C’est un bilan décevant des contrats aidés en matière d’emploi que dresse la Cour des comptes dans un rapport récemment publié (1). Constatant depuis une dizaine d’années le déclin de ce dispositif central de la politique de l’emploi – qui reste toutefois plus utilisé en France qu’à l’étranger –, l’institution pointe l’impact relatif des contrats aidés sur le retour à l’emploi des personnes qui en sont bénéficiaires et propose des pistes d’amélioration du dispositif.
« En termes d’efficacité sur l’emploi, les résultats des contrats aidés sont décevants », constatent les magistrats financiers. En période de crise économique, les pouvoirs publics y recourent le plus souvent « avec un objectif à court terme » : « lutter contre le chômage en période de basse conjoncture », au détriment de leur finalité d’insertion professionnelle et sociale en faveur des personnes les plus éloignées de l’emploi. Selon la Cour, « les contrats aidés du secteur non marchand en particulier permettent […] de retirer temporairement des effectifs non négligeables des listes des demandeurs d’emploi ». Ainsi, poursuit-elle, « priorité est donnée au nombre de contrats, souvent de courte durée, plutôt qu’au ciblage sur les personnes qui en auraient le plus besoin ». Résultats : une diminution, depuis 2009, de la proportion des entrées en contrats aidés des bénéficiaires de minima sociaux et, concernant l’impact de ces contrats sur le retour à l’emploi, « un effet positif pour les contrats aidés du secteur marchand – qui, selon le rapport, préparent mieux à l’insertion professionnelle à moyen terme – et un effet nul pour les contrats aidés du secteur non marchand ». La Cour préconise donc de « cibler les contrats aidés sur les personnes les plus éloignées de l’emploi et les plus vulnérables (titulaires de minima sociaux) ». Pour cela, elle propose notamment de renforcer les relations Etats-départements « afin d’assurer une coordination plus étroite des actions d’insertion menées à travers les contrats aidés pour les bénéficiaires du RSA [revenu de solidarité active] ». Et encourage également à « veiller à la prescription de contrats de durée suffisante pour permettre le développement d’actions visant à une insertion durable ».
« Les objectifs de qualité, en termes d’accompagnement et d’insertion professionnelle des bénéficiaires [du contrat unique d’insertion], restent loin d’être atteints », déplore la Cour. Elle recommande donc de « fixer pour les prescripteurs des objectifs en matière d’actions d’accompagnement et d’en assurer le suivi », « d’identifier au sein des dépenses de contrats aidés une enveloppe dédiée à l’accompagnement et la formation, lorsque celle-ci ne s’inscrit pas dans les dispositifs de droit commun », ou encore de « veiller à la mobilisation des organismes paritaires collecteurs agrées et des organismes de formation professionnelle du secteur public en matière de formation des bénéficiaires de contrats aidés ». Par ailleurs, la Cour suggère « l’inscription de tous les bénéficiaires de contrats aidés en catégorie E de la liste des demandeurs d’emploi afin qu’ils puissent être suivis par les conseillers de Pôle emploi ». Or, fin 2010, moins d’un tiers des personnes en contrats aidés du secteur marchand, et moins de la moitié de celles en contrats aidés non marchand, étaient effectivement inscrites à Pôle emploi en catégorie E « contrats aidés ». Un accompagnement et un suivi insuffisants, donc, des bénéficiaires de ce type de contrats dont pourraient se saisir l’Etat, l’Unedic et Pôle emploi dans le cadre de leur nouvelle convention tripartite actuellement en discussion.
La Cour des comptes dénonce également « la sous-estimation récurrente des enveloppes [de financement des contrats aidés] en lois de finances initiales ». Elle constate en effet « une gestion budgétaire par à-coups » du dispositif : les objectifs quantitatifs sont fréquemment réévalués. Trop tardivement, d’ailleurs, constatent les sages de la rue Cambon, pour qui « les contrats aidés n’ont pas joué leur rôle contracyclique de manière satisfaisante, leur mobilisation s’étant révélée décalée par rapport à la conjoncture ».
Néanmoins, s’agissant de la gestion du dispositif, le rapport note que la création du contrat unique d’insertion par la loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion (2) a apporté des simplifications utiles. Même si ses conditions de mise en œuvre doivent encore être stabilisées et si les pouvoirs publics doivent améliorer la gestion budgétaire et le pilotage du dispositif.
Un constat d’ensemble plutôt « sévère » donc, qui ne doit toutefois pas faire oublier que, outre l’impact du dispositif sur l’insertion dans l’emploi, les contrats aidés poursuivent également des objectifs « d’inclusion sociale et de soutien au pouvoir d’achat qui ne doivent pas être négligés », souligne le rapport.
(1) Les contrats aidés dans la politique de l’emploi – Octobre 2011 – Disp. sur