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Un nouveau droit d’accès aux lieux de rétention est ouvert aux associations humanitaires

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La France n’est désormais plus en infraction avec la législation européenne en matière d’accès des associations humanitaires aux lieux de rétention. Afin de se conformer à la directive européenne 2008/115/CE du 16 décembre 2008 – dite « directive retour » –, le législateur a, en effet, consacré l’existence de ce droit au travers de la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité (1). Laquelle a complété l’article L. 553-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile relatif au contrôle des conditions de rétention par le procureur de la République, en renvoyant à un décret le soin d’en déterminer les conditions d’exercice. Ce décret vient de paraître.

Un nouveau type de contrôle

Jusqu’alors, la réglementation française prévoyait simplement la présence, dans chaque centre de rétention, d’une seule association, sur la base d’une convention passée avec l’Etat et ce, pour permettre l’exercice par les étrangers des droits qui leur sont reconnus (accueil, information, soutien, aide à l’exercice de leurs droits). Depuis 2010, cette présence est assumée par cinq associations réparties dans les différents centres de rétention de France (2). Or cette organisation ne satisfaisait pas complètement les exigences de la « directive retour », qui prévoit que les organisations et instances nationales, internationales et non gouvernementales compétentes ont la possibilité de « visiter » les centres de rétention, indépendamment donc de toute mission d’information ou d’assistance aux étrangers.

L’accès désormais consacré par la loi se veut donc, à cet égard, plus conforme à la législation européenne. « Il ne s’agit pas ici des associations chargées de l’assistance juridique aux étrangers, qui exercent une permanence dans les centres de rétention, mais d’observateurs extérieurs qui pourront exercer un nouveau type de contrôle sur les conditions de vie des étrangers en rétention », expliquait ainsi le rapporteur (UMP) de la loi au Sénat, François-Noël Buffet, au cours des débats (3).

Le décret précise que cet accès ne doit pas entraver le fonctionnement du lieu de rétention et les activités qu’y exercent les services de l’Etat et les associations chargées de l’assistance juridique aux étrangers. Il doit, en outre, s’exercer « dans le respect des opinions politiques, philosophiques ou religieuses des étrangers retenus ».

Un accès sous conditions

Le décret détaille les conditions d’habilitation des associations humanitaires ainsi que les modalités d’autorisation des visites. Il revient ainsi au ministre chargé de l’immigration de fixer la liste des associations habilitées à proposer des représentants en vue de visiter les lieux de rétention.

L’habilitation ne peut être sollicitée que par des associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq années et proposant par leurs statuts la défense des étrangers, la défense des droits de l’Homme ou l’assistance médicale et sociale. Précision importante : elle ne peut pas être sollicitée par les associations chargées – par convention – de l’assistance juridique aux étrangers retenus. Tout refus d’habilitation doit être motivé « au regard notamment du nombre d’associations déjà habilitées ». Le cas échéant, l’habilitation est accordée pour une durée de trois ans et est renouvelable une fois pour la même durée. Le décret offre toutefois au ministre chargé de l’immigration la possibilité de la retirer, par décision motivée.

L’accès des représentants des associations habilitées à visiter les lieux de rétention est lui-même subordonné à un agrément individuel accordé pour une durée de un an par ce même ministre. Renouvelable, cet agrément peut être accordé à cinq personnes par association. Il entraîne la délivrance d’une carte nominative permettant d’obtenir, lors de chaque visite, une autorisation d’accès au lieu de rétention. Une même personne ne peut recevoir qu’un agrément. En outre, le ministre chargé de l’immigration peut retirer ce dernier à tout moment, par décision motivée. Enfin, l’agrément est retiré sur demande de celle-ci ou lorsque l’habilitation de l’association a été retirée ou a expiré.

Les modalités du droit de visite

Les représentants agréés d’une association peuvent s’entretenir avec le chef de centre ou le responsable du local de rétention et, lorsqu’ils sont présents, avec les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration ainsi qu’avec les représentants agréés des associations chargées de l’assistance juridique aux étrangers retenus.

Par ailleurs, l’autorisation de s’entretenir confidentiellement avec les personnes retenues ne peut leur être refusée que si cet entretien est de nature à entraver le fonctionnement du lieu de rétention ou les activités qu’y exercent les services de l’Etat et les associations chargées de l’assistance juridique aux étrangers.

Autre précision : les représentants de plusieurs associations habilitées ne peuvent accéder le même jour au même lieu de rétention. Et lorsque les représentants agréés d’une association exercent leur droit de visite, ils doivent informer au préalable au moins 24 heures à l’avance le chef de centre ou le responsable du local de rétention afin de convenir avec lui des modalités pratiques de leur visite.

Enfin, le décret prévoit qu’une réunion doit être organisée chaque année sur le fonctionnement des lieux de rétention à l’initiative du ministre chargé de l’immigration, avec les présidents des associations habilitées, leurs représentants agréés et les services de l’Etat concernés. Le compte rendu de cette réunion, établi conjointement, doit être rendu public.

[Décret n° 2011-820 du 8 juillet 2011, J.O. du 9-07-11]
Notes

(1) Voir ASH n° 2710 du 20-05-11, p. 5.

(2) Voir notamment ASH n° 2642 du 15-01-10, p. 18.

(3) Rap. Sén. n° 239, tome I, Buffet, janvier 2011, p. 162.

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