP, art. L. 1111-20 nouveau).

4. L’INFORMATION SUR LES TARIFS (ART. 13 et 22)

Posée par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, l’obligation pour les professionnels de santé libéraux d’informer le patient avant l’exécution d’un acte sur son coût et les conditions de son remboursement par les régimes obligatoires de l’assurance maladie est étendue aux professionnels de santé exerçant en centres de santé (CSP, art. L. 1111-3, al. 1 modifié).

Par ailleurs, la loi « Fourcade » prévoit que les sites Internet des établissements de santé doivent comporter des informations sur les tarifs et les honoraires des professionnels de santé qui y exercent. Le site Internet de la caisse nationale de l’assurance maladie peut également publier les mêmes informations (CSP, art. L. 1111-3, al . 4 nouveau).

5. LE CONSENTEMENT DES PATIENTS POUR LE TRANSFERT DE LEURS DONNÉES DE SANTÉ (ART. 29)

Par manque de place, certains établissements de santé ont des difficultés à conserver sur support papier les données de santé à caractère personnel de leurs patients. La loi « HPST » les a donc autorisés à confier l’hébergement de ces dossiers à des tiers agréés sous réserve du consentement exprès de la personne concernée. La loi « Fourcade » dispense les établissements de santé de recueillir ce consentement pour les données de santé à caractère personnel collectées avant le 10 août 2011, date de sa promulgation.

F. LA LUTTE CONTRE LES DÉSERTS MÉDICAUX

Plusieurs mesures de la loi « HPST » visaient à lutter contre les déserts médicaux pour améliorer l’accès aux soins. Vigoureusement contestées par les médecins, elles ont été assouplies par la loi « Fourcade ».

1. LE CONTRAT SANTÉ SOLIDARITÉ (ART. 3)

La loi « HPST » a prévu que, à l’échéance d’un délai de 3 ans à compter de l’entrée en vigueur du schéma régional d’organisation des soins, le directeur général de l’agence régionale de santé évalue la satisfaction des besoins en implantations pour l’exercice des soins de premier recours. Cette évaluation doit comporter un bilan de l’application des mesures destinées à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé, ainsi que des maisons, des pôles et des centres de santé. Si cette évaluation fait apparaître que les besoins en implantations ne sont pas satisfaits et que, de ce fait, l’offre de soins de premier recours ne suffit pas à répondre aux besoins de santé de la population dans certains territoires de santé, le directeur général de l’ARS peut proposer aux médecins exerçant dans les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins médicaux est particulièrement élevé d’adhérer à un contrat santé solidarité par lequel ils s’engagent à contribuer à répondre aux besoins de santé de la population des zones où les besoins en implantations ne sont pas satisfaits. La loi « HPST » avait donné un caractère obligatoire à ce contrat en prévoyant que les médecins qui refusent de le signer ou qui ne respectent pas les obligations qu’il comporte devaient acquitter d’une contribution forfaitaire annuelle, au plus égale au plafond mensuel de la sécurité sociale (2 941 € en 2011). Avant même son entrée en vigueur – qui nécessite la parution d’un décret –, le contrat santé solidarité perd son caractère obligatoire puisque la loi « Fourcade » supprime la sanction et renvoie à la négociation conventionnelle entre l’assurance maladie et les syndicats de médecins le soin d’élaborer un contrat type (CSP, art. L. 1434-8 modifié).

2. LA LIBERTÉ D’INSTALLATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ (ART. 4, I)

La loi du 10 août 2011 renforce le principe de la liberté d’installation des professionnels de santé au regard du contenu du schémas régional d’organisation des soins (SROS). En 2009, la loi « HPST » avait prévu que ce schéma a pour objet de prévoir et de susciter les évolutions nécessaires de l’offre de soins afin de répondre aux besoins de santé de la population et aux exigences d’efficacité et d’accessibilité géographique. A ce titre, le SROS doit contribuer à une meilleure répartition géographique des professionnels et des services de santé. Il doit aussi préciser les adaptations et les complémentarités de l’offre de soins, ainsi que les coopérations, notamment entre les établissements de santé, les communautés hospitalières de territoire, les établissements et services médico-sociaux, les centres de santé, les structures et professionnels de santé libéraux. Sans modifier cette mission, la loi « Fourcade » ajoute que cela doit se faire « dans le respect du principe de liberté d’installation des professionnels de santé ». Elle précise en outre que les indications du SROS sur les besoins en implantations pour l’exercice des soins ne sont pas opposables aux professionnels de santé libéraux (CSP, art. L. 1434-7 modifié).

3. LA DÉFINITION DES ZONES SOUS-DOTÉES (ART. 4, II)

La loi prévoit que le directeur général de l’ARS n’est pas obligé d’attendre la publication du premier SROS pour arrêter les zones de mise en œuvre des mesures destinées à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé et des services de santé (maisons, pôles et centres de santé).

CONVERSIONS DE LITS DU SANITAIRE VERS LE MÉDICO-SOCIAL (ART. 17)

Le gouvernement doit remettre chaque année au Parlement un rapport portant sur les efforts engagés par les agences régionales de santé en matière de recomposition de l’offre hospitalière. Ce rapport devra notamment rendre compte pour chaque région des coopérations qui ont pu être mises en œuvre, des regroupements réalisés entre services ou entre établissements et des reconversions de lits vers le secteur médico-social. Rappelons qu’un récent rapport de l’inspection générale des affaires sociales a fait plusieurs propositions pour faciliter les conversions des structures hospitalières en structures médico-sociales (8).

Notes

(1) Voir ASH n° 2685 du 3-12-10, p. 10.

(2) Voir ASH n° 2649 du 5-03-10, p. 10.

(3) Voir ASH n° 2632 du 13-11-09, p. 39.

(4) Voir ASH n° 2674 du 17-09-11, p. 43.

(5) Voir ASH n° 2703 du 1-04-11, p. 7.

(6) Décret n° 2010-895, J.O. du 31-07-10 – Voir ASH n° 2671 du 27-08-10, p. 21.

(7) Moyen de défense par lequel une partie allègue l’illégalité de l’acte administratif qui lui est opposé.

(8) Voir ASH n° 2722 du 2-09-11, p. 13.

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