Si la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité reste encore, à ce jour, un texte très controversé, elle le doit essentiellement à son volet visant, par une réforme des procédures et du contentieux de l’éloignement des clandestins, à améliorer l’efficacité de la lutte contre l’immigration irrégulière. Mais il n’y a pas qu’en matière d’éloignement que la loi a apporté de notables modifications au droit français des étrangers (1). Tout un pan du texte est ainsi consacré à la nationalité et à l’intégration.
Dans cette partie, le législateur a, en fait, voulu tenir compte de certaines des conclusions du séminaire gouvernemental sur l’identité nationale organisé en février 2010, appelant à renforcer les politiques d’intégration des étrangers entrant et vivant en France (2).
Au rayon des nouveautés, notamment : une naturalisation à la fois plus rapide pour les étrangers ayant un parcours exceptionnel d’intégration et plus exigeante quant à l’adhésion aux principes et aux valeurs de la République, la création d’une charte des droits et devoirs du citoyen français remise à chaque étranger naturalisé français ou bien encore une plus grande prise en compte de l’intégration de l’étranger dans les décisions relatives à son séjour.
Dans un tout autre domaine, la loi comporte également quatre dispositions relatives à l’asile. Trois d’entre elles concernent le fonctionnement de la Cour nationale du droit d’asile. La dernière précise la notion de « demande d’asile reposant sur une fraude délibérée ».
Pour bien comprendre les modifications apportées par la loi du 16 juin 2011 au droit de la nationalité, il convient de rappeler qu’il existe plusieurs voies d’acquisition à la nationalité française.
La première est la naissance. La nationalité française est ainsi attribuée aux enfants nés en France dont au moins un des parents est français ou né en France ou dont les parents sont inconnus ou apatrides, ainsi qu’à ceux nés à l’étranger dont l’un des parents est français. Les enfants nés en France de parents étrangers peuvent acquérir la nationalité française à leur majorité si, à cette date, ils résident en France et justifient y avoir résidé habituellement de façon continue ou discontinue pendant 5 ans depuis l’âge de 11 ans.
Le mariage avec un ressortissant français est un autre mode d’acquisition de la nationalité française. Concrètement, 4 ans après son union – 5 ans dans certains cas –, le conjoint étranger peut obtenir la nationalité française par déclaration souscrite auprès du juge d’instance ou du consul de France, qui la transmet pour enregistrement aux services compétents. L’intéressé doit justifier d’une communauté de vie affective et matérielle, ainsi que d’une connaissance suffisante de la langue française. Le gouvernement peut s’opposer, par décret, à cette acquisition de nationalité pour motif d’indignité ou de défaut d’assimilation à la communauté française.
Enfin, la dernière voie d’acquisition de la nationalité française est la naturalisation, qui s’effectue sur décision de l’autorité publique. Elle concerne les étrangers majeurs possédant un titre de séjour régulier. Plusieurs conditions sont posées à l’aboutissement de cette demande : résider en France de manière habituelle et continue avec sa famille depuis 5 ans – condition dite « de stage »–, justifier de son assimilation à la société française, avoir satisfait à des exigences de loyauté et de probité et ne pas avoir été condamné pour un crime ou un délit portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, pour terrorisme ou à une peine égale ou supérieure à 6 mois fermes d’emprisonnement.
Les candidats à la naturalisation et les conjoints de Français désirant acquérir la nationalité française sont au premier rang des catégories concernées par les nouveautés introduites par la loi du 16 juin 2011.
Entre autres conditions à respecter, le candidat à une naturalisation doit justifier de son assimilation à la communauté française. L’autorité administrative chargée de s’assurer du respect de cette condition dispose à cet égard d’un large pouvoir pour apprécier l’opportunité d’accorder ou non la nationalité française à l’intéressé.
Auparavant, le code civil indiquait simplement, à titre indicatif, que l’ assimilation de l’étranger s’apprécie « notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française et des droits et devoirs conférés par la nationalité française », sans plus de précisions sur les modalités d’évaluation du niveau de maîtrise du français. Souhaitant marquer plus nettement que l’assimilation d’un étranger passe par son adhésion aux valeurs nationales, le législateur a complété la liste des éléments pris en compte par l’autorité administrative et encadré leur évaluation.
Selon la loi du 16 juin 2011, la condition d’assimilation s’apprécie ainsi notamment par une connaissance suffisante par l’intéressé, selon sa condition, non seulement de la langue mais aussi de l’histoire, de la culture et de la société françaises. Le législateur a renvoyé à un décret le soin de déterminer le niveau et les modalités d’évaluation de cette connaissance (code civil [C. civ.], art. 21-24 modifié). C’est chose faite avec la publication au Journal officiel du décret n° 2011-1265 du 11 octobre 2011 – qui modifie le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 –, complété par un arrêté. Deux textes qui entreront en vigueur le 1er janvier 2012.
A noter : les demandes de naturalisation déposées avant le 1er janvier 2012 restent régies par les dispositions actuellement applicables.
A compter du 1er janvier 2012, tout postulant à la nationalité française par naturalisation doit justifier d’une connaissance de la langue française caractérisée par la compréhension des points essentiels du langage nécessaire à la gestion de la vie quotidienne et aux situations de la vie courante ainsi que par la capacité à émettre un discours simple et cohérent sur des sujets familiers dans ses domaines d’intérêt. Son niveau est celui défini par le niveau B1, rubriques « écouter », « prendre part à une conversation » et « s’exprimer oralement en continu », du cadre européen commun de référence pour les langues établi par le Conseil de l’Europe (voir encadré, page 38) (décret n° 93-1362, art. 37 modifié).
Les candidats à la nationalité doivent prouver qu’ils ont le niveau de français requis. Actuellement, cela se fait au cours d’un entretien individuel mené par un agent de la préfecture ou de l’autorité consulaire s’il vit à l’étranger. A partir du 1er janvier 2012, ils devront produire un diplôme justifiant de ce niveau de langue (décret n° 93-1362, art. 37 modifié). Les diplômes correspondant au niveau de langue requis sont les suivants (arrêté du 11 octobre) :
les diplômes délivrés par une autorité française, en France ou à l’étranger, sanctionnant un niveau au moins égal au niveau V bis de la nomenclature nationale des niveaux de formation (3) ;
les diplômes attestant d’un niveau de connaissance du français au moins équivalent au niveau B1 du cadre européen commun de référence pour les langues.
A défaut de pouvoir présenter l’un de ces diplômes, les postulants à la nationalité française doivent fournir une attestation délivrée par l’un des organismes reconnus par l’Etat comme aptes à assurer une formation « français langue d’intégration » (décret n° 93-1362, art. 37 modifié). Ces attestations, présentées sous la forme de document sécurisé, sont celles (arrêté du 11 octobre) :
délivrées à l’issue d’un cycle de formation par un organisme titulaire du label qualité « Français langue d’intégration » (voir encadré, page 40) ;
ou qui valident la réussite à l’un des tests délivrés par un organisme certificateur, dès lors qu’elles constatent le niveau B1, rubriques « écouter », « prendre part à une conversation » et « s’exprimer oralement en continu » du cadre européen commun de référence pour les langues publié par le Conseil de l’Europe.
Dans le second cas, les tests visés sont les suivants (arrêté du 11 octobre 2011) :
test de connaissance du français (TCF), du Centre international d’études pédagogiques ;
test d’évaluation de français (TEF), de la chambre de commerce et d’industrie de Paris ;
Business Language Testing Service français (BULATS), de l’université de Cambridge ;
test de français international (TFI), d’Education Testing Service (ETS Global).
Sont dispensées de la production d’un diplôme ou d’une attestation les personnes qui, en raison de leur âge, d’un état de santé déficient chronique ou d’un handicap, ne sont pas en mesure d’accomplir les démarches nécessaires à la production de ce document (décret n° 93-1362, art. 37-1 nouveau et 41 modifié). Leur incapacité à effectuer ces démarches est constatée lors de l’entretien individuel que tout postulant à la nationalité française par naturalisation doit avoir avec un agent de la préfecture ou de l’autorité consulaire (décret n° 93-1362, art. 41 modifié).
Sans changement, la condition d’assimilation s’apprécie également au regard de la connaissance de l’intéressé des droits et devoirs conférés par la nationalité française mais aussi – nouveauté introduite par la loi du 16 juin 2011 –, de son « adhésion aux principes et aux valeurs essentiels de la République » (C. civ., art. 21-24 modifié).
Dans une circulaire du 24 août 2011, le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, livre quelques exemples de situations pouvant fonder une décision d’irrecevabilité pour défaut d’assimilation : une pratique radicale de la religion ou un mode de vie non conforme aux us et coutumes tel que le confinement au foyer, la limitation des relations sociales avec des personnes de l’autre sexe, une attitude intolérante ou discriminatoire fondée sur des critères de sexe, de race, de religion ou de nationalité tels que le dénigrement de certaines communautés ou l’appartenance à des mouvements radicaux prônant l’action violente.
Pour mémoire, l’acquisition de la nationalité française par l’effet du mariage se distingue de la naturalisation en ce que le pouvoir d’appréciation de l’administration est plus limité : la nationalité s’acquiert dans ce cas par déclaration, à la condition que, à la date de cette déclaration, la communauté de vie n’ait pas cessé entre les époux, que le conjoint français n’ait pas lui-même perdu dans l’intervalle sa nationalité, et que le mariage remonte au moins à 4 ans. Un délai porté à 5 ans lorsque l’étranger, au moment de la déclaration, soit ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue et régulière pendant au moins 3 ans en France à compter du mariage, soit n’est pas en mesure d’apporter la preuve que son conjoint français a été inscrit pendant la durée de leur communauté de vie à l’étranger au registre des Français établis hors de France.
Comme dans le cadre de la naturalisation, le conjoint étranger doit aussi justifier d’une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française, connaissance que la loi du 16 juin 2011 a, là aussi, encadré plus fortement. En revanche, le candidat à la nationalité par le mariage n’a pas à satisfaire à la même obligation d’assimilation à la communauté française que le candidat à la naturalisation.
Toutefois, dans un délai de 2 ans après la réception de la déclaration, le gouvernement peut s’opposer à l’acquisition de la nationalité française pour indignité ou défaut d’assimilation. Deux notions que le ministère de l’Intérieur commente dans sa circulaire du 24 août 2011.
Comme pour les candidats à une naturalisation, il est dorénavant prévu que le niveau et les modalités de l’évaluation de la connaissance linguistique des conjoints de Français désirant acquérir la nationalité française sont fixées par décret (C. civ., art. 21-2 modifié). Ce qui a été fait par le décret n° 2011-1265 et l’arrêté du 11 octobre 2011, qui prévoient exactement les mêmes règles que pour les candidats à la nationalité par naturalisation, à savoir : justifier, par un diplôme ou une attestation spécifique le niveau B1, rubriques « écouter », « prendre part à une conversation » et « s’exprimer oralement en continu » du cadre européen commun de référence pour les langues du Conseil de l’Europe (décret du 30 décembre 1993, art. 14 modifié et 14-1 nouveau). Règles qui s’appliqueront également à partir du 1er janvier 2012.
Là aussi, donc, le niveau de langue n’est plus évalué au cours d’un entretien individuel avec un agent de la préfecture. Toutefois, les personnes qui, en raison de leur âge, d’un état de santé déficient chronique ou d’un handicap ne sont pas en mesure d’accomplir les démarches nécessaires à la production du diplôme ou de l’attestation requis feront l’objet d’un entretien individuel destiné à s’assurer qu’elles maîtrisent un niveau de langue correspondant au niveau exigé (décret du 30 décembre 1993, art. 15 modifié).
A noter : les déclarations de nationalité par le mariage souscrites avant le 1er janvier 2012 restent régies par les anciennes dispositions.
Dans un délai de 2 ans après la réception de la déclaration, le gouvernement peut s’opposer, par décret en Conseil d’Etat, à l’acquisition de la nationalité française pour indignité ou défaut d’assimilation.
Dans une circulaire adressée le 24 août aux préfets, le ministère de l’Intérieur apporte des précisions sur ces deux notions. Ainsi, la première s’apprécie de plusieurs façons. « Elle peut être constatée par la commission de faits répréhensibles avérés, […] en France ou dans un pays étranger, examinés en fonction de leur ancienneté, de leur répétition et de leur gravité », explique Claude Guéant, ajoutant qu’« elle peut tenir compte du loyalisme du déclarant à l’égard des institutions publiques, de l’administration fiscale ou encore des organismes sociaux ». Et le ministre de citer des cas d’indignité reconnus par le Conseil d’Etat : perception frauduleuse pendant plusieurs années de prestations de la caisse d’allocations familiales, perception indue du revenu de solidarité active, exercice d’un travail dissimulé, aide à l’entrée et à la circulation ou au séjour irrégulier en France, etc. Claude Guéant estime que les « comportements prosélytes contraires aux valeurs républicaines, par exemple le militantisme actif au sein de mouvements ou d’associations considérés comme extrémistes ou radicaux » entrent également dans ce champ « dès lors qu’ils encouragent la propagation de thèses contraires ou hostiles aux valeurs essentielles de la communauté française ».
Le ministre apporte par ailleurs des précisions sur sa vision de l’assimilation à la communauté française (autre que linguistique), laquelle suppose « une adhésion aux règles de fonctionnement et aux valeurs de tolérance, de laïcité, de liberté et d’égalité de la société française ». Il rappelle au passage que les faits expressément visés par le code civil sont la condamnation au titre de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente sur un mineur de 15 ans et la situation effective de polygamie du conjoint étranger. « Le défaut d’assimilation est ainsi constaté lorsque le déclarant se trouve formellement dans les liens de plusieurs unions matrimoniales ou, précise-t-il, dans une situation de fait assimilable à la polygamie, déterminée par la présence, dans le même espace de proximité, de l’épouse et de la concubine. »
Ces situations ne sont toutefois pas les seules à permettre une opposition pour défaut d’assimilation. Claude Guéant multiplie, à cet égard, les exemples. L’adoption au quotidien d’attitudes discriminatoires vis-à-vis des femmes, telles que le refus de leur serrer la main, révèle ainsi un défaut d’assimilation. « Il en va de même de l’autorité du postulant à la nationalité à l’égard de son épouse, de ses filles ou de ses sœurs marquées par exemple par une interdiction de participer à toute vie sociale, le confinement au domicile, le mariage forcé, l’interdiction de poursuivre des études ou de suivre une formation ou encore l’interdiction de signer un contrat d’accueil et d’intégration. »
Enfin, s’attardant plus spécifiquement sur la question du port du voile, le ministre précise que la stricte observance d’une religion et la manifestation d’un attachement aux principes de cette religion par le port d’un insigne ou d’un vêtement traditionnel ne sont pas suffisantes pour constituer le défaut d’assimilation. Toutefois, une opposition peut être envisagée « si le dossier fait apparaître que cet aspect du comportement s’inscrit dans un mode de vie nettement et objectivement incompatible avec les valeurs essentielles de la République française » (circulaire du 24 août 2011).
L’adhésion aux principes et valeurs essentiels de la République fait désormais partie des éléments pris en compte par l’administration pour s’assurer du respect par le candidat à une naturalisation de la condition d’assimilation (voir page 38). Conformément à cet ajout, la loi du 16 juin 2011 a prévu que, à l’issue de l’entretien individuel de contrôle de l’assimilation, l’intéressé signe une charte des droits et devoirs du citoyen français. Ce texte, qui doit encore être « approuvé » par décret, rappellera les principes, valeurs et symboles essentiels de la République française (C. civ., art. 21-24 modifié).
Plus globalement, la loi organise la remise de cette charte à tous les étrangers ayant acquis la nationalité française lors de la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française (C. civ., art. 21-28 modifié). Pour mémoire, cette manifestation officielle et symbolique est organisée par les préfets pour l’ensemble des personnes acquérant la nationalité française (décret, déclaration ou de plein droit).
A noter : la charte sera également remise à tous les jeunes Français, au moment où ils participent à la journée défense et citoyenneté (code du service national, art. L. 114-3 modifié).
La naturalisation est aujourd’hui, pour les étrangers, le principal mode d’acquisition de la nationalité française. Elle ne constitue pas pour l’intéressé un droit à acquérir cette nationalité de manière automatique ou par déclaration. Il s’agit d’une décision discrétionnaire de l’autorité publique, qui apprécie l’opportunité d’octroyer la nationalité à celui qui en fait la demande. Elle constitue ainsi pour le gouvernement « l’un des principaux leviers qui lui permettent de définir une politique d’octroi de la nationalité française répondant aux besoins de la société française ou récompensant les mérites particuliers des étrangers qui sollicitent la naturalisation », a expliqué le rapporteur (UMP) de la loi au Sénat, François-Noël Buffet, au cours des débats (Rap. Sén. n° 239, tome 1, Buffet, janvier 2011, page 47).
Ainsi, l’autorité administrative a la possibilité de faire bénéficier certains candidats d’une réduction de la durée de condition de stage, voire de les en dispenser. Etant rappelé que la condition de stage est en principe remplie lorsque le candidat à la nationalité a résidé en France de manière habituelle et continue avec sa famille depuis 5 ans.
C’est ainsi que peuvent être naturalisés sans condition de « stage » sur le territoire français les étrangers qui ont effectivement accompli des services militaires dans une unité de l’armée française ou qui, en temps de guerre, ont contracté un engagement volontaire dans les armées françaises ou alliées, ceux qui ont rendu des services exceptionnels à la France ou dont la naturalisation présente un intérêt exceptionnel, ceux qui ont obtenu le statut de réfugié auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou bien encore les francophones.
Par ailleurs, ne sont assujettis qu’à une exigence de durée préalable de stage de 2 ans seulement (au lieu de 5) les étrangers ayant accompli avec succès 2 années d’études supérieures en vue d’acquérir un diplôme délivré par une université ou un établissement d’enseignement supérieur français, ainsi que ceux qui ont rendu ou peuvent rendre par leurs capacités et talents des services importants à la France.
Nouveauté introduite par loi du 16 juin 2011 : l’exigence de durée préalable de stage est également de 2 ans seulement pour les étrangers candidats à une naturalisation qui présentent un « parcours exceptionnel d’intégration », apprécié au regard des activités menées ou des actions accomplies dans les domaines civique, scientifique, économique, culturel ou sportif (C. civ., art. 21-18 3° nouveau).
Le gouvernement peut s’opposer, par décret, à l’acquisition de la nationalité française par le mariage pour indignité ou défaut d’assimilation autre que linguistique (voir page 40). Il doit le faire dans les 2 ans à compter de la délivrance, par l’autorité chargée d’enregistrer la déclaration de nationalité (4), du récépissé constatant la remise de toutes les pièces nécessaires à la preuve de la recevabilité de la déclaration (ou du jugement admettant la régularité de la déclaration si l’enregistrement a été refusé). Or, avant la loi du 16 juin 2011, si l’autorité chargée d’enregistrer la déclaration constatait que l’intéressé ne satisfaisait pas aux conditions légales requises, elle avait 1 an à compter de la remise du récépissé à l’intéressé pour refuser l’enregistrement. De ce fait, a expliqué François-Noël Buffet au cours des débats parlementaires, une procédure d’opposition était susceptible d’être engagée par le gouvernement plus de 1 an après la délivrance du récépissé alors même que l’autorité d’enregistrement n’avait plus la possibilité de refuser l’enregistrement. Et ce, quand bien même elle aurait été préalablement alertée par le gouvernement qu’une opposition était formée. « L’inconvénient immédiat d’une telle situation [était] l’acquisition de la nationalité française par l’intéressé, alors qu’une procédure d’opposition était engagée, au détriment de la sécurité juridique » (Rap. Sén. n° 239, tome 1, Buffet, janvier 2011, page 67). La loi du 16 juin 2011 apporte donc une solution à cette difficulté en prévoyant que, par exception, lorsqu’une procédure d’opposition est engagée, le délai de refus d’enregistrement est porté de 1 à 2 ans (C. civ., art. 26-3 modifié).
À SUIVRE…
DANS CE NUMÉRO
I. Les dispositions relatives à l’acquisition de la nationalité
A. Le renforcement des exigences relatives à l’assimilation
B. La signature d’une charte imposée aux candidats à une naturalisation
C. Une naturalisation plus rapide en cas de « parcours exceptionnel d’intégration »
D. Un cas d’extension du délai d’enregistrement des déclarations de nationalité pour mariage
DANS UN PROCHAIN NUMÉRO
II. La prise en compte de l’intégration dans les décisions relatives au séjour
III. Les dispositions relatives à l’asile
Le cadre européen commun de référence pour les langues du Conseil de l’Europe est un instrument pratique censé permettre d’établir clairement les éléments communs à atteindre lors des étapes successives de l’apprentissage d’une langue étrangère (5). Il est composé de trois niveaux généraux : A (utilisateur élémentaire), B (utilisateur indépendant) et C (utilisateur expérimenté), chacun étant subdivisé en deux niveaux (A1, A2, B1, B2, C1 et C2), eux-mêmes subdivisés en rubriques (écouter, lire, prendre par à une conversation, s’exprimer oralement en continu et écrire).
Le niveau requis des postulants à la nationalité française par naturalisation ou par mariage est le niveau B1, rubriques « écouter », « prendre part à une conversation » et « s’exprimer oralement en continu ».
Le niveau B1, rubrique « écouter », est atteint à partir du moment où l’intéressé peut comprendre :
les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de sujets familiers concernant le travail, l’école, les loisirs, etc. ;
l’essentiel de nombreuses émissions de radio ou de télévision sur l’actualité ou sur des sujets qui l’intéressent à titre personnel ou professionnel si l’on parle d’une façon relativement lente et distincte.
Le niveau B1, rubrique « prendre part à une conversation », est atteint lorsque l’intéressé peut :
faire face à la majorité des situations que l’on peut rencontrer au cours d’un voyage dans une région où la langue est parlée ;
prendre part sans préparation à une conversation sur des sujets familiers ou d’intérêt personnel ou qui concernent la vie quotidienne (par exemple famille, loisirs, travail, voyage et actualité).
Le niveau B1, rubrique « s’exprimer oralement en continu » est atteint lorsque l’intéressé peut :
s’exprimer de manière simple afin de raconter des expériences et des événements, ses rêves, ses espoirs ou ses buts ;
donner brièvement les raisons et explications de ses opinions ou projets ;
raconter une histoire ou l’intrigue d’un livre ou d’un film et exprimer ses réactions.
Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 et décision du Conseil constitutionnel n° 2011-631 DC du 9 juin 2011, J.O. du 17-06-11.
Décret n° 2011-1265 du 11 octobre 2011, modifiant le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, J.O. du 12-10-11.
Décret n° 2011-1266 du 11 octobre 2011, J.O. du 12-10-11.
Arrêté du 11 octobre 2011, NOR : IOCN1126048A, J.O. du 12-10-11.
Circulaire du 24 août 2011, NOR : IOCN1114306C, disp. sur
Les organismes de formation qui souhaitent délivrer les attestations permettant de justifier que les candidats à la nationalité française par naturalisation ou par mariage ont bien le niveau de français requis doivent obtenir le label qualité « Français langue d’intégration ». Ce label est créé afin de reconnaître et de promouvoir les organismes de formation dont l’offre vise, pour des publics adultes immigrés dont le français n’est pas la langue maternelle, l’apprentissage de la langue française ainsi que des usages, des principes et des valeurs nécessaires à l’intégration dans la société française. L’enseignement de la langue privilégie la forme orale et la lecture.
Le label est attribué pour 3 ans renouvelables par le ministre chargé de l’intégration sur proposition d’une commission de labellisation dédiée qui comprend notamment le président du Haut Conseil à l’intégration et le directeur général de l’enseignement scolaire.
BINATIONALITE (ART. 4)
La loi impose dorénavant à la personne acquérant la nationalité française par décision de l’autorité publique (naturalisation) ou par déclaration d’informer l’administration de la ou des nationalités qu’elle possède déjà, de la ou des nationalités qu’elle conserve en plus de la nationalité française ainsi que de la ou des nationalités auxquelles elle entend renoncer (C. civ., art. 21-27-1 nouveau). Cette obligation n’a toutefois pas de valeur contraignante « puisqu’elle ne reçoit aucune sanction », a souligné le sénateur (UMP) François-Noël Buffet au cours des débats. En outre, « les réponses fournies par l’intéressé ne le lient pas non plus pour l’avenir » (Rap. Sén. n° 239, tome I, Buffet, janvier 2011, page 53).
RETRAIT DE LA NATIONALITE (ART. 6)
La loi du 16 juin 2011 a allongé de 1 à 2 ans le délai pendant lequel l’administration peut « rapporter » – c’est-à-dire retirer – un décret d’acquisition, de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales requises (C. civ., art. 27-2 modifié). Pour mémoire, un retrait peut également intervenir si la décision a été obtenue par mensonge ou par fraude. Dans ce dernier cas, le délai pendant lequel l’administration peut retirer le décret reste, sans changement, fixé à 2 ans.
(1) Voir, à cet égard, notre dossier consacré aux dispositions sur le droit au séjour – ASH n° 2719-2720 du 22-07-11, p. 53.
(3) C’est-à-dire un diplôme sanctionnant une formation spécialisée d’une durée maximum de un 1 an au-delà du premier cycle de l’enseignement du second degré, du niveau du certificat de formation professionnelle.
(4) C’est-à-dire le greffier en chef du tribunal d’instance si elle est souscrite en France, et le ministre chargé des naturalisations si elle est souscrite à l’étranger.
(5) Il est téléchargeable sur