Le projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale – qui instaure notamment les « jurés populaires » voulus par le président de la République – a été présenté en conseil des ministres le 13 avril. L’idée : « rapprocher les citoyens du fonctionnement de leur justice en les associant notamment au jugement de certains délits », a expliqué le garde des Sceaux. Selon lui, « en apportant un “regard nouveau”, les citoyens assesseurs encourageront les différents “acteurs” du procès pénal (juges, procureurs et avocats) à faire preuve de pédagogie et à abandonner certains automatismes ». Le texte, pour lequel la procédure accélérée a été déclenchée, sera débattu au Sénat à partir du 17 mai prochain.
Les citoyens pourront ainsi être désignés pour siéger aux côtés des magistrats au sein du tribunal correctionnel et de la chambre correctionnelle de la cour d’appel pour juger des délits qui portent atteinte à la sécurité et à la tranquillité des personnes punis de cinq, sept ou dix ans d’emprisonnement (homicides involontaires, violences volontaires agression ou atteinte sexuelle…). Deux citoyens assesseurs pourront aussi être présents à la cour d’assises – en remplacement des neuf jurés actuellement convoqués – pour connaître des crimes punis d’une peine maximale de 15 ou 20 ans de réclusion criminelle. Selon la chancellerie, cette dernière disposition permettra notamment d’éviter la « pratique dite de la correctionnalisation », qui conduisait à renvoyer devant les tribunaux correctionnels le jugement de crimes artificiellement requalifiés en délits (par exemple, un crime de viol requalifié en délit d’agression sexuelle) « pour de simples contraintes de saturation des rôles des cours d’assises ». Les justiciables assisteront aussi les juges de l’application des peines qui se prononcent sur les demandes ou les révocations de libération conditionnelle ainsi que sur les mesures probatoires préalables aux libérations conditionnelles (semi-liberté, placement à l’extérieur, placement sous surveillance électronique) pour toutes les peines d’emprisonnement prononcées égales ou supérieures à cinq ans.
Pourront être assesseurs les justiciables qui remplissent certaines conditions, telles que : être âgé de plus de 23 ans ; savoir lire et écrire le français ; jouir de ses droits politiques, civils et de famille (1) ; ne pas être frappé d’incapacités au sens de l’article 256 du code de procédure pénale (majeur protégé, personne ayant été condamnée à une peine d’emprisonnement de plus de six mois…). En outre, leurs fonctions ne devront pas être incompatibles avec celles qui sont listées à l’article 257 du même code (membre du gouvernement, fonctionnaire des services de police ou de l’administration pénitentiaire…). Les assesseurs seront désignés parmi les personnes inscrites sur les listes électorales ayant été tirées au sort et après vérification de leurs garanties de moralité et d’impartialité. Ils ne pourront pas siéger plus de huit jours dans l’année, indique le projet de loi. Mais, si l’examen d’une affaire se prolonge au-delà de cette limite, ils devront siéger jusqu’à l’issue du délibéré. Le texte précise que l’exercice des fonctions de citoyen assesseur constitue un devoir civique, dont le non-respect pourra être puni d’une amende de 1 500 €.
La mise en place des « jurés populaires » sera d’abord expérimentée dans deux cours d’appel et dans l’ensemble des tribunaux de grande instance de leur ressort à compter du 1er janvier 2012, avant d’être généralisée à l’ensemble du territoire le 1er janvier 2014.
(1) En revanche, pourront être dispensées les personnes âgées de plus de 70 ans ou résidant dans un autre département, ou pour tout motif grave reconnu par une commission installée auprès des juridictions.