En pionnier, le Point Rencontre de Bordeaux accueille depuis 1986 les enfants de couples séparés et en conflit pour qu’ils puissent rencontrer le parent avec lequel ils ne vivent pas. Répondant à un vrai besoin, la démarche bordelaise a largement essaimé : un recensement datant de 2008 fait état de 140 espaces de ce type, qui bénéficient chaque année à environ 20 000 familles, soit plus de 25 000 enfants. Pris dans les discours d’exclusion mutuelle de leurs parents, qui résonnent en eux comme autant d’arrache-cœur, ces enfants en souffrance ont besoin de « passeurs » pour « retrouver leur chemin par des sentiers effacés ou interdits », explique Madie Lajus, thérapeute de couple, l’une des initiatrices du lieu. De fait, au fil de ses années de pratique et de théorisation restituées ici, l’équipe de la structure bordelaise a dégagé un concept-clé, celui du bannissement de l’autre parent. 80 % des situations accueillies concernant des rencontres entre des enfants et leur père, c’est donc essentiellement l’anathème ravageur jeté par les mères sur leur ex-partenaire dont il est question, souligne le psychanalyste Serge Bédère, autre membre fondateur de Point Rencontre. A l’intérieur de celui-ci, scène de fréquents psychodrames, « chaque intervenant se présente comme un élément d’étayage et doit être prêt à se laisser utiliser comme un objet apaisant ou […] contenant pour tout ce qui semble trop dur à supporter pour les parents et les enfants visiteurs », précise Duarte Rolo, psychologue clinicien. La portée de ce travail invisible ? « Pour la plupart des enfants concernés, nous avons permis de restaurer un lien familial », affirme Madie Lajus. Un ouvrage éclairant, à l’heure où certains réclament un meilleur équilibre entre les parents en matière de droit de garde.
Rencontrer l’autre parent. Les droits de visite en souffrance – Serge Bédère, Madie Lajus, Benoît Sourou et l’équipe de Point Rencontre – Ed. érès – 23 €