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Le CNLE veut associer plus étroitement les personnes pauvres à l’élaboration des politiques publiques

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En décembre 2010, lors de l’installation des nouveaux membres du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) (1), la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale a demandé à l’instance de créer en son sein un groupe de travail chargé d’étudier les possibilités de développer la représentation des usagers dans les instances nationales, les structures de prise en charge et les collectivités territoriales. En pratique, ce groupe de travail s’est plus particulièrement penché sur la participation des personnes en situation de pauvreté et de précarité. Le 21 octobre, il a remis à Roselyne Bachelot ses recommandations pour améliorer la participation de ces personnes à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques publiques qui les concernent (2).

Une mise en œuvre progressive de la participation…

Selon le groupe de travail, « l’impératif participatif » se développe progressivement tant sur le plan législatif que sur celui des pratiques sociales (débats citoyens, forums…) et répond aux enjeux variés d’amélioration de la gouvernance, de l’efficacité de l’action ou d’une démarche démocratique. D’ores et déjà, certaines lois imposent la participation des usagers dans les instances. C’est le cas, par exemple, de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, qui prévoit la participation des usagers dans le cadre des conseils de vie sociale, des instances désormais obligatoires dans les établissements sociaux et médico-sociaux. Plus récemment, la loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active (RSA) a instauré les équipes pluridisciplinaires chargées de donner un avis au président du conseil général sur les situations de suspension ou de réduction du RSA, équipes auxquelles doivent obligatoirement être intégrés des bénéficiaires de la prestation. Des associations, telles que ATD quart monde ou la Fondation de l’Armée du salut, ont également intégré cette démarche dans leurs pratiques.

Pour les auteurs du rapport, « la participation a pour objectif de mieux appréhender et connaître la pauvreté, d’en comprendre ses causes ». « En apportant leur expertise, les personnes en situation de précarité permettent d’éviter les contresens, d’établir les problématiques, de mieux cibler et concevoir les dispositifs, de donner de la légitimité aux actions mises en œuvre », indique le groupe de travail. Par ailleurs, estime-t-il, la participation permet un « accès effectif à la citoyenneté » car ces personnes « passent progressivement d’une revendication à une proposition élaborée », « parviennent à se projeter dans l’avenir et l’intérêt général, et prennent part au débat public ». En ce sens, « la participation peut être envisagée comme un nouveau droit ».

… mais encore « balbutiante »

Toutefois, malgré un « certain consensus », les initiatives demeurent « éparses et éphémères », note le groupe de travail, dont l’ambition est de « redonner une impulsion réelle » à cette démarche. Pour ce faire, il convient, selon lui, de former les professionnels, les élus et les travailleurs sociaux à la promotion et à la mise en œuvre de la participation des personnes accompagnées. Le rapport suggère aussi de « mettre en exergue l’apport des diverses initiatives de participation (associatives, syndicales et politiques) pour faire émerger de nouveaux outils, dans un souci de les pérenniser, les capitaliser et les partager ». En outre, afin d’inciter les personnes elles-mêmes à réagir, il préconise de « favoriser l’émergence de forces citoyennes en créant une sorte de droit d’alerte et de droit de mise à l’ordre du jour ». Plus globalement, le groupe de travail demande la création d’un collège des personnes en situation de pauvreté et de précarité au sein même du CNLE.

Afin de s’assurer de la volonté des acteurs de s’engager dans une démarche de participation, le rapport recommande de « garantir un temps et un rythme adaptés aux personnes qui participent, et non imposés par un agenda politique ou d’autres contraintes ». En outre, souligne-t-il, « cet effort de participation doit être mené de façon systématique dans tous les champs de la sphère publique (insertion, éducation, santé…) ». Autres préconisations : intégrer la dimension participative dans la gouvernance des institutions publiques (conseil économique, social et environnemental, centres communaux d’action sociale…) et des associations, et faire « que cette participation s’exerce tout au long des processus de mise en œuvre des politiques publiques (diagnostic initial, élaboration, mise en œuvre opérationnelle, évaluation) ». Pour cela, il faudra débloquer des moyens financiers et humains afin de mobiliser les personnes en situation de pauvreté et de précarité et d’évaluer les résultats de cette participation, insiste le groupe de travail. Ajoutant qu’un défraiement « systématique » des participants doit être prévu.

Par ailleurs, « la participation doit être visible (faire savoir qu’elle existe) et lisible (faire comprendre son utilité sociale) pour qu’elle puisse fonctionner durablement », précise le groupe de travail du CNLE, et ses résultats « montrés et valorisés ». Enfin, d’après lui, il faudrait enfin prendre en compte les compétences développées dans le cadre de la participation par les personnes en situation de pauvreté et de précarité dans leur parcours d’insertion ou leur démarche de validation des acquis de l’expérience.

VERS UN GUIDE MÉTHODOLOGIQUE DE LA PARTICIPATION

Lors de la remise du rapport du groupe de travail sur la participation des usagers dans les instances nationales et locales le 21 octobre, la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale a demandé au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) de poursuivre ses travaux, vraisemblablement « jusqu’en janvier 2012 », a indiqué ce dernier aux ASH. Objectif : établir une méthodologie de la mise en œuvre de la participation des personnes en situation de pauvreté et de précarité à l’élaboration des politiques publiques qui les concernent. Sans attendre, Roselyne Bachelot souhaite en outre expérimenter l’une des préconisations du groupe de travail, qui soutient que, pour que « la participation soit productive, elle doit être collective, préparée, organisée et directe ». Et que « les personnes qui sont amenées à participer doivent être informées, formées, accompagnées et soutenues par des professionnels et/ou des bénévoles ayant les compétences pour le faire ». La ministre entend ainsi associer le CNLE aux travaux préparatoires de la conférence nationale d’évaluation du revenu de solidarité active (RSA) du 15 décembre prochain. Plus particulièrement, le conseil devra « contribuer à l’accompagnement des bénéficiaires du RSA » qui doivent participer à cette manifestation, c’est-à-dire « les informer sur leur rôle, co-construire des recommandations qu’ils souhaitent soumettre lors de la conférence… », a précisé l’instance.

Notes

(1) Voir ASH n° 2688 du 24-12-10, p. 6.

(2) Disponibles sur www.cnle.gouv.fr.

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