Transformer un service hospitalier en une structure d’hébergement médico-sociale, ce qui s’appelle une conversion, reste trop rare. C’est ce que montre un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) (1), qui précise pourtant que l’utilité de ces opérations, en particulier en faveur des personnes âgées, fait consensus. Leur objectif est double : contribuer à adapter l’offre aux besoins de prise en charge et améliorer l’efficience hospitalière en réduisant la capacité des établissements de santé. Après avoir examiné dix opérations de ce type, la mission constate que les conversions réelles (2) ne concernent que quelques redéploiements de services de psychiatrie et de soins de suite et de réadaptation vers les structures pour personnes handicapées. En faveur des personnes âgées, la majorité des expériences de transferts de lits du sanitaire vers le médico-social s’opère au titre de la réforme des unités de soins de longue durée, ce qui ne constitue pas à proprement parler une conversion de structure. Ainsi, alors que « le discours officiel met en avant l’intérêt de renforcer l’offre pour personnes âgées, aucune opération de ce type n’a été constatée au cours de cette enquête », soulignent les auteurs.
Pour expliquer ce phénomène, la mission a identifié trois freins. Le premier est le cloisonnement institutionnel et culturel, qui éloigne les autorités régulatrices et les opérateurs des deux secteurs (sanitaire et médico-social). Deuxième obstacle : la priorité donnée par les hôpitaux aux conversions intrasanitaires. Enfin, l’effet financier massif des plans nationaux (Alzheimer, Solidarité grand âge) qui ont soutenu le développement de l’offre médico-sociale a contribué à faire l’économie des conversions. Sur le terrain, l’une des difficultés réside dans le financement de la nouvelle activité qui est alors soumise à une double tarification. « La nature du dialogue entre l’Etat et le conseil général est donc centrale dans cette gestion qui conduit le plus souvent, de fait, à accroître la dépense et le nombre des emplois », précisent les auteurs. Dernier défi à relever pour mener une conversion : celui de passer d’un lieu de soin à un lieu de vie, ce qui implique l’adaptation des emplois et des compétences, la création d’un fonctionnement nouveau, et nécessite une démarche managériale de longue haleine.
Si les obstacles sont nombreux, l’IGAS considère que la loi « hôpital, patients, santé et territoires » (HPST), dont l’une des ambitions est d’articuler les secteurs sanitaire et médico-social, présente « une réelle opportunité pour relancer les conversions ». Elle recommande donc d’impulser une politique de conversion ciblée sur les territoires où se rencontrent simultanément la nécessité de réduire les capacités hospitalières et le besoin d’augmenter l’offre en hébergement pour personnes âgées. Pour accompagner cette stratégie, la mission propose, en premier lieu, d’améliorer la connaissance des conversions en organisant notamment leur traçabilité et leur évaluation au niveau régional et national. Elle suggère aussi d’utiliser pleinement les outils mis en place par la loi HPST (commission de coordination pour la prise en charge et l’accompagnement médico-social afin de faciliter le dialogue avec les conseils généraux notamment) et de garantir que les appels à projets médico-sociaux soient ouverts aux conversions hospitalières. Au niveau central, elle invite les acteurs impliqués dans la prise en charge des personnes âgées (caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux [ANAP], direction générale de la cohésion sociale…) à élaborer ensemble une stratégie de conversion formalisée par le comité de pilotage des agences régionales de santé. L’ANAP pourrait ainsi fabriquer des référentiels méthodologiques. Autre piste : étudier le rapprochement des filières de formation et de carrière des directeurs d’hôpitaux et d’établissements médico-sociaux.
Dans une enquête sur « l’impact des modes d’organisation sur la prise en charge du grand âge » (3), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), démontre, à partir d’expériences de terrain, qu’une organisation coordonnée au sein de l’hôpital et entre les acteurs médico-sociaux permet d’améliorer la prise en charge globale des personnes âgées (4). Parmi ses recommandations, la mission suggère de faciliter l’organisation de parcours de soins coordonnés en s’appuyant sur les agences régionales de santé dont les compétences ont été élargies aux secteurs médico-social et ambulatoire. Elle propose, par ailleurs, d’ouvrir l’hôpital sur son environnement, en inscrivant notamment dans son projet d’établissement sa participation aux réseaux gérontologiques. Pour améliorer la fluidité des dispositifs de prise en charge, le rapport préconise l’élargissement des publics accompagnés par « les gestionnaires de cas » au-delà des seules personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer. Il recommande également l’organisation de l’hébergement temporaire, solution d’aval du parcours hospitalier. Enfin, il suggère de généraliser une bonne pratique : un numéro d’appel téléphonique réservé aux médecins traitants et aux médecins coordonnateurs d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes dans les hôpitaux disposant d’une filière gériatrique afin de faciliter les échanges avec les médecins hospitaliers.
Plus d’infos sur
(1) « Conversions des structures hospitalières en structures médico-sociales » – Disp. sur
(2) La conversion suppose non seulement la modification du statut juridique et financier (sanitaire vers médico-social) du service mais également l’octroi d’une autorisation d’activité différente ainsi qu’un changement dans la nature du service rendu aux usagers de la structure.
(3) Disp. sur
(4) Ce rapport fait écho aux recommandations de l’un des groupes de travail sur la dépendance qui préconisait, en juin dernier, d’assurer la mise en place d’un parcours global et coordonné autour de la personne âgée Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 53.