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« Il ne faut pas de mesures spécifiques pour les Roms »

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Le 30 juillet 2010, Nicolas Sarkozy prononçait, à Grenoble, un discours stigmatisant les Roms et annonçait une vaste campagne de démantèlement des campements « illicites » (1). Un an après, Michèle Mézard, membre du comité technique de Romeurope et bénévole à Médecins du Monde, fait le point sur la situation des Roms en France et les conséquences des politiques « anti-Roms ».

Quelles ont été les conséquences du discours de Grenoble ?

La communication menée par le gouvernement n’a conduit qu’à rendre plus visibles des expulsions qui, en réalité, s’inscrivent dans la continuité d’une politique mise en place depuis plusieurs années. Le ministère de l’Intérieur a annoncé qu’il allait démanteler la moitié des 539 campements. Qu’est-ce qui est pris en compte dans ce chiffre ?

Il peut s’agir d’expulsions d’une ou deux familles de Roms par-ci par-là ou même de gens du voyage… Cette politique de démantèlement n’est, de toute façon, pas applicable dans la mesure où les personnes s’installent systématiquement ailleurs, ce qui in fine multiplie le nombre de bidonvilles.

Elle n’est pas humaine non plus: on met quand même des malades, des enfants, des femmes enceintes à la rue ! Si le discours de Nicolas Sarkozy a renforcé la stigmatisation dont souffrait déjà cette population, il a aussi entraîné des réactions positives. Des citoyens et des élus territoriaux ont monté des comités de soutien et des projets d’insertion commencent à se développer.

Comment vivent les Roms aujourd’hui ?

Dans des conditions de plus en plus précaires. Non seulement ils vivent dans un climat de peur, alimenté par des intimidations répétées, des procédures administratives de reconduite à la frontière irrégulières, des gardes à vue non justifiées… mais les déplacements engendrent aussi descrises sanitaires. Comment suivre les malades tuberculeux qui sont expulsés ? Comment assurer une vaccination correcte ? C’est un problème de santé publique ! Nous demandons des mesures sanitaires d’urgence et un accès à l’eau courante dans leurs lieux de vie. L’autre problématique est la rupture de scolarisation pour 7 000 enfants rom. Comment bâtir un avenir si on ne va pas à l’école ?

Quelles sont vos revendications ?

Avant tout, nous demandons la suppression des mesures transitoires, valables jusqu’à fin 2013, qui empêchent les Roms d’avoir accès au travail. Certes, le taux de chômage en France est élevé mais les 3 000 Roms qui cherchent un emploi s’intéressent particulièrement aux secteurs où il y a un manque de main-d’œuvre… On a beau mettre les gens à l’abri, si on ne leur permet pas l’accès au travail, il leur est impossible de s’insérer. Les Roms migrants sont en majorité originaires de Roumanie et de Bulgarie et doivent donc bénéficier des mêmes droits que les autres ressortissants européens. C’est pour cela que nous nous interrogeons lorsque le Parlement européen demande aux Etats de prendre des mesures spécifiques visant à préserver les Roms (2). Celles-ci sont probablement intéressantes pour les pays qui reconnaissent les minorités, mais en France le droit commun doit être la règle. Un droit effectif au travail entraînerait un droit au séjour, un droit au logement, un droit à la couverture maladie et aux prestations sociales, donc une réelle insertion dans notre vie économique.

Vous demandez également l’arrêt de l’aide au retour…

Pour Romeurope, celle-ci ne sert à rien puisque les personnes reviennent systématiquement, tout simplement parce qu’elles ont un projet de vie en France.

Ce dispositif a même un effet néfaste car certains Roms arrivent sur le territoire attirés par cette aide ! Malgré la politique d’expulsion, la distribution massive d’obligations de quitter le territoire et les aides au retour, le nombre de Roms migrants reste stable, autour de 15 000 à 20 000 personnes. Si l’Etat proposait une vraie politique d’accueil, en utilisant par exemple l’argent mis dans l’aide au retour, cela n’augmenterait pas le nombre de migrants mais changerait considérable­ment leurs conditions de vie.

Notes

(1) Voir ASH n° 2670 du 20-08-10, p. 28.

(2) Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 17.

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