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Les propositions du député Ciotti pour améliorer l’exécution des peines

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Missionné en février dernier, le député (UMP) Eric Ciotti a, le 8 juin, remis au président de la République ses propositions pour renforcer l’efficacité de l’exécution des peines (1). Une priorité pour Nicolas Sarkozy au regard des 89 000 peines en attente d’exécution au 31 mars 2011. Cette situation est « inacceptable et démontre de réels dysfonctionnements de notre système judiciaire », estime l’élu des Alpes-Maritimes. Des dysfonctionnements qui trouvent leur origine dans des causes structurelles (faiblesse de la capacité carcérale…) (2) et conjoncturelles (multiplicité d’intervenants trop isolés, incohérences et disparités des méthodes, insuffisance des moyens…). Après avoir pris connaissance du rapport, le chef de l’Etat a demandé au garde des Sceaux de maintenir l’effort de résorption rapide d’exécution des peines et d’expertiser les préconisation d’Eric Ciotti avant de lui « faire rapidement des propositions ».

« Adapter l’immobilier pénitentiaire »

Le député préconise la « création immédiate de structures de détention légères » afin de résorber le stock de peines d’emprisonnement ferme non exécutées. Il s’agirait de « structures à sécurité allégée, dont une partie pourrait être provisoire, et qui permettraient de répondre en urgence à la nécessité de mettre à exécution les courtes peines d’emprisonnement dans un cadre adpaté au profil des condamnés ». A long terme, Eric Ciotti rappelle la nécessité d’augmenter le nombre de places en établissements pénitentiaires. Ce qui devrait aboutir grâce au programme immobilier présenté en mai dernier par le ministre de la Justice, qui prévoit de porter le nombre de places à plus de 70 000 d’ici à 2018 (3). Le rapport souligne aussi la « nécessité d’optimiser la densité carcérale » après avoir noté que le taux d’occupation des établissements pénitentiaires, et plus précisément des maisons d’arrêt (4), est « extrêmement variable d’une inter-région pénitentiaire à une autre ».

Autre axe de travail : diversifier les structures carcérales, d’abord pour une optimisation financière. Dans ce cadre, Eric Ciotti relance la discussion autour de la création d’établissements pénitentiaires avec une sécurité moindre pour les condamnés ne présentant pas de risque de dangerosité ou d’évasion – dits « prisons ouvertes », sur le modèle de celui de Casabianda (Corse) –, proposée par l’ancien secrétaire d’Etat à la justice, Jean-Marie Bockel (5). Il convient aussi, selon le député des Alpes Maritimes, de diversifier les structures pénitentiaires pour optimiser la réinsertion. Il souhaite ainsi que soient développés les quartiers et les centres de semi-liberté et de placement à l’extérieur. Objectif : atteindre 20 000 peines exécutées en semi-liberté d’ici à 2012.

S’agissant des mineurs, l’auteur propose d’ouvrir 35 centres éducatifs fermés (CEF) et 38 centres éducatifs renforcés (CER) supplémentaires afin de couvrir tout le territoire. Il préconise en outre d’instaurer un service civique pour les mineurs récidivistes effectué au profit de la collectivité et dont l’encadrement pourrait être confié aux établissements publics d’insertion de la défense, à la Défense nationale, à la protection judiciaire de la jeunesse ou à des associations. Autre suggestion : développer le travail d’intérêt général, pour atteindre le seuil des 30 000 mesures en 2012.

Instaurer un réel pilotage de l’exécution des peines

Pour Eric Ciotti, le « cloisonnement relatif des services concourant à l’exécution des peines pénales est susceptible d’entraver la fluidité du circuit ».

Aussi recommande-t-il avant tout de développer le fonctionnement des bureaux de l’exécution des peines (BEX) (6) afin que les horaires d’ouverture couvrent l’ensemble des audiences. Proposition également avancée pour les BEX pour mineurs dans un rapport d’information rendu public, le 8 juin, par le député (UMP) Michel Zumkeller (7).

Le député des Alpes Maritimes propose aussi d’« instituer le parquet en véritable pilote de l’application des peines » : il serait ainsi chargé d’apprécier l’opportunité des aménagements de peines, d’en proposer les modifications ou de gérer les incidents survenus au cours de leur exécution, décisions qu’il ferait homologuer par le juge de l’application des peines. Ce dernier devrait continuer à trancher les différends entre le parquet et le condamné. « Bien sûr, souligne l’élu, une telle réforme ne saurait être mise en œuvre à moyens constants. »

L’auteur pointe également la « performance insuffisante » des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), insuffisance résultant, selon lui, d’une absence de moyens. De fait, les prises en charge des condamnés sont « disparates » d’un département à un autre, les « charges de travail inégales » et les « organisations variables ». Il préconise donc de rationaliser l’organisation et le fonctionnement de ces services, par exemple en plaçant les personnels des SPIP du milieu fermé – aujourd’hui sous la responsabilité du directeur interrégional des services pénitentiaires – sous l’autorité du chef de l’établissement pénitentiaire. Et de réinstaller ceux du milieu ouvert dans les palais de justice afin de « restaurer des relations de proximité entre les SPIP et l’autorité judiciaire ». Autre préconisation d’Eric Ciotti : créer un directeur territorial des services pénitentiaires à vocation départementale ou interdépartementale afin de renforcer le pilotage des services pénitentiaires locaux.

Rendre les peines plus lisibles

Quand le prévenu est absent lors de l’audience, l’inexécution ou l’exécution tardive des peines est plus importante. Afin d’inciter les personnes à comparaître en personne, Eric Ciotti propose donc de limiter les aménagements de peines aux personnes poursuivies présentes à l’audience. En outre, il suggère de supprimer la possibilité de prononcer systématiquement un aménagement pour les peines d’emprisonnement et de ramener de deux à un an le seuil de la peine permettant au condamné de demander un aménagement. Le rapport recommande aussi de supprimer les crédits de réduction de peine afin de « redonner un sens à la durée de la peine » (8).

Mieux prévenir la récidive

Afin de mieux lutter contre la récidive des condamnés dangereux, le député propose notamment que le suivi socio-judiciaire soit prononcé systématiquement pour les crimes et délits sanctionnés d’une peine égale ou supérieure à cinq ans d’emprisonnement.

Eric Ciotti recommande également de déléguer au secteur associatif l’activité pré-sentencielle pour permettre aux SPIP de se recentrer sur leur cœur de métier qu’est la lutte contre la récidive et la mise en œuvre des mesures post-sentencielles (9). Il préconise en outre de « spécialiser des personnels d’insertion et de probation dans la prise en charge et le suivi des dangereux et des récidivistes ». Mais aussi de « fidéliser les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation [CPIP] sur leur poste » afin d’éviter les turn-over importants et de pallier le manque d’expérience de certains CPIP face à des publics difficiles, en particulier en région parisienne, qui fragilise de fait les prises en charge et les suivis. Pour ce faire, l’auteur suggère d’instituer une obligation de présence des CPIP stagiaires au sein du SPIP de formation pour une durée de deux ans et de réfléchir à la création d’une prime de fidélisation.

Notes

(1) Rapport disponible sur www.eric-ciotti.com.

(2) Au 1er mai 2011, alors que le parc pénitentiaire comptait 56 150 places réparties sur 192 établissements pénitentiaires, 64 584 personnes étaient incarcérées.

(3) Voir ASH n° 2709 du 13-05-11, p. 14.

(4) Au 1er avril 2011, 2 109 places en établissements pour peine, dont 1 067 places en centres de détention (soit 5,7 % de leur capacité) étaient inoccupées, alors que, à la même date, 9 722 détenus subissaient une surpopulation carcérale en maison d’arrêt, relève le rapport.

(5) Voir ASH n° 2654 du 9-04-10, p. 12.

(6) Rappelons qu’ils sont notamment chargés d’expliquer aux condamnés la décision rendue et de leur remettre la convocation devant le juge de l’application des peines ou le service pénitentiaire d’insertion et de probation.

(7) Rapport d’information sur l’exécution des peines et la mise en place des bureaux d’exécution des peines pour les mineurs placés sous main de justice – Prochainement disponible sur www.assemblee-nationale.fr.

(8) Le système de crédit de réduction de peine est fondé sur la présomption de bonne conduite du détenu au cours de son incarcération.

(9) A l’heure actuelle, plus de 6 % des conseillers d’insertion et de probation en équivalents temps plein se consacrent à la mise en œuvre des mesures pré-sentencielles.

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