Si le Conseil constitutionnel a partiellement censuré les dispositions de la loi Paul Blanc visant à assouplir les exigences fixées pour les constructions neuves (voir ce numéro, page 6), l’idée d’introduire des dérogations aux règles fixées par la loi « handicap » de 2005 en matière d’accessibilité est toujours vivace. Le 4 août dernier, une proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales a en effet été déposée au Sénat (1). Ce texte, que le président de la Haute Assemblée vient de soumettre au Conseil d’Etat et qui doit être examiné en octobre, autoriserait le préfet à octroyer deux types de dérogations aux établissements recevant du public, privés comme publics. La première serait accordée en cas d’impossibilité technique démontrée de procéder à la mise en accessibilité ou lorsque le maître d’ouvrage se trouve en présence de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural. La seconde – qui fait bondir l’Association des paralysés de France (APF) – s’appliquerait « en cas de disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences, au regard notamment du coût induit par la mise en accessibilité et la capacité financière du propriétaire de l’établissement ». Alors qu’en 2005, lors du débat sur la loi « handicap », les parlementaires avaient choisi de ne pas lier l’octroi de dérogations à des considérations financières, avec ce nouveau texte, un commerçant serait en droit d’invoquer ses difficultés de trésorerie pour ne pas être obligé de rendre accessible sa boutique. De même « une commune pourrait très bien dire : “je n’ai pas les moyens de rendre mes locaux accessibles” », explique Patrice Tripoteau, directeur du pôle « actions nationales » de l’APF. Autre point noir pour l’association : le préfet ne serait pas obligé de suivre l’avis de la commission départementale consultative de la protection civile, de la sécurité et de l’accessibilité comme c’est le cas actuellement. L’association juge par ailleurs insuffisant le fait que celui-ci soit obligé de prescrire des mesures de substitution de manière à garantir l’accès aux prestations et services délivrés par l’établissement, y voyant un traitement particulier pour les personnes handicapées et une atteinte au principe d’égalité des citoyens. Au final, avec ce texte, « la loi du 11 février 2005 perd toute sa force contraignante », juge l’APF, qui prévoit de se mobiliser le 27 septembre prochain contre ces « attaques répétées » contre le principe d’accessibilité. Elle souhaite que l’appui aux collectivités locales pour la mise en accessibilité de leurs équipements publics s’inscrive dans l’élaboration d’un plan pluriannuel financier et non dans des dispositions d’une proposition de loi relative à la simplification des normes.
De son côté, la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, a indiqué, le 23 août, lors d’un déplacement sur une plage d’Antibes (Alpes-Maritimes) aménagée pour les personnes handicapées, que « l’échéance de 2015 d’accessibilité pour tous les lieux publics n’est pas négociable » et qu’« il n’y aura pas de dérogations ».
(1) Rédigée par Eric Doligé, sénateur (UMP), cette proposition est issue du rapport très contesté par l’APF et la Fédération des APAJH, sur la simplification des normes applicables aux collectivités locales – Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 28.