L’enfance n’est pas forcément l’âge de l’insouciance. En tout cas, pas pour Nabisouberne. Quand son père est mort, alors que sa mère ne peut plus subvenir à ses besoins, elle est placée à la « Casse » – « non, à la DDASS », corrige l’assistante sociale. « Plus jamais ça ! », s’écrit cette petite fille sans âge en se souvenant des coups de bâton de sa famille d’accueil : « une petite mère », selon sa mère, quand Nabisouberne s’occupe de ses autres enfants ; « une femme », pour son beau-père, quand il lui chuchote des mots sales ; « une gamine », pour les copines, puisqu’elle n’a pas de seins ; « une adulte », selon les tests scolaires et un QI très au-dessus de la moyenne. « Plus jamais »… vivre séparée de sa mère, qu’elle a en adoration mais qui l’emprisonne dans une relation malsaine – « J’ai eu mon premier enfant à six ans. Cadeau de ma mère qui me donne même ce qui est à elle. Elle dit que la fille du coiffeur a une poupée qui pleure, eh bien, moi c’est pareil. » L’enfance malheureuse, l’auteure Catherine Enjolet connaît : les années difficiles qu’elle décrit dans Sous silence ressemblent à celles qu’elle a vécues. Elles lui auront au moins permis de développer un talent pour l’écriture. De cette drôle de vie dont elle assure être aujourd’hui résiliente, de cette jeunesse sous silence dans une « cour des miracles » au cœur de Paris, cette enseignante en lettres a notamment su tirer l’énergie de créer l’association Parrains par mille, qui favorise le parrainage de proximité.
Sous silence – Catherine Enjolet – Ed. Phébus – 10 €