La prévention de la délinquance se situe au premier rang des priorités d’action du gouvernement. C’est en tout cas ce qu’affirment les ministres de l’Intérieur et de la Justice dans une note interministérielle dans laquelle ils appellent les préfets à intensifier leurs actions dans ce domaine quatre ans après l’adoption de la loi du 5 mars 2007 (1) et alors que le plan national arrêté le 2 octobre 2009 (2) est arrivé à mi-parcours (voir dans ce numéro la réaction de Virginie Gautron, maître de conférences à la faculté de droit de Nantes, page 28). L’occasion pour les ministres de clarifier le champ et la nature de la politique de prévention de la délinquance, « qui ont profondément évolué ».
Pour Claude Guéant et Michel Mercier, en effet, cette politique « s’est éloignée de l’approche exclusivement socio-éducative d’origine » et « s’est enrichie en intégrant ces dernières années les différents apports de l’approche situationnelle et dissuasive, et ceux des démarches plus individualisées de repérage et de traitement des problèmes en amont, en réponse aux rapides évolutions de la délinquance ». Ainsi, « elle se fixe pour objectif que soient apportées, au plan local, des réponses immédiates et graduées à tout signalement de comportement incivil, pour éviter le basculement progressif dans la délinquance ».
Aux yeux des ministres, la politique de prévention de la délinquance trouve dorénavant sa singularité dans les domaines d’intervention suivants :
la prévention de la délinquance des mineurs en général (actions ciblées sur des publics vulnérables et des situations spécifiques, alternatives aux poursuites, réparation pénale des mineurs, etc.) ;
la lutte contre les incivilités et les troubles à la tranquillité publique (patrouilles des forces de sécurité, prévention des conflits par des intervenants spécialisés, rappel à l’ordre, etc.) ;
la prévention et la lutte contre la violence à l’école (mobilisation des communautés scolaires sur le sujet, lutte contre l’absentéisme scolaire, implication des parents, etc.) ;
la responsabilisation des parents (conseils des droits et devoirs des familles, contrat de responsabilité parentale, stages de responsabilité parentale, etc.) ;
la « prévention situationnelle » (études de sécurité publique, diagnostics de sécurité, rénovation urbaine, logement, etc.) ;
la vidéoprotection ;
la prévention de la récidive (préparation et accompagnement des sorties de prison, points d’accès au droit en établissement pénitentiaire, mesures d’éloignement de certains délinquants, géolocalisation par bracelet électronique, alternatives à l’incarcération, actions d’insertion professionnelle en faveur des jeunes sous main de justice, etc.) ;
la lutte contre les violences intrafamiliales et l’accueil des victimes (bureaux d’aide aux victimes, intervenants sociaux et psychologues en commissariat de police et en unité de gendarmerie, etc.).
Et les ministres d’enfoncer le clou : « ainsi, la politique de prévention de la délinquance s’inscrit désormais dans le registre de la politique de sécurité, en relation avec la politique pénale ». « Son objectif est d’empêcher que des actes délinquants soient commis, et c’est à l’aune de ses résultats à cet égard que son efficacité doit être mesurée. » Claude Guéant et Michel Mercier souhaitent que les services de l’Etat – à l’image, selon eux, de nombreux maires – s’inscrivent dans une telle approche et ne cultivent, « même involontairement », aucune ambiguïté.
Plus globalement, ils demandent aux préfets de s’assurer de la mise en œuvre des dispositions obligatoires de la loi du 5 mars 2007, récemment complétées par la loi du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (3). Ils souhaitent également que tous les acteurs institutionnels concernés – préfets, présidents de conseils généraux, maires, parquets – intensifient leur coopération en matière de prévention de la délinquance, mettant notamment l’accent sur le partage de l’information et incitant la police et les parquets à davantage communiquer vers les maires.