Le 23 juin dernier, l’assemblée générale extraordinaire de l’Unaforis (Union nationale des associations de formation et de recherche en intervention sociale) a voté à l’unanimité ses nouveaux statuts. Après plus de deux ans d’existence et conformément au premier objectif qu’elle s’était fixé, l’association, qui fédérait jusqu’ici l’Aforts (Association française des organismes de formation et de recherche en travail social) et le GNI (Groupement national des instituts régionaux du travail social), devient un réseau national unique des centres de formation.
Si cette décision politique, qui marque l’achèvement du lent processus conduisant à une représentation unitaire de l’appareil de formation, constitue un tournant historique, on ne pourra toutefois en mesurer pleinement la portée que dans sept mois. C’est en effet le 26 janvier 2012, lors de la première assemblée générale de la nouvelle Unaforis, que l’on saura si celle-ci a fait le plein des voix des adhérents de l’Aforts et du GNI – qui ont prévu de se dissoudre au dernier trimestre 2011.
Certes, après l’approbation des nouveaux statuts au sein de chaque organisation – à l’unanimité pour le GNI et à 67 % pour l’Aforts (1) –, il semble peu probable que certains centres préfèrent rester à l’extérieur. Toutefois les quelques abstentions (18 %) et avis négatifs (15 %) qui se sont exprimés au sein de l’Aforts montrent bien qu’il y a encore des interrogations, voire des réserves. Si personne ne conteste la création d’un réseau unique, devenu nécessaire du fait des transformations de l’environnement et de la compétitivité accrue, la mise en place des « plateformes régionales » puis des hautes écoles professionnelles en action sociale et de santé (HEPASS) suscite toujours des inquiétudes, notamment des centres les moins importants. « Des craintes légitimes, c’est pour cela qu’on avance pas à pas », explique Jean-Michel Godet, secrétaire de l’Unaforis et secrétaire général du GNI. Et d’ajouter qu’il y a déjà eu un important travail en commun des deux réseaux pour parvenir à coconstruire les nouveaux statuts.
Tout l’enjeu pour le conseil d’administration provisoire – où sont représentées à égalité les deux organisations (2) – et le nouveau bureau (3), mis en place pour la période transitoire de sept mois, va donc être de poursuivre dans la même voie. « Avec la volonté d’avancer tout en apportant des garanties aux centres que leur identité et leur diversité seront préservées. Sachant que bon nombre d’inquiétudes et de fantasmes viennent d’un manque d’informations », affirme Manuel Pélissié, trésorier adjoint de l’Unaforis et trésorier du GNI. Nous avons posé le cadre. Il nous faut désormais parvenir à marier les cultures des deux réseaux pour faire émerger une culture Unaforis. »
Attention toutefois « à ne pas aller trop vite et à ne pas de brûler les étapes, auquel cas tout le monde ne pourra pas suivre, nuance Christian Chassériaud, vice-président de l’Unaforis et président de l’Aforts. On se met en état de marche pour les 30 ans qui viennent, il ne s’agit pas d’échouer. » Sa prudence s’explique bien évidemment par la diversité du réseau Aforts, qui, à l’inverse du GNI (qui compte 22 instituts régionaux de travail social ou centres multifilières), doit composer avec 130 centres de formation de taille très différente. Elle est toutefois tempérée par le pragmatisme de Chantal Cornier, membre du conseil d’administration provisoire et vice-présidente de l’Aforts, qui souligne que les enjeux sont suffisamment importants « pour tirer les établissements en avant et leur permettre de dépasser leurs divergences ».
Mais, au-delà des discours, c’est dans l’action que l’on pourra juger de la dynamique du nouveau réseau et de sa force d’entraînement et de mobilisation. Sachant qu’outre l’élaboration du réglement intérieur et la préparation des instances définitives, la priorité pour le conseil d’administration provisoire concerne la mise en place des « plateformes régionales », puis des HEPASS.
C’est, en effet, l’un des projets phares de l’Unaforis destiné à renforcer l’ancrage des formations sociales dans l’enseignement supérieur tout en maintenant leur vocation promotionnelle. Outre qu’il suscite déjà des dynamiques de coopération dans bon nombre de régions (Bretagne, PACA, Languedoc-Roussillon, Aquitaine, Rhône-Alpes, Auvergne…), il a été approuvé par le Conseil supérieur du travail social et retenu par le ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale dans son document préparatoire sur les « Orientations pour les formations sociales 2011-2013 », au même titre d’ailleurs que le développement des activités de recherche (4). Les réflexions sur ce chantier sont déjà bien avancées puisqu’un cahier des charges devrait être validé le 9 septembre prochain : il définira sur quelles bases les centres peuvent se mettre en réseau et mutualiser certaines fonctions, et fixera un calendrier indicatif. L’objectif est de parvenir à la mise en place de la procédure de labellisation par l’Unaforis dès le second semestre 2011 et à la création des premières plateformes au premier semestre 2012 ou même avant.
« Il ne s’agira surtout pas d’un carcan, mais d’un mode d’emploi assez souple, tient à préciser Pierre Gauthier, président de l’Unaforis, qui juge infondées les inquiétudes de certains centres sur la gouvernance de ces structures et la marge de manœuvre qui leur sera laissée. L’initiative partira, non pas du niveau national, mais des établissements de la région. Tous les centres seront invités à rejoindre la plateforme, qui se fera sur la base du volontariat et s’adaptera au rythme de chacun : elle pourra commencer avec les établissements qui sont prêts et être rejointe plus tard par d’autres. » Quid néanmoins de l’autonomie des centres dans ce nouveau modèle ? Elle sera sauvegardée, assure Pierre Gauthier : « Les plateformes régionales ne seront pas intégratives mais fédératives. »
Quant au montage des futures HEPASS que l’Unaforis souhaite pouvoir commencer à créer dès 2013, les discussions sont engagées avec les pouvoirs publics. Selon Pierre Gauthier, Sabine Fourcade, directrice générale de la cohésion sociale, a proposé de confier une mission d’appui aux inspections générales des affaires sociales et de l’administration de l’Education nationale pour définir le statut de ces organisations.
L’ autre projet phare de l’Unaforis concerne la simplification de l’architecture des diplômes afin de rendre ceux-ci plus lisibles et de faciliter la mobilité des professionnels dans l’Union européenne. Si la direction générale de la cohésion sociale estime nécessaire au préalable d’évaluer les effets de la « réingénierie » des diplômes, Pierre Gauthier entend néanmoins reprendre le groupe de travail pour affiner les premières propositions centrées sur le regroupement des formations sociales autour de trois champs d’activité – l’animation sociale, la cohésion sociale et l’éducation – et la mise en place de troncs communs.
Un programme donc bien chargé pour la nouvelle Unaforis, que son président justifie par l’objectif final « de valoriser les formations sociales et le travail social ».
La nouvelle architecture de l’Unaforis, qui sera mise en place à compter du 26 janvier 2012, se veut « pluraliste et équilibrée », selon Pierre Gauthier, son président. Structurée sur une base régionale, elle s’appuie sur :
un système de représentation des centres de formation pondéré en fonction de l’éventail de leur offre de formation : chaque personne morale adhérente dispose d’une voix plus une voix par formation effectivement mise en œuvre ;
un conseil d’administration composé de trois collèges :
– celui des « territoires », qui réunira les représentants des futures plateformes,
– celui des administrateurs des associations adhérentes,
– celui des personnes physiques qualifiées et des experts (qui représentent les commissions par niveaux de certification, sur la recherche, la formation continue et le conseil, l’international).
(2) Le conseil d’administration provisoire est composé du président de l’Unaforis, de deux personnes qualifiées et de 12 administrateurs nommés respectivement par l’Aforts et le GNI pour une durée de sept mois.
(3) Présidé par Pierre Gauthier, assisté de deux vice-présidents, Christian Chassériaud, président de l’Aforts, et François Dublin, président du GNI, il passe de 6 à 13 membres.