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Colère des associations après l’annonce d’un énième report de la réforme de la prise en charge de la dépendance

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Attendues depuis 2007, les mesures en faveur des personnes âgées sont une nouvelle fois repoussées, ce qui suscite un tollé. Les départements et le secteur de l’aide à domicile, qui espéraient des mesures d’urgence, sont particulièrement inquiets des conséquences du choix du gouvernement.

C’est le coup dur de la rentrée : le nouveau report de la réforme de la prise en charge de la dépendance, annoncé par François Fillon le 24 août (voir encadré, ce numéro, page5), suscite la consternation des associations du secteur. Attendu depuis la canicule de 2003, ce chantier, présenté comme prioritaire par Nicolas Sarkozy dès le début de son quinquennat, n’a cessé, chaque année, d’être repoussé. De multiples groupes de travail se réunissent depuis 2007 et on ne compte plus les rapports sur le sujet. Début 2011, la question de la prise en charge de la perte d’autonomie a dépassé les cercles des spécialistes pour intéresser une large part de la population et les rencontres organisées sur ce thème dans les régions, au premier semestre, ont connu un franc succès.

« Inacceptable et insultant »

Aujourd’hui, l’argument de François Fillon consistant à refuser de traiter ce dossier dans l’urgence et dans le contexte actuel est « inacceptable voire insultant pour l’ensemble des acteurs travaillant sur ce sujet depuis des années », s’insurge l’UNA (Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles). Pour l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux), les difficultés budgétaires invoquées tiennent d’autant moins que le montant cumulé des dispositions envisagées en juin par Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, « ne doit pas excéder 1,2 milliard d’euros ». Comme elle le rappelle, les mesures évoquées – revalorisation de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), réduction du reste à charge pour les résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, soutien aux conseils généraux et au secteur de l’aide à domicile – étaient d’ailleurs « bien modestes au regard des besoins exprimés ».

Pour France Alzheimer, la décision du Premier ministre est « incompréhensible et inopportune face aux nombreuses attentes des familles confrontées à de lourdes difficultés quotidiennes ». Nombre de Français âgés et leurs proches « vont continuer à payer des sommes intolérables pour un hébergement en établissement », condamne aussi l’AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées). En temps de crise, pourtant, « le souci éthique doit demeurer » et « les engagements envers les plus fragiles sont encore plus essentiels ». Pour la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées), ce report est un mauvais calcul puisque « soutenir l’autonomie et mieux prendre soin des personnes âgées » se traduit par « d’importantes économies pour la sécurité sociale ». Ce secteur est aussi l’un des rares à avoir la capacité de créer des emplois pérennes et non délocalisables. A contrario, dans les choix du Premier ministre, « les vieux servent de variable d’ajustement de la politique budgétaire » du gouvernement, condamne la Fnapaef (Fédération nationale des associations de personnes âgées et de leurs familles).

Enfin, ce report alimente un certain scepticisme pour l’avenir : pour le Syncass-CFDT, il « laisse planer le doute sur les suites qui seront données » au chantier. Le syndicat craint que cette annonce signifie un « retour à la case départ », estimant – comme beaucoup d’autres organisations – que la préparation de l’élection présidentielle ne se prête guère à une réforme de grande ampleur. Alors que François Fillon a annoncé que les concertations avec les organisations allaient reprendre début 2012, l’Uniopss doute qu’après les multiples travaux déjà réalisés, il soit encore possible d’avancer des idées neuves.

Cette annonce est aussi « une mauvaise nouvelle » pour le secteur de l’aide à domicile, regrette la fédération Adessa A Domicile. Alors que la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) commence tout juste à prendre la mesure des graves difficultés financières des structures (1), les organisations gestionnaires de services d’aide à domicile espéraient, après deux ans de mobilisation, obtenir un fonds d’urgence dans le cadre de la réforme de la dépendance. En effet, Roselyne Bachelot avait évoqué, en juin dernier, la possibilité que des mesures financières soient introduites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 afin d’aider, entre autres, les services d’aide à domicile (2). Depuis, rappelle l’UNA, la DGCS a fait le bilan : 400 structures se sont déclarées dans une situation économique très tendue et 10 000 emplois ont été supprimés depuis le début de l’année. Pour l’organisation, « le nouveau report de la réforme ne fera que précipiter la fin de l’accompagnement de nombreuses personnes fragiles et la fermeture de plusieurs structures ».

Des charges en plus pour l’aide à domicile

A cela s’ajoute une mesure annoncée par le Premier ministre le 24 août qui affecte directement le secteur : l’intégration des heures supplémentaires et complémentaires dans la base servant au calcul de « l’allégement Fillon » sur les bas salaires (voir ce numéro, page 5). Cette disposition « va augmenter les charges sociales des services d’aide à domicile qui emploient en grande partie des salariés payés au SMIC ou un peu plus que le SMIC », alerte Adessa A Domicile. Selon elle, cette situation risque d’amener les structures « à ne plus pouvoir répondre à des situations d’urgence, comme la prise en charge à domicile d’une personne après une sortie d’hospitalisation ». Les associations du secteur avaient déjà fait les frais de la chasse aux niches sociales avec la fin de certaines exonérations de charges patronales dans le domaine des services à la personne en janvier dernier, dans le cadre de la loi de finances pour 2011.

Reste un espoir : la mission confiée à Bérengère Poletti sur la situation financière des services d’aide à domicile et dont le rapport – attendu pour fin septembre – doit proposer des modalités de soutien au secteur et définir de nouvelles règles de tarification des services.

« Piliers » de la prise en charge de la perte d’autonomie, les conseils généraux se disent, de leur côté, « désemparés », selon l’ADF (Assemblée des départements de France) (3). Ils ne disposent « plus aujourd’hui des moyens suffisants pour faire face au désengagement continu de l’Etat dans le financement des allocations individuelles de solidarité dont l’APA ». Claudy Lebreton, président de l’ADF, prévient : « dans la perspective de la préparation du budget 2012, nous allons maintenir la pression sur le Premier ministre ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2719 du 22-07-11, p. 33.

(2) Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 45.

(3) L’ADF a formulé une cinquantaine de propositions très concrètes dans le cadre du débat sur la perte d’autonomie – Voir ASH n° 2718 du 15-07-11, p. 30.

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