Treize minutes. Un condensé de « vies suspendues ». Celles d’une poignée d’expulsés maliens, dont l’un d’eux répète inlassablement : « Je vis une vie coincée »… Après des années passées en France à travailler en tant que manutentionnaire, agent de sécurité, ouvrier en bâtiment – souvent déclarés –, ils ont été arrêtés parce qu’ils étaient en « situation administrative irrégulière ». Samba montre sa carte Vitale, son titre de transport, ses quittances de loyer. Il est bien loin de la gare du Nord, aujourd’hui hébergé à Bamako dans sa famille qui ne veut plus vraiment de lui, car il est « maudit ». Dans leur pays d’origine, ces hommes à l’esprit aventurier souffrent du manque de travail, du rejet et de l’humiliation, ou tout simplement du fait d’avoir perdu leurs repères – Diawaye a vécu seize ans en région parisienne avant d’être expulsé, et il dit avoir « tout laissé là-bas ».
C’est leur vacuité existentielle qu’ils livrent à Mathilde Guermonprez, journaliste, et à Magali Hirn, photographe, dans le diaporama sonore Retour en terre, réalisé pour le site liberation.fr avec le soutien de la Cimade. La photographe, qui a été bénévole à l’association d’accompagnement des étrangers migrants, a pu être mise en contact avec les témoins par le biais de l’Association malienne des expulsés (1). « Ce sont des gens qui ont besoin de se confier », note-t-elle. Si Magali Hirn se doutait de leurs difficultés, elle n’imaginait pas leur délaissement. « De retour au Mali, ils n’enclenchent rien, ne refont pas leur vie. Ils restent relégués, et n’ont qu’une envie : revenir en France, malgré le parcours du combattant de l’immigration qui les attend. »
Retour en terre – Magali Hirn (photos) et Mathilde Guermonprez (son) –
(1)