L’hospitalisation d’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut pas être ordonnée sur le fondement de la notoriété publique, a indiqué le Conseil constitutionnel dans une décision du 6 octobre. C’est la troisième fois en un an qu’il tranche une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’hospitalisation sans consentement d’une personne souffrant de troubles mentaux. Il a en effet déjà rendu une première décision le 26 novembre 2010 sur l’hospitalisation à la demande d’un tiers puis une deuxième, le 9 juin dernier, sur les conditions d’entrée et le maintien en hospitalisation d’office (1). Deux décisions dont la loi du 5 juillet 2011, qui réforme les soins psychiatriques sans consentement (2), a tenu compte.
Cette troisième affaire porte sur les mesures provisoires d’hospitalisation d’office arrêtées par le maire en application de l’article L. 3213-2 du code de la santé publique dans sa version en vigueur avant le 1er août 2011, date d’entrée en application de la réforme. Ainsi, selon cet article, le maire peut prendre toutes les mesures provisoires nécessaires, y compris une hospitalisation sans consentement, à l’égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes en cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique. Il doit en référer dans les 24 heures au préfet de département, qui peut prononcer, s’il y a lieu, un arrêté d’hospitalisation d’office. Faute de décision du préfet dans les 48 heures, les mesures provisoires prises par le maire sont caduques.
Selon la requérante, la possibilité d’hospitaliser une personne atteinte de troubles mentaux sur le fondement de la seule notoriété publique méconnaît les exigences constitutionnelles qui assurent la protection de la liberté individuelle. Le Conseil constitutionnel lui donne raison en décidant que les dispositions de l’article L. 3213-2 n’assurent pas que la privation de liberté est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état du malade ainsi qu’à la sûreté des personnes ou à la préservation de l’ordre public. Il déclare donc les mots « ou, à défaut, par la notoriété publique » contraires à la Constitution. Cette décision est applicable depuis le 8 octobre, jour de sa publication au Journal officiel, à toutes les instances non jugées définitivement à cette date. Rappelons par ailleurs que la loi du 5 juillet 2011 n’a pas remis en question la notion de notoriété publique. En effet, ainsi que le souligne le Conseil constitutionnel dans un Commentaire aux cahiers (3), « elle n’a modifié l’article L. 3213-2 que pour substituer la notion d’“admission en soins psychiatriques” à celle d’“hospitalisation d’office” ».
Les autres dispositions de l’article L. 3213-2 sont par ailleurs jugées conformes à la Constitution, y compris la possibilité d’ordonner une mesure de privation de liberté provisoire après un simple avis médical. Sur ce point, le Conseil constitutionnel a estimé que le législateur n’a pas méconnu les exigences constitutionnelles dans la mesure où l’article L. 3213-2 n’est applicable qu’en cas de danger imminent pour la sûreté des personnes et ne concerne que les personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes.
La Haute Juridiction a également jugé conforme à la Constitution l’article L. 3213-3 du code de la santé publique, dans sa version antérieure au 1er août 2011, dans la mesure où il se borne à imposer l’examen du malade dans les 15 jours puis un mois après l’hospitalisation et ensuite au moins tous les mois par un psychiatre de l’établissement qui transmet son certificat médical au préfet de département et à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. « En lui-même, cet article n’est contraire à aucun droit ou liberté que la Constitution garantit », a-t-il indiqué.
(3) Disponible sur