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Réforme du service public de l’emploi : le CESE dresse un bilan critique

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Un peu plus de trois ans après la réforme de l’organisation du service public de l’emploi, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) dresse un bilan critique des deux premières années de fonctionnement de Pôle emploi. Elaboré par sa section du travail et de l’emploi et présenté par Daniel Jamme (CFDT), l’avis adopté le 15 juin en assemblée plénière met en perspective les difficultés de fonctionnement de la nouvelle institution et les pistes d’amélioration qui pourraient être envisagées (1).

Un bilan en demi-teinte

Opérée par la loi du 13 février 2008, la réforme du service public de l’emploi devait permettre d’améliorer le service rendu aux usagers en s’appuyant sur un opérateur pivot, Pôle emploi. Celui-ci concentre désormais les missions anciennement dévolues à l’ANPE et aux Assedic (inscription et tenue de la liste des demandeurs d’emploi, versement des allocations de remplacement pour le compte du régime d’assurance chômage et du régime de solidarité, collecte des offres d’emploi, accompagnement et placement des demandeurs d’emploi), la prospection et l’aide au recrutement apportée aux entreprises ainsi que la mise en œuvre de dispositifs d’aide à l’emploi (contrats aidés, contrats de transition professionnelle…). Pôle emploi s’est également vu doter d’une nouvelle mission d’orientation qui s’est traduite, sur le terrain, par le transfert en son sein des personnels de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) chargés de l’orientation professionnelle des demandeurs d’emploi.

Un remaniement qui n’a pas complètement porté ses fruits. Pour le CESE, « même si certains progrès ont été accomplis, notamment en ce qui concerne le dispositif d’accueil et d’information des demandeurs d’emploi, plusieurs des objectifs prévus par la convention tripartite [conclue le 2 avril 2009 entre l’Etat, Pôle emploi et l’Unedic] n’ont été que partiellement atteints […]. La mission d’accompagnement des demandeurs d’emploi demeure très insuffisante et le service aux entreprises encore perfectible. » Le rapport constate en effet que l’efficacité du service public de l’emploi (SPE), mesurée en termes de retour à l’emploi des chômeurs, reste limitée. « Les insuffisances du dispositif d’accompagnement des demandeurs d’emploi, nécessaire à la prévention du chômage de longue durée, peuvent en partie expliquer ce constat. » Sur le terrain, le SPE manque par ailleurs de cohérence. Le CESE dénonce un paysage institutionnel multiple, « dispersé et cloisonné ». La coopération avec les acteurs locaux reste difficile et le rapport appelle à une décentralisation du service. « Les efforts doivent désormais porter sur une réelle déconcentration administrative tout en renforçant les relations avec les autres opérateurs du service public de l’emploi dans une démarche territoriale adaptée aux besoins des bassins d’emploi. » Plus globalement, le rapport pointe « une restructuration interne peu préparée et inachevée faute d’une anticipation suffisante ».

Ces critiques doivent toutefois être nuancées. En effet, comme le relève le rapport, « le début de fonctionnement de Pôle emploi s’est heurté à la dégradation de la conjoncture économique et à la crise économique qui ont provoqué 1 million de chômeurs supplémentaires entre mi-2008 et mi-2010 ». Le CESE pointe également le « désengagement financier de l’Etat mettant à mal l’autonomie budgétaire » de l’institution. Si l’Unedic est le principal financeur de Pôle emploi, une part de son budget provient également de ressources qui lui sont attribuées par l’Etat. Or, constate le CESE, trois mesures ont récemment renforcé la contrainte budgétaire de Pôle emploi : la réduction de 187 millions d’euros, en 2009, de la subvention de l’Etat au titre du programme « accès et retour à l’emploi », le transfert non compensé des salariés de l’AFPA et la diminution du financement de l’Etat à hauteur de 82 millions d’euros des frais de gestion de l’allocation de solidarité spécifique. Parallèlement à ce désengagement financier, le CESE pointe l’ingérence de l’Etat dans le fonctionnement de l’institution. Malgré une gouvernance tripartite, les partenaires sociaux n’ont pas de réel pouvoir de décision et de nombreuses mesures sont prises sans leur concertation préalable (suppression de 1 800 emplois, lancement d’une enquête nationale de satisfaction financée par Pôle emploi, suppression de l’allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation, non-reconduction de certains crédits de fonctionnement).

22 propositions d’amélioration

Pour améliorer le fonctionnement du service public de l’emploi, le CESE formule 22 propositions.

« Il s’agit d’abord de poursuivre le processus d’amélioration de la qualité du service en veillant à véritablement personnaliser l’accompagnement du demandeur d’emploi au plus près de ses besoins spécifiques et à développer l’offre de service aux entreprises, en particulier en direction des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME). » Les trois premières recommandations s’articulent autour de l’accompagnement du demandeur d’emploi. Le CESE préconise de trouver un juste équilibre entre le développement « nécessaire » des services en ligne (pré-inscription, prise de rendez-vous, dépôt d’offres, etc.) et l’accueil physique du demandeur d’emploi. Par ailleurs, le suivi mensuel doit demeurer « la clé de voûte de l’accompagnement du demandeur d’emploi » et la taille des portefeuilles des conseillers Pôle emploi doit être limitée. Enfin, le suivi mensuel personnalisé doit être pensé en termes de parcours – et non selon une catégorie administrative (jeunes, seniors, etc.) – et adapté à la distance à l’emploi du demandeur et à son projet professionnel. Parallèlement, Pôle emploi doit affiner sa prospection et sa collecte d’offres d’emploi (renforcer le lien avec les employeurs, identifier les entreprises connaissant des tensions de recrutement et les offres d’emploi permettant un retour à l’emploi durable…) et s’impliquer plus fortement dans la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriale. Sa procédure et son service d’indemnisation doivent également être améliorés (meilleure information du demandeur d’emploi concernant le calcul de ses droits, amélioration de la lisibilité des courriers…). Dans l’avenir, l’institution devrait également, selon le conseil, accentuer ses efforts en matière de formation et de sécurisation des parcours professionnels (élévation des qualifications des demandeurs d’emploi, reconversion, acquisition des compétences clés…). La lisibilité de l’offre de formation devra être renforcée (création d’un portail extranet dédié) et l’évaluation des besoins en contrats aidés et en formations en alternance affinée. Enfin, le CESE émet un certain nombre de recommandations en matière de gouvernance interne visant à renforcer la coopération entre les différents acteurs du service public de l’emploi, à anticiper l’évolution des métiers et des moyens financiers de Pôle emploi, à garantir le rôle des partenaires sociaux dans la gestion de l’institution, et à assurer une délégation de certaines responsabilités vers les échelons locaux…

Réagissant à ce rapport, le directeur général de Pôle emploi, Christian Charpy, a indiqué rejoindre certaines des critiques énoncées, notamment sur la dépersonnalisation du service et la taille des portefeuilles des conseillers. « Les mois qui viennent vont permettre un renforcement de l’efficacité, une amélioration du service d’accompagnement,… mais les progrès dépendront en large partie de l’évolution du chômage et des moyens que Pôle emploi pourra consacrer à l’accompagnement », a-t-il toutefois précisé.

Notes

(1) « Pôle emploi et la réforme du service public de l’emploi : bilan et recommandations ? » – Disponible sur www.lecese.fr.

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