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Les maisons de retraite ouvrent grand leurs portes aux animaux

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Les établissements pour personnes âgées perçoivent de plus en plus l’intérêt d’une présence animale en leur sein pour le bien-être de leurs résidents, et même pour l’entretien de leur capacités motrices. Une enquête menée dans le cadre d’une thèse et soutenue par la Fondation Adrienne-et-Pierre-Sommer fait un point complet sur cette question.

Chiens, chats, poissons, lapins, cochons d’Inde, mais aussi ca­nards, moutons, perroquets et même quelques daims, biches et lamas : c’est une véritable ménagerie que l’on trouve désormais dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) en France. « Alors qu’il y a dix ans, la seule présence animale dans le secteur médico-social était celle de pictogrammes indiquant leur interdiction, les animaux deviennent un critère de valorisation pour les EHPAD privés, publics et associatifs », se réjouit Robert Kohler, directeur de la maison de retraite associative « La Roselière » à Kunheim (Haut-Rhin) et fondateur de l’association de chiens visiteurs « 4 pattes pour un sourire ».

L’intérêt du « vivant »

Auteur d’une thèse sur la présence animale en EHPAD (1) soutenue par la Fondation Adrienne-et-Pierre-Sommer dont il devrait dévoiler les grandes lignes le 27 juin lors d’un colloque (2), Robert Kohler a interrogé 7 725 structures médico-sociales françaises (3) et relevé une présence animale permanente dans 2 408 d’entre elles (31 %), et ponctuelle ou constante dans 5 426 (70 %), nombre de ces établissements accueillant plus d’un animal. Pour le directeur, ce mouvement va dans le sens d’une amélioration des conditions de vie de la personne âgée institutionnalisée. « Pendant longtemps, les EHPAD étaient des lieux aseptisés ; les professionnels ont enfin compris l’intérêt du “vivant” auprès des personnes dépendantes, à qui un animal apporte aussi bien de l’affectif qu’une aide à la réminiscence et au mouvement. Avec les chiens, par exemple, on peut faire travailler la mémoire archaïque. J’ai vu des malades Alzheimer capables de brosser spontanément un chien alors qu’ils avaient oublié leurs praxies pour les autres gestes de la vie quotidienne ! »

Le secteur privé lucratif a un taux de présence animale permanente ou occasionnelle supérieur de 8 % à 10 % aux secteurs associatif et public. L’hypothèse de Robert Kohler est que ces établissements ont un sens plus aigu de la satisfaction « client » et misent sur les animaux pour améliorer leur image de marque. Selon lui, il n’existe pas de frein financier : « L’entretien d’un chien à demeure coûte dans les 1 000 € par an, ce qui est une somme dérisoire dans les dépenses d’un EHPAD. »

De manière plus générale, ce sont les établissements de taille moyenne – entre 50 et 79 lits – qui accueillent le plus de bêtes, quelles qu’elles soient. « A partir de 80 lits, les EHPAD deviennent plus structurés, plus organisés et tout est plus compliqué ! », note Robert Kohler, dont l’étude pointe que, « plus la taille de la structure est importante, plus l’animal est petit et facile à traiter – lapin, chat… C’est la solution de facilité ». Ainsi, les chats sont globalement les plus présents – 1 421 établissements en accueillent à résidence ou de façon périodique –, devant les chiens (765 établissements). La présence d’animaux « peu attendus » en maison de retraite comme les moutons et les canards, certes faible (respectivement dans 27 et 24 EHPAD), est surtout répertoriée dans le quart nord-ouest de l’Hexagone et démontre le maintien d’un lien avec la ruralité.

Les animaux présents en EHPAD sont la plupart du temps la propriété de l’établissement et non de la personne âgée. « La possession directe par l’usager, qui s’était développée depuis la mise en vigueur de la loi 2002-2, s’estompe progressivement, ce qui peut s’expliquer par une entrée en EHPAD avec un degré de dépendance de plus en plus élevé, qui ne permet déjà plus aux aînés de posséder un animal à domicile. » Pour autant les animaux de compagnie de la famille ne sont pas absents de l’établissement : une majorité de structures – 55 % des établissements publics et associatifs et 65 % des institutions privées – acceptent désormais, de manière habituelle et sans réglementation particulière, l’accès des animaux accompagnant les familles lors de visites à leurs proches.

Encore plus répandues, les activités de médiation faisant intervenir de manière ponctuelle des animaux : 14 % des établissements publics et 10 % des structures privées reçoivent des chiens visiteurs. « Ce chiffre semble démontrer une ouverture du secteur public à la médiation animale en contrepoids d’autorisations d’animaux à demeure plus contraignantes, note Robert Kohler, mais le chien visiteur « peut aussi être une étape avant l’introduction permanente d’un chien. »

Ne pas improviser

Autre constat : alors qu’il y a dix ans, les directeurs d’établissements étaient majoritairement à l’origine de l’introduction des animaux, aujourd’hui 80 % des demandes viennent du personnel – davantage des soignants que des animateurs – persuadé que l’animal peut apporter un « plus » dans la prise en charge de la personne âgée.

« Mais attention, la présence animale ne s’improvise pas, pointe Robert Kohler. Il y a des réglementations et des formations à suivre. La France est en retard sur ce point par rapport à des pays comme le Canada, qui a développé des formations pour les chiens visiteurs associant à la fois la connaissance de l’animal et celle de la personne âgée démente. »

Le directeur d’établissement, qui avait réalisé une première étude sur la présence animale en EHPAD en 2005 – seules 2 226 structures acceptaient alors les animaux –, conclut que la présence animale constante a augmenté de 8 % au cours des cinq dernières années, tandis que celle des animaux visiteurs et de ceux qui accompagnent les familles, qui n’en était alors qu’à ses balbutiements, a fait un bond de 140 %. « Le mouvement est lancé, on ne peut plus l’arrêter ! », assure-t-il.

Notes

(1) « L’état des lieux de la médiation animale dans les EHPAD en France – De la théorie vers la conception d’un cahier des charges » – Sous la direction de Marie-France Callu à l’IFROSS – Soutenance le 12 juillet à la faculté de droit de l’université de Lyon-3.

(2) Intitulé « Profession : chien » et organisé à Paris – www.fondation-apsommer.org.

(3) Le panel comprend des maisons de retraite, des unités de soins de longue durée et des hébergements temporaires.

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