Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) recommande l’élaboration d’un quatrième plan de lutte contre la douleur « afin de donner un nouveau souffle aux actions entreprises et de s’assurer de la poursuite de l’engagement des pouvoirs publics ». Dans son rapport d’évaluation du plan « douleur » 2006-2010 (1), il estime que ce dernier « est passé à côté de son objectif d’amélioration de la prise en charge » des personnes concernées. Certes, il y a moins de fatalisme face à la douleur et les professionnels de santé y sont désormais plus attentifs. Mais, pour le HCSP, « il reste beaucoup à faire ». D’une manière générale, il estime que, « avant d’énoncer des nouvelles mesures, il faut donner les moyens aux acteurs déjà en place d’appliquer les mesures précédentes ». Selon lui, le prochain plan devra donc consolider et approfondir les avancées des plans précédents et en combler les lacunes.
Le troisième plan « douleur » prévoyait d’améliorer la prise en charge des personnes les plus vulnérables. Le HCSP considère qu’il ne s’agit que d’une première étape : « celle de la prise de conscience ». S’agissant des enfants et des adolescents, il admet que de « gros efforts » ont été faits dans la prise en charge et la prévention des douleurs aiguës, en particulier liées aux soins. Toutefois, le nombre de spécialistes et de structures spécialisées est très inférieur aux besoins et l’accès aux techniques non pharmacologiques, en particulier psychocomportementales, est très insuffisant. Du côté des personnes âgées, l’effort a été concentré sur les institutions gériatriques alors que 90 % des personnes âgées de plus de 75 ans vivent à domicile et qu’une sur deux se plaint de douleur. Les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladies mentales ont été, quant à elles, « les oubliées du plan »alors qu’elles sont très concernées par la douleur, déplore le Haut Conseil. Il recommande donc de « prêter une attention forte aux personnes dyscommunicantes » que sont les nouveau-nés et les très jeunes enfants, les malades en réanimation, les personnes atteintes de pathologies psychiatriques et les personnes polyhandicapées, avec une attention plus particulière pour les enfants handicapés. Pour lui, le prochain plan devra aussi structurer l’offre de soins en milieu extrahospitalier, notamment grâce à des formations pour les médecins généralistes, les soignants intervenant à domicile et les « aides de vie ».
La structuration de la filière de soins de la douleur s’est par ailleurs heurtée à un manque de moyens et d’impulsion politique, dénonce le HCSP. Il constate une fragilisation des centres anti-douleur, certains ayant perdu du personnel sous la pression des restructurations hospitalières, d’autres n’ayant jamais perçu leurs crédits alors que ceux-ci ont bien été délégués aux établissements de santé. A ce titre, le Haut Conseil estime qu’une « transparence de l’attribution des crédits « douleur » par les [agences régionales de santé] serait nécessaire ». Les délais d’attente pour accéder à ces centres sont longs et la mise à jour de leur cahier des charges a pris beaucoup de retard (2). Par ailleurs, la somme de cinq millions d’euros prévue pour financer la prise en charge de la douleur dans les réseaux de santé n’a pas été engagée. Les soignants, inquiets pour la pérennité des structures actuelles et leurs moyens, ont besoin d’être soutenus et confortés, plaide encore le HCSP.
Enfin, souligne le Haut Conseil, « l’information du public est cruciale car elle est un fort moteur de l’évolution des pratiques professionnelles ». Il recommande donc d’élever le niveau d’exigence des personnes concernées, à la fois la personne souffrant de douleur et ses proches. Il faudrait aussi, selon lui, que la présence des parents lors d’un soin douloureux de leur enfant devienne une « pratique naturelle » dans les services hospitaliers.
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(2) Le nouveau cahier des charges des centres anti-douleur n’a en effet été que récemment publié – Instruction n° DGOS/PF2/ 2011/188 du 19 mai 2011 – Disp. sur