Dans leur pavillon californien, Rachel et Lars, octogénaires, glissent doucement vers la « sortie ». Mais avant cela, il y a la vieillesse et tous ses affres : maux de tête et de dos, pertes de mémoire, surdité, cécité, malnutrition, chutes, escarres, grabatisation, cancer… Pas facile pour leur fille Laura d’assister à leur déliquescence. D’autant que les deux époux n’ont aucune envie de se confronter à la réalité médicale, et encore moins de quitter leur chez-eux. Autant de raisons qui les incitent à taire, à minimiser ou encore à ignorer les symptômes d’une décrépitude qui s’accélère et, bien sûr, à refuser l’aide de professionnels. Tant bien que mal, usant parfois de subterfuges, Laura les accompagne pendant quatre ans, entre déchéance physique et cognitive, acharnement thérapeutique et manquements flagrants des soignants. C’est elle aussi qui prend son balai pour faire le ménage et le tri dans leur maison pleine de crasse mais aussi de souvenirs. Derrière Laura se cache l’auteure de cette bande dessinée, Joyce Farmer. L’artiste américaine a mis dix ans à accoucher de ce pavé autobiographique, dessiné uniquement à l’encre noire et dans lequel elle n’esquive pas les détails d’une réalité parfois sordide. Mais grâce à son talent, Vers la sortie est dominé par la tendresse, la sollicitude, le courage. Le roman graphique confronte forcément tout un chacun avec la fin de vie de ses proches ou la sienne, et se lit d’une traite, mais avec une boule au ventre.
Vers la sortie – Joyce Farmer – Ed. Actes Sud-L’an 2 – 23,80 €