Les difficultés rencontrées par l’Agence française de l’adoption (AFA) dans son déploiement à l’étranger sont plus liées à une « insuffisance de pilotage, d’organisation et de méthode » qu’à un problème d’effectifs, estiment les inspections générales des affaires sociales et des affaires étrangères dans un récent rapport (1). A l’origine de cette mission d’audit confiée en juillet 2010 par le gouvernement se trouve la demande de renfort en personnel de l’agence dans la perspective de son implantation en Haïti et en Russie, « deux pays à enjeux ». Au final, la mission livre une série de recommandations d’autant plus cruciales que la question du renouvellement du groupement d’intérêt public se posera en décembre prochain.
Pour les auteurs du rapport, Patricia Vienne, Thierry Leconte et Bertrand Cochery, l’AFA fait preuve d’une « adaptation encore imparfaite aux mutations de l’environnement international » dans sa stratégie d’implantation à l’étranger et ne propose pas un accompagnement suffisamment personnalisé à tous les adoptants.
Toutefois, « il serait injuste de faire porter à l’agence la responsabilité de la réalité de l’adoption internationale et des procédures nationales de délivrance des agréments », estiment-ils. Selon eux, au vu du discours qui a accompagné sa création en 2005, « l’agence ne pouvait que décevoir et engendrer des frustrations auprès des adoptants » (2). Pour les rapporteurs, les pouvoirs publics doivent donc tout d’abord mieux informer les familles sur la réalité de l’adoption internationale, marquée par une « diminution sensible », pour éviter de susciter des espoirs que l’agence ne pourra pas satisfaire. Ils relèvent par ailleurs que la situation de l’AFA s’est améliorée depuis le rapport « Colombani » (3). Son rôle a été clarifié grâce à la création d’une « véritable » autorité centrale et ses relations avec les organismes d’adoption et les associations de parents adoptifs sont « nettement » meilleures. Reste que, face aux défis d’aujourd’hui, « plus nombreux et plus lourds », l’agence doit se montrer « plus efficace ».
La question des effectifs, bien que non essentielle, est néanmoins « importante ». La mission recommande donc d’augmenter les correspondants locaux à l’étranger à hauteur de 20 équivalents temps plein pour faire face aux besoins de déploiement, tout en restant dans les limites du plafond de la masse salariale actuelle (chroniquement sous-consommée). En revanche, les personnels du siège ont vocation à demeurer strictement encadrés. La mission préconise par ailleurs de définir les obligations des correspondants locaux en matière d’accompagnement des familles à l’étranger. Elle réclame en outre la mise en place d’un dispositif d’urgence permettant de faire fonctionner la régie de l’agence en Russie. S’agissant d’Haïti, elle recommande que les conventions conclues entre l’AFA et les crèches locales attestent que ces dernières présentent toutes les conditions requises pour participer à une adoption « sûre ». Autre préconisation : développer les collaborations entre l’AFA et les organismes autorisés pour l’adoption (OAA) en raison de la disparition prévisible de l’adoption individuelle dans certains pays. Pour les rapporteurs, le transfert des missions actuelles de l’agence vers ces organismes n’est « pas crédible », chaque OAA étant très attaché à son identité et aucun d’entre eux n’ayant la taille critique.
L’implication du ministère chargé de la famille va être déterminante pour mener à bien les réformes de l’agrément et de la gestion des demandes d’adoption. A ce titre, la mission renvoie au projet de loi, déposé au Sénat en avril 2009 et qui semble depuis tombé dans l’oubli, prévoyant la caducité du projet d’adoption s’il n’est pas confirmé annuellement par la personne titulaire de l’agrément d’adoption. Elle recommande en outre d’instaurer à l’AFA la règle du dépôt d’un dossier unique de candidature pour un seul pays pour inciter les candidats à mieux orienter d’emblée leur projet d’adoption. D’autres recommandations visent à améliorer les relations avec les conseils généraux, notamment via les correspondants départementaux pour lesquels la mission préconise l’élaboration d’un plan de formation annuel. Enfin, la mission demande à l’administration d’officialiser les consultations d’orientation et de conseil en adoption, de fixer leur cahier des charges, leurs financements et leur répartition sur le territoire.
(1) Déploiement de l’Agence française de l’adoption à l’étranger – Février 2011 – Disp. sur
(2) Pour mémoire, l’AFA a été créée afin d’offrir une troisième voie à ceux qui ne peuvent être pris en charge par les organismes autorisés pour l’adoption et qui ne souhaitent pas entreprendre seuls les démarches pour adopter. Sa mission est d’informer, de conseiller et de servir d’intermédiaire pour l’adoption de mineurs étrangers de moins de 15 ans.