Alors que le baromètre de la crise du logement est plus que jamais dans le rouge, la Fondation Abbé-Pierre publie un nouvel état des lieux de l’application de l’article 55 de la loi sur solidarité et le renouvellement urbains (SRU), qui impose à certaines communes (1) de disposer d’au moins 20 % de logements sociaux.
Entre 2002 et 2009, les communes soumises à une obligation de rattrapage et à une contribution financière au titre de la loi SRU ont contribué au financement de 195 873 logements sociaux, soit 29 % de la production nationale. Mais deux constats viennent relativiser ce résultat. Sur l’ensemble de ce parc tout d’abord, une part importante (33 %) sont des logements « intermédiaires » (64 225 PLS), « inaccessibles aux plus modestes et à la quasi-totalité des 1,2 million de demandeurs de logements sociaux ». La part des logements très sociaux reste trop limitée au regard des besoins (27 665 PLAI, soit seulement 14 % de l’offre).
Mais surtout, l’étude d’un échantillon de 682 communes (sur les 734 soumises à un prélèvement) montre que 343, soit plus de la moitié, n’ont pas respecté leur objectif de rattrapage. Parmi elles, 175 ont réalisé moins de la moitié de leur objectif de production et neuf n’ont financé aucun logement social sur l’ensemble de la période. Sur les 682 communes, 330 – le plus souvent des petites villes – comptent moins de 10 % de logements sociaux et, parmi elles, 109 en détiennent moins de 5 %.
Si le nombre de communes récalcitrantes est en recul depuis 2008, date du dernier « palmarès » de la fondation (2), la marge de progrès est encore grande et l’effort très inégal. Il est en effet largement porté par des communes déjà proches du taux de 20 %, tandis que les moins dotées sont celles qui détournent le plus la loi. Dans le tableau de « déshonneur » dressé par la fondation, les petites communes de moins de 5 000 habitants situées dans des agglomérations, où la tension du marché est pourtant très forte, sont surreprésentées en Ile-de-France et, encore plus, en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Parmi les grandes villes de plus de 50 000 habitants, cinq figurent toujours parmi les mauvais élèves pour avoir atteint moins de 50 % de leurs objectifs, dont Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), Toulon et Nice.
Tandis qu’elle regrette une « nouvelle attaque parlementaire » contre la loi SRU « à travers la proposition de loi du 11 mai 2011 qui vise à intégrer dans le décompte des logements sociaux les logements en accession à la propriété », la fondation appelle au renforcement du texte. Elle souhaite que la part minimale des logements sociaux soit portée à 25 % dans l’ensemble des communes des agglomérations et à 30 % dans les zones les plus tendues, et que les contributions financières, en cas de non-respect des obligations de production, soient multipliées par trois.
(1) Les communes de plus de 3 500 habitants (1 500 en Ile-de-France), qui sont situées dans une agglomération ou un établissement public de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants et dont au moins une des communes dépasse les 15 000 habitants. Sur les 1 026 communes comptant de moins de 20 % de logements sociaux en 2010, 978 sont concernées par l’obligation de rattrapage et 734 sont soumises à un prélèvement.