Pourquoi cette enquête ?
Nous entendons parler, depuis plusieurs années, de mauvaises conditions de travail dans les établissements sanitaires, médico-sociaux et sociaux de la fonction publique hospitalière. Fin 2009, nous avons souhaité rendre objectif ce ressenti en organisant une grande enquête auprès des salariés des cinq filières. En quelques mois, nous avons récolté 56 400 réponses, un succès inespéré (2) !
Quels sont les principaux résultats ?
Dans la filière socio-éducative, 2 229 personnes travaillant dans 492 établissements ont répondu. Parmi elles, 46 % sont des assistants socio-éducatifs (assistants de service social, éducateurs spécialisés ou CESF), 10 % des moniteurs-éducateurs, 9 % des auxiliaires médico-psychologiques. Comme pour les autres filières, la dégradation des conditions de travail est liée au rythme, à l’intensité et à la charge physique. Le stress est cité par plus de la moitié des salariés (53 %). Quelle que soit leur ancienneté, 70 % des professionnels se disent non reconnus dans leur travail. Parmi les éléments qui dégradent le plus la vie privée, l’enquête relève le manque de personnels – 51 % des professionnels réclament des effectifs supplémentaires – et la mauvaise ambiance au travail. C’est dans ces deux domaines que les salariés souhaitent des améliorations.
L’évolution de la législation ne serait pas étrangère à la dégradation des conditions de travail…
L’enquête montre que les dernières lois – loi 2002-2, la loi « handicap » de 2005 et celle réformant la protection de l’enfance de 2007 – ont modifié la manière de travailler et de diriger les équipes. Par exemple, le développement de la prise en charge à domicile a eu un impact sur le public en établissement : les personnes lourdement handicapées ou celles ayant des problématiques sociales ou comportementales sont devenues majoritaires, ce qui implique des prises en charge de plus en plus complexes. Certains établissements n’ont pas les moyens de faire appel à des professionnels qualifiés comme des psychiatres ou des psychologues. Autre effet des dernières lois : la multiplication des écrits que doivent rédiger les professionnels. Il y a un décalage entre les contraintes réglementaires et la réalité du terrain !
Comment expliquez-vous le déficit de communication ?
Par le nouveau mode de management : alors qu’avant, le directeur était un ancien collègue monté en grade, aujourd’hui, il n’est pas forcément issu du milieu et ne connaît pas toujours le métier. Son bureau n’est souvent pas sur le lieu de travail. Il n’y a plus le lien direct entre salariés et directeur. Il faut réinstaurer un management de proximité !
Que proposez-vous ?
Pour libérer la parole des professionnels, nous préconisons la mise en place de réunions trimestrielles où chacun s’exprime en toute liberté. Nous militons pour les groupes d’analyse de la pratique qui permettent de favoriser l’échange des savoirs entre professionnels. Il faut aussi développer le travail d’équipe. Plus globalement, nous souhaitons qu’une évaluation de l’impact des lois sur la prise en charge de l’usager et les conditions de travail des professionnels soit lancée. Enfin, nous allons nous appuyer sur cette enquête pour sensibiliser les directeurs à la responsabilité sociale dans les établissements à travers la prévention des risques psychosociaux. Nous souhaitons que les projets d’établissements et les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens prennent davantage en compte le volet social.
(1) Soit les établissements d’hospitalisation publics, les maisons de retraite publiques, les établissements publics ou à caractère public relevant des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance, les établissements publics pour mineurs ou adultes handicapés ou inadaptés, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale publics ou à caractère public.
(2) Disponible sur