La performance ? Théophile Anquier, directeur de la Maison Saint-Joseph, à Chaudron-en-Mauges (Maine-et-Loire), un complexe associatif comprenant un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), un foyer occupationnel et un service hospitalier participant au service public, ne la craint pas. Cet ancien directeur de clinique, rompu au pilotage basé sur des indicateurs de qualité, estime indispensable que le secteur médico-social se dote de nouveaux outils de gestion. « Nous avons un devoir collectif d’augmenter la qualité de prise en charge sur le territoire dans un domaine où les besoins sont exponentiels et où l’argent manque. »
Déplorant l’absence de repères communs des professionnels « en termes de ratios de personnel, de tarifs, de qualité de prestations », il a naturellement accepté de rejoindre le noyau d’acteurs qui, à l’invitation de l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), a testé et affiné fin 2010 les indicateurs de fonctionnement du tableau de bord des établissements et services sociaux et médico-sociaux, dont la généralisation est prévue courant 2012. « Ce qui a été mis en place, c’est le minimum pour gérer une structure et pour clarifier les relations avec les tutelles », assure Théophile Anquier.
Même réalisme de Brigitte Cochet, infirmière directrice d’un centre intercommunal d’action sociale, à Chindrieux (Savoie), en charge de services pour adultes handicapés ou âgés, dont un service de soins infirmiers à domicile, et d’un secteur petite enfance. Conviée elle aussi à la phase d’élaboration du tableau de bord, elle pointe la pléthore d’enquêtes auxquelles sont soumises les structures : « Chacune son modèle, au point qu’on peut se demander comment les résultats peuvent être exploités ». Son souhait ? Que les travaux débouchent sur une collecte d’informations unifiée. « Ce qui permettrait d’obtenir une photographie au plan national du secteur. Nous avons tous à y gagner. »
Le discours de ces deux responsables tranche avec l’inquiétude des professionnels lors de l’annonce de la création d’une « agence de la performance » dans la foulée de la loi « hôpital, patients, santé et territoires » (HPST). Deux ans après, force est de constater que le premier résultat à l’actif de l’ANAP est d’avoir bousculé un secteur tiraillé depuis toujours entre militantisme et gestion. Et les fédérations professionnelles – du moins celles siégeant au conseil d’administration de l’ANAP – affichent aujourd’hui un certain pragmatisme. Elles ont d’ailleurs rapidement adressé à l’agence des demandes précises en matière d’élaboration d’outils de « benchmarking » et autres « études nationales de coûts de revient entre opérateurs publics et privés ». Autre illustration de ce changement d’état d’esprit : alors que l’ANAP cherchait à recruter 500 structures volontaires pour une seconde phase de test de son tableau de bord, cette fois grandeur réelle (1), pas moins de 2 000 candidatures lui seraient parvenues !
« Il y a un consensus autour de l’idée que l’amélioration de l’organisation n’est pas le seul fait des acteurs de terrain ni même des pouvoirs publics, mais qu’elle requiert un travail rigoureux d’analyse des pratiques et d’élaboration d’outils », explique David Causse, coordinateur du pôle santé-social de la FEHAP. Celui-ci se rejouit du périmètre d’action étendu de l’ANAP. Fruit du regroupement de trois agences initialement spécialisées dans l’ingénierie financière, l’organisation et les systèmes d’information des hôpitaux (2), l’agence est compétente sur tous les aspects de la gestion des établissements : appui à la performance des structures sanitaires et médico-sociales via la mise à disposition d’outils, pilotage d’audits internes, assistance aux projets de restructuration, diffusion de bonnes pratiques. Elle a également une mission d’observation du terrain et d’assistance aux administrations d’Etat. « Cet aspect de département “recherche et méthodes” sur le champ sanitaire et médico-social est plutôt favorablement perçu. Le secteur a besoin de méthodes et de repères statistiques pour asseoir ses décisions », analyse David Causse.
A l’ANAP, on souligne l’implication des fédérations dans les travaux en cours. Son directeur, Christian Anastasy, précise que le calendrier médico-social de l’agence est établi à partir des commandes de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) et de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), mais aussi de celles « des représentants du secteur présents dans ses instances. La structure de l’ANAP autorise une grande souplesse. En fonction des sujets, et compte tenu de leur maturité, nous pouvons être soit dans de la prospective et dans l’état des lieux, soit dans des démarches de terrain d’audit de système [audits de dispositif, d’établissement, de réseaux sanitaires et sociaux…]. »
La méthode se veut participative. Organisée en groupement d’intérêt public, l’ANAP fédère dans son conseil d’administration des représentants de l’Etat, de l’assurance maladie, de la CNSA, et des fédérations d’établissements de santé et médico-sociaux, facilitant la collaboration des acteurs. Fin 2009, quand la DGCS a commandé à l’agence un outil de pilotage de la performance dans le secteur médico-social, un tour de table a été organisé entre ces partenaires. « Nous leur avons demandé d’identifier, en fonction de leurs besoins respectifs, les données qui pouvaient être intégrées à un système d’information partagé susceptible d’alimenter le dialogue entre les établissements et la puissance publique », explique Marie-Dominique Lussier, médecin gériatre chargée du secteur médico-social de l’ANAP.
Pas moins de 300 items ont été recueillis avant d’être synthétisés dans un tableau de bord d’environ 80 indicateurs, répartis en quatre domaines clés (financier, humain, technique, organisationnel). « L’idée est que l’utilisation de ce tableau de bord soit possible en interne par le management de l’établissement, mais aussi en externe dans les relations de la structure avec ses tutelles financières », explique-t-elle. A terme, l’ensemble des établissements et services médico-sociaux devrait avoir la même base de données, autorisant les comparaisons structure par structure. « Le système d’information, qui a une vocation de pilotage, sera partagé à l’échelon des départements et des régions et, en tant que tel, regardé par l’Etat. »
Une perspective qui ne semble guère effrayer Richard Tourisseau, directeur du groupement des établissements gérontologiques du Val-de-Marne (Fondation Favier) : « Nous représentons un milieu où on ne s’est jamais habitué à réfléchir en termes de comparaison de coûts. Même sur la connaissance locale des activités développées au sein des structures, les indicateurs manquent. Si l’ANAP peut permettre cela, pourquoi pas ? »
Mais derrière le « réalisme » des fédérations et d’une partie des professionnels, les craintes restent vives (3). En témoignent les réactions houleuses de directeurs lors du tour de France entrepris dès 2010 par l’ANAP pour présenter ses projets. François Noble, directeur de l’Andesi (Association nationale des cadres du social), qui organisait en mars dernier une journée d’information sur la performance (4), s’étonne du « rabaissement permanent du politique au technique dans les projets de l’ANAP. Ce qui est problématique, parce que, derrière le technique, on voit des moyennes, des tendances, des tableaux, alors que la vraie vie de l’établissement est ailleurs. » Même réserve de la part de Jacques Orvain, enseignant à l’EHESP (Ecole des hautes études en santé publique) et membre du conseil scientifique et d’orientation de l’ANAP, qui déplore que la performance des institutions médico-sociales ait été abordée sous l’angle des indicateurs sans étape préalable : « Il y a toute une phase d’appropriation des professionnels qui n’a pas été conduite. On considère que les travaux sur la performance du système hospitalier menés par la Haute Autorité de santé auprès des directeurs d’hôpitaux sont suffisants et qu’il en ira de même pour le médico-social. Mais c’est sans compter sur les débats qui agitent le secteur. »
A ces critiques s’ajoute la question de la coexistence de l’ANAP et de l’ANESM (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux), deux institutions nées de deux lois d’organisation (loi 2002-2 et loi « HPST » de 2009) très différentes. Pour Marcel Jaeger, titulaire de la chaire du travail social et de l’intervention sociale au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et membre du conseil scientifique de l’ANESM, la première difficulté tient à leur périmètre. « L’ANESM a vocation à couvrir la totalité du champ de l’action sociale et médico-sociale et l’ANAP celui de la santé et du médico-social, dépassant le clivage qui existait entre ces deux secteurs. Ce qui pose la question de la cohérence globale de l’ensemble et montre l’instabilité du paysage. » A cela s’ajoute une différence de finalité. L’évaluation sociale et médico-sociale consistait à juger de l’activité d’un établissement au regard des intentions énoncées, explique Marcel Jaeger. « Avec l’ANAP, nous sommes sur le registre de la mise en rapport non plus d’un projet avec des résultats, mais des moyens existants avec les résultats de l’activité. Ce qui rend les inquiétudes des professionnels légitimes. »
En 2010, les deux agences ont néanmoins signé une convention de partenariat en vue de coordonner leurs exigences en matière de suivi des établissements. La version finale du tableau de bord de l’ANAP intégrera un indicateur d’avancement des établissements et services médico-sociaux vis-à-vis des recommandations de l’ANESM. En retour, la future recommandation sur l’évaluation interne des EHPAD, élaborée par cette dernière avec le concours de l’ANAP, comportera une quinzaine d’indicateurs sur des pratiques dites « prioritaires et exigibles » (notamment en matière de suivi des dénutritions, infections, chutes, dépressions). A l’ANESM, on tient cependant à dissiper toute confusion. « L’ANAP se situe sur les moyens mis en œuvre et nous sur le cœur du métier. Les indicateurs sur lesquels nous avons travaillé sont à usage interne et n’ont d’autre objectif que d’accompagner les évaluations des pratiques », assure Didier Charlanne, directeur de l’ANESM. De même, la participation de cette dernière au chantier de la coordination des indicateurs de fonctionnement des EHPAD, lancé le 27 juin dernier par Roselyne Bachelot afin de rationaliser l’exploitation des données recueillies par les différentes autorités de tutelle, est abordée avec prudence. « L’ANESM n’a pas souhaité piloter la démarche, par crainte que ces travaux interfèrent sur son objet, qui, en l’état, est de pousser l’évaluation et de produire des recommandations de bonnes pratiques, explique Didier Charlanne. Il faut rester très prudent en termes de comparaison entre établissements car l’utilisation d’indicateurs de pilotage du cœur de métier, comme par exemple le taux de décès dans un EHPAD, pourrait avoir des effets pervers, voire modifier les pratiques. »
Mais jusqu’où la distinction entre ce qui relève du cœur de métier et de l’opérationnel pourra-t-elle se maintenir dans le dialogue de gestion ? « La crainte est qu’à force de prôner la performance, on glisse du côté de la performance des actions et qu’on compare ce qui n’est pas comparable, c’est-à-dire des pratiques d’accompagnement éducatif ou thérapeutique caractérisées par la prise de risques et l’incertitude, s’alarme Patrick Rousseau, directeur général adjoint de l’Aidaphi (Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées), à Saint-Jean-de-Braye (Loiret). Que la gestion soit transparente, c’est un fait, que la clinique le soit, ce n’est pas acceptable ! » Si ce scénario devait se confirmer, estime-t-il, c’est la capacité d’imagination des professionnels qui risque de sombrer dans la standardisation des pratiques, comme cela s’est fait dans le secteur sanitaire avec la tarification à l’activité. « Et il n’est pas certain que le discours militant puisse aujourd’hui offrir un contrepoint suffisant. »
Certaines fédérations présentes au conseil d’administration de l’ANAP aimeraient d’ailleurs voir l’agence infléchir sa trajectoire, notamment dans le sens d’une plus grande indépendance vis-à-vis des demandes de l’Etat. Lesquelles, selon elles, l’éloignent des priorités médico-sociales. « A peine l’ANAP était-elle installée, témoigne René Caillet, responsable du pôle « organisation sanitaire et médico-sociale » de la Fédération hospitalière de France, que les pouvoirs publics ont poussé pour qu’elle accompagne les hôpitaux publics dans leur plan de retour à l’équilibre. Ce dossier représente près de 70 % des ressources opérationnelles de l’agence. » Conséquences : un calendrier donnant une place écrasante au secteur de la santé face aux dossiers médico-sociaux (voir encadré, page 28). « Si le déséquilibre entre les priorités sanitaires et médico-sociales était logique au début, puisque l’ANAP est la poursuite d’autres agences hospitalières, il l’est de moins en moins, notamment lorsqu’on aborde de nouveaux thèmes de travail », déplore David Causse.
A l’image du chantier de l’optimisation des transports sanitaires, dont le coût est assumé par l’assurance maladie. Abordé au titre du programme 2011, celui-ci aurait oublié les établissements médico-sociaux sans l’insistance des fédérations. « Face au manque de priorités médico-sociales, on peut comprendre qu’une certaine méfiance s’installe chez une partie des professionnels. Après on peut faire dire beaucoup de choses à une telle attitude, notamment que le secteur serait plus passéiste ou moins transparent que le sanitaire », estime David Causse.
Du côté de l’ANAP, on rappelle la jeunesse de l’institution. « On fait le reproche à l’agence d’être une émanation du secteur hospitalier. Mais, depuis sa création, une soixantaine de recrutements ont été opérés en provenance de différents horizons, portant les effectifs à une centaine d’ici à la fin de l’année 2011. La question de la culture sanitaire des origines ne se pose pratiquement plus », affirme Christian Anastasy. Idem pour les grandes orientations, pour lesquelles l’ANAP assure avoir une vision d’ensemble, conforme à une définition élargie de la santé publique : « Notre propos est d’améliorer la prise en charge des personnes à l’intérieur du système de santé tout entier en optimisant la gestion des ressources. Si on raisonne secteur contre secteur, on passe à côté d’une partie du sujet », défend son directeur.
En 2010, l’agence a, par exemple, lancé un programme visant à mieux comprendre les ruptures qui émaillent le parcours de santé des personnes âgées. Dans trois régions (Pays-de-la-Loire, Languedoc-Roussillon, Ile-de-France), les acteurs des secteurs hospitalier et médico-social ont été réunis au sein d’ateliers afin de refléchir aux remèdes à apporter aux situations d’errance des patients âgés dans le système de soins. Sur la base de ce diagnostic partagé, l’ANAP devrait proposer aux partenaires, à la fin de l’année, une feuille de route sur les actions à conduire en vue d’une meilleure coordination, avant d’étendre la méthode à l’ensemble des agences régionales de santé, en mettant à leur disposition des outils de diagnostic et de mesure d’efficience des parcours. « Tout le monde connaît ces situations dramatiques qui aboutissent à des hospitalisations indues et à l’encombrement des services d’urgence, mais personne ne les objective, analyse Christian Anastasy. Il faut une agence comme la nôtre pour faire remonter les vrais problèmes et mettre tout le monde sur le pont. »
Il n’empêche. Le débat autour de l’ANAP est loin d’être clos. Le 11 juillet dernier, dans un rapport d’information sur les agences sanitaires remis à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, le député Yves Bur (UMP) militait pour un toilettage complet du système actuel composé de 18 agences ou organismes intervenant dans le domaine de la santé (5). Parmi les pistes, le député du Bas-Rhin proposait la privatisation de l’ANAP et le transfert des missions de l’ANESM à la Haute Autorité de santé… avec le risque d’une sanitarisation du médico-social (6). « Il est évident qu’on avance vers des différences fondamentales de pilotage des sous-ensembles du secteur de l’action sociale et médico-sociale, qui n’a d’ailleurs jamais été qu’une construction administrative, commente Daniel Gacoin, consultant et directeur du cabinet ProEthique conseil. A côté des établissements médico-sociaux, plus proches du sanitaire, va-t-on vers une mise à distance du secteur de l’inclusion et de la protection de l’enfance ? »
En 2010, première année d’exercice, l’ANAP s’est concentrée sur un nombre restreint de programmes jugés prioritaires. L’essentiel de ses ressources a été investi dans la transformation des établissements de santé, via un appui à l’amélioration de leur performance (gestion patrimoniale, système d’information, ressources humaines). Parallèlement, des actions ont été conduites au niveau des territoires de santé afin de décloisonner l’offre sanitaire et médico-sociale, en même temps qu’était lancé le chantier de la performance des établissements médico-sociaux.
Deux nouveaux chantiers sont en cours d’ouverture au titre du programme de 2011 : l’organisation du temps de travail dans les établissements de santé, et la refonte de l’organisation des transports sanitaires.
Côté perspectives, le conseil scientifique et d’orientation a formulé une série de préconisations relatives au secteur médico-social. Il estime notamment nécessaire de doter les professionnels de référentiels d’aide à la décision. Il propose également de fournir des outils d’aide à l’élaboration des appels à projet ou des CPOM (contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens). Enfin, ses membres pointent la nécessité d’appuyer l’évolution des structures médico-sociales en accélérant la mise en œuvre des TIC (technologies de l’information et de la communication) et en développant des actions de formation sur la nouvelle gouvernance territoriale ou la réforme des financements.
Sources : rapport d’activité 2010, ANAP, 2011 – Disponible sur
Date de naissance : 23 octobre 2009 à la suite de l’adoption de la loi « hôpital, patients, santé et territoires ».
Statut : groupement d’intérêt public (GIP).
Budget 2011 : 53 millions d’euros.
Nombre d’agents prévus fin 2011 : 100 (7).
L’agence comporte :
– un conseil d’administration, présidé par Philippe Ritter, préfet honoraire. Il regroupe des représentants de l’Etat (45 % des voix), de l’assurance maladie (16 %), de la CNSA (5 %), et des fédérations représentatives de la santé ou du médico-social (FHF, FHP, FEHAP, Fnehad, Uniopss, FNLCC, Synerpa) ;
– un conseil scientifique et d’orientation, présidé par Gérard Saillant, chirurgien et ancien président du conseil scientifique de la CNSA. Il est composé de huit personnalités qualifiées, dont le directeur de l’ANESM.
En 2010, l’ANAP est intervenue auprès de 860 établissements de santé ou médico-sociaux et a accompagné 26 agences régionales de santé.
Chef du service des politiques d’appui, adjointe à la directrice générale de la cohésion sociale.
La DGCS a ouvert un vaste chantier sur la collecte d’indicateurs à l’intérieur du secteur social et médico-social. De quoi s’agit-il ?
Le secteur se caractérise globalement par un manque d’informations sur l’activité, la qualité des prestations, mais aussi sur la gestion budgétaire des institutions. Il n’existe pas non plus de système d’information partagé entre les gestionnaires et les services de l’Etat ou les collectivités en charge de l’autorisation. Pour pallier ce manque de visibilité, la DGCS travaille sur plusieurs projets.
Dans le champ médico-social, le mandat qui a été confié à l’ANAP sur le tableau de bord de pilotage des établissements et services est pluriel. Il s’agit d’équiper le secteur d’un outil d’analyse de sa performance, puis de permettre des restitutions autorisant la comparaison des établissements entre eux, tant pour les gestionnaires que, plus globalement, pour les autorités en charge de la tarification ou de l’allocation des ressources.
Le 27 juin dernier, la DGCS a également installé un comité de coordination des démarches d’évaluation des EHPAD. Un de ses objectifs est de réfléchir à la mise au point d’indicateurs opposables, c’est-à-dire renseignés obligatoirement par les établissements, qui pourront être utilisés par les services chargés de l’autorisation et de la tarification.
Enfin, nous avons initié une démarche de réflexion sur l’inter-opérabilité des données échangées dans le secteur social et médico-social. Une étude préalable a été confiée à l’AFNOR sur l’opportunité d’une normalisation des informations. Notre idée est que des éditeurs de logiciels de gestion puissent, à l’avenir, intégrer ces normes dans leurs systèmes.
Certains dénoncent une volonté de contrôle de la part des pouvoirs publics…
On peut comprendre cette inquiétude dans un contexte de tension sur les finances publiques. En même temps, une meilleure connaissance des conditions d’exercice des établissements par le régulateur local va dans le sens d’un dialogue de gestion plus intelligent. L’établissement pourra faire valoir plus facilement les spécificités qui peuvent justifier des différences de coûts légitimes.
Quelle place occupent encore l’ANESM et les démarches d’évaluation dans ce contexte ?
La démarche d’évaluation figure parmi les grandes avancées de la loi 2002-2. Elle fait maintenant partie de l’ADN des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Simplement, depuis la loi « hôpital, patients, santé et territoires » (HPST), il faut accepter que deux types de démarches cohabitent : l’une portée par l’ANESM, en charge des bonnes pratiques professionnelles pour l’ensemble des institutions sociales et médico-sociales, l’autre par l’ANAP, en charge de la performance des structures sanitaires et médico-sociales. Mais la différence de périmètre d’intervention ne doit pas tromper. Il n’est pas dans l’intention du législateur de dissocier le social du médico-social. La loi « HPST » a, par exemple, réformé le régime d’autorisation des établissements sociaux et médico-sociaux via les appels à projets et la réforme du calendrier des évaluations. La philosophie est donc bien d’avoir un fonctionnement homogène, compatible avec la tarification des établissements médico-sociaux par les ARS et les démarches de performance.
Le chantier de la performance va-t-il se déplacer vers le social ?
C’est probable. La prise en compte des populations vulnérables fait partie de la définition élargie de la santé publique sur laquelle se fondent les politiques publiques depuis la loi « HPST ». Mais il est logique que la performance soit d’abord initiée dans le médico-social, traditionnellement plus tourné vers le sanitaire. Lorsque nous aurons suffisamment avancé, il sera facile de décliner la démarche dans le champ social. La DGCS n’a d’ailleurs pas attendu l’ANAP pour travailler sur la performance des institutions de ce secteur. C’est, par exemple, le cas avec la refondation du dispositif accueil-hébergement-insertion (AHI), qui a permis l’élaboration d’un référentiel national des prestations et l’engagement d’une réflexion sur l’objectivation des coûts.
PROPOS RECUEILLIS PAR M. P.
(2) Le groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier (GMSIH), la mission nationale d’appui à l’investissement hospitalier (MAINH), la mission nationale d’expertise et d’audit hospitaliers (MEAH).
(3) Comme le montrent aussi les propos de Pierre Savignat – Voir ASH n° 2723 du 9-09-11, p. 32.
(4) « Les directeurs face au défi de la performance », journée d’information organisée le 9 mars 2011 en partenariat avec l’ANAP – Andesi : 63 bis, boulevard de Brandebourg – 94200 Ivry-sur-Seine – Tél. 01 46 71 71 71 –
(6) Comme le craint le GEPSo – Voir ASH n° 2725 du 23-09-11, p. 21.
(7) A titre de comparaison, le budget de l’ANESM était de 3,6 millions d’euros pour 26 agents fin 2010.