Les gens du voyage sont soumis à une législation ancienne leur imposant un régime d’exception critiqué de longue date par de nombreuses voix et que le gouvernement souhaite aujourd’hui « rénover et assouplir ». En mars dernier, le Premier ministre a ainsi missionné, dans cette optique, un bon connaisseur du dossier, le sénateur (UMP) de la Haute-Savoie et président de la Commission nationale consultative des gens du voyage, Pierre Hérisson, afin qu’il lui fasse des propositions. Le parlementaire lui a remis son rapport le 28 juillet (1). Ses propositions s’inscrivent dans la droite ligne de celles émises il y a quelques mois par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’accueil et l’habitat des gens du voyage (2).
François Fillon souhaitait que le sénateur réévalue en particulier l’intérêt de deux règles posées par la loi du 3 janvier 1969, qui définit le régime applicable aux « personnes circulant en France sans domicile ni résidence » :
l’obligation faite à cette population de détenir un titre de circulation, c’est-à-dire, selon les cas, un livret spécial de circulation, un livret de circulation ou un carnet de circulation (ce dernier titre imposant, en plus, à ses possesseurs de le faire viser régulièrement par les autorités), d’une part ;
la règle imposant aux gens du voyage une présence dans une commune pendant au moins trois ans pour pouvoir s’inscrire sur la liste électorale de cette ville, d’autre part.
Pierre Hérisson préconise en premier lieu la suppression des titres de circulation. S’agissant de leur éventuel remplacement, le parlementaire ne juge pas « totalement convaincante » la solution proposée par la mission d’information de l’Assemblée nationale de remplacer ces titres par une carte de « résident itinérant ». « Il est en effet paradoxal de proposer la suppression des titres de circulation pour aussitôt rétablir une nouvelle “carte de résident” alors même que les gens du voyage disposent de la faculté de se voir délivrer une carte nationale d’identité à l’identique de l’ensemble des personnes de nationalité française », estime-t-il. Le sénateur propose à la place la délivrance d’un simple récépissé attestant du choix de la commune de rattachement. « Ce récépissé, explique-t-il, témoignerait à lui seul de la qualité de gens du voyage, sans créer de nouveau titre susceptible d’apparaître comme instaurant une discrimination à leur encontre. » En outre, ce document permettrait aux intéressés de justifier de leur qualité auprès des gestionnaires des aires d’accueil et d’accéder ainsi à ces lieux.
Le parlementaire suggère encore de délivrer aux gens du voyage une carte nationale d’identité avec mention de l’adresse de la mairie de rattachement, d’un centre communal d’action sociale, d’une association agréée voire de celle indiquée dans un bail locatif (et non plus avec la seule mention du nom de la commune).
En ce qui concerne la question du droit de vote, le sénateur estime que le régime dérogatoire imposé aux gens du voyage « n’apparaît plus justifié aujourd’hui » et plaide donc également, à l’image de la mission d’information, pour sa suppression. Il propose d’aligner les gens du voyage sur le régime de droit commun, qui exige pour pouvoir s’inscrire sur la liste électorale « un domicile réel ou une habitation dans la commune depuis au moins six mois ».
Elargissant l’objet de sa mission à d’autres sujets de préoccupation « à prendre en considération », Pierre Hérisson émet également des recommandations sur les aires de stationnement, les terrains familiaux, la scolarisation des enfants du voyage, l’accès aux assurances ou bien encore la gouvernance de la politique publique en faveur des gens du voyage. Il propose aussi, plus globalement, de restructurer le droit applicable à cette population autour d’une loi unique, par une mise à jour de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage. Ce texte serait complété des dispositions de la loi du 3 janvier 1969 « qui demeurent utiles ».
Disponible dans la docuthèque, rubrique « infos pratiques », sur
(1) Gens du voyage : pour un statut proche du droit commun – Pierre Hérisson – juillet 2011.