Dans une volumineuse circulaire, la chancellerie précise les dispositions de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, qui prévoit notamment le droit pour le mis en cause de se taire et d’être assisté par un avocat pendant toute la procédure (1). Des dispositions qui s’appliquent depuis le 15 avril dernier (2).
Une personne ne peut être mise en garde à vue (24 heures, renouvelables) que s’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. A défaut, précise la circulaire, l’audition de cette personne ne saurait excéder quatre heures continues. Celle-ci peut être entendue plusieurs fois – quatre heures au maximum à chaque fois – si les nécessités de l’enquête l’exigent et si l’intéressé a quitté librement les locaux de police ou de gendarmerie au terme de son audition, après avoir été convoqué pour une audition ultérieure. Ces dispositions s’appliquent aussi lorsque la personne à l’encontre de laquelle il n’existe aucune raison plausible de la soupçonner a été contrainte de comparaître par la force publique. « Tel sera le cas du témoin qui n’aura pas répondu à une convocation à comparaître ou dont on pourra craindre qu’il ne réponde pas à une telle convocation », illustre le ministère de la Justice. En revanche, insiste-t-il, la personne à l’encontre de laquelle il n’existe aucune raison plausible de la soupçonner peut être entendue plus de quatre heures dès lors qu’elle confirme comparaître librement et qu’elle a été informée par l’officier ou l’agent de police (OPJ) qu’elle peut à tout moment quitter les locaux de police ou de gendarmerie.
Par ailleurs, le ministre de la Justice demande que les gardes à vue soient décidées au cas par cas. Il invite donc ses services à informer les OPJ des « critères qui, sous réserve de leur appréciation des circonstances propres à chaque affaire, devraient le plus souvent les conduire à considérer que la garde à vue n’est pas nécessaire ». Ces critères peuvent tout d’abord tenir à la personne. En effet, la circulaire indique que l’intéressé peut présenter des « garanties dont le constat pourra conduire à ne pas décider un placement en garde à vue ». Tel est le cas lorsque l’identité et/ou le domicile de la personne sont connus de l’OPJ ou vérifiés, qu’elle n’a pas d’antécédents connus ou que le risque de réitération immédiate des faits peut raisonnablement être écarté. Ces critères peuvent aussi tenir à la gravité des faits. En effet, explique l’administration, « certaines infractions ne nécessitent pas d’investigations impliquant la présence ou la participation immédiate et continue de la personne et n’aboutissent qu’exceptionnellement à une présentation devant le procureur de la République », comme, par exemple, les abandons de famille et les non-représentations d’enfants. Dans ce cas, une convocation doit être remise à la personne pour une audition ultérieure.
La loi réformant la garde à vue a renforcé les droits des mis en cause. En pratique, ces derniers doivent désormais être immédiatement informés de l’infraction. Toutefois, précise la circulaire, « l’information sur la nature de l’infraction n’impose pas d’indiquer à la personne gardée à vue le détail des faits qu’elle est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre, mais de l’aviser de la qualification juridique de l’infraction, telle qu’elle peut être appréciée à ce stade de l’enquête ». La date présumée de l’infraction doit aussi être communiquée à la personne gardée à vue, ce qui doit lui permettre de faire référence à une date ou à une période de temps, telle qu’elle peut être appréciée à ce stade de l’enquête. « Bien évidemment, souligne la chancellerie, une date imprécise notifiée à ce stade de la procédure ne saurait faire grief à la personne, dès lors qu’elle résultait des éléments de la procédure au moment du placement en garde à vue. » Autre droit à mettre œuvre : celui d’être informé des suites de la procédure, quelle que soit l’issue de la garde à vue pour la personne qui en a fait l’objet. Ces diligences, qui incombent aux enquêteurs, doivent être accomplies au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a exprimé la volonté de connaître ces informations et non plus à compter du placement en garde à vue.
La chancellerie indique que les déclarations de culpabilité d’une personne n’ont aucune valeur si cette dernière n’a pas pu s’entretenir avec son avocat ni être assistée par lui, que ces déclarations aient été faites au stade de l’enquête, de l’instruction ou du jugement. Plus précisément, explique-t-elle, « la loi ne limite pas la force probante de toutes les déclarations faites par une personne qui ne s’est pas entretenue avec un avocat ou qui n’a pas été assistée d’un avocat, mais uniquement la force probante des déclarations faites par une personne sans que celle-ci ait pu bénéficié de cette assistance ». Ainsi, ce principe ne s’applique pas :
si la personne, alors qu’elle avait juridiquement la possibilité de s’entretenir avec son avocat et de bénéficier de son assistance durant l’audition, n’a pas souhaité utiliser ce droit ;
aux déclarations faites, en présence ou non d’un avocat, au cours de l’instruction ou d’une audience de jugement par le mis en examen, le témoin assisté, le prévenu ou l’accusé, puisque cette personne avait la possibilité d’être assistée par un avocat ;
aux déclarations faites par un mis en cause au cours d’une garde à vue qui soit a pu s’entretenir avec un avocat et être assisté par celui-ci durant l’audition, soit a renoncé à bénéficier de ce droit.
En tout état de cause, les aveux de culpabilité sans avoir pu être assisté d’un avocat n’entraînent pas forcément la nullité de la procédure. La chancellerie indique en outre que « les déclarations incriminantes de la personne faites sans avocat, même corroborées par d’autres éléments, ne pourront pas constituer le principal fondement de la condamnation. La juridiction prononçant la condamnation doit en effet avoir été principalement convaincue par les autres éléments à charge. »