Les partenaires sociaux de la convention collective du 15 mars 1966 ont repris leurs échanges sur la rénovation du texte lors d’une nouvelle commission mixte paritaire, le 25 mars, sous l’égide du ministère du Travail. Commencé depuis deux ans, le chantier avait été interrompu en juillet dernier, quand les employeurs avaient fait connaître leur décision de présenter une proposition de texte, dans le cadre d’une « révision ». Depuis, la reprise des travaux était suspendue à la décision des fédérations d’employeurs de présenter leur texte.
Or elles sont revenues autour de la table divisées dans leur stratégie. Après avoir réaffirmé lors de la commission mixte paritaire son souhait de réviser la convention par étapes et de proposer un projet sur les classifications et les rémunérations, à partir des points d’accord de la phase précédente de négociation, le Syneas (Syndicat d’employeurs associatifs de l’action sociale et santé) a notifié son projet trois jours plus tard à l’ensemble des partenaires sociaux, qui doivent encore l’analyser. Le système proposé permettra, selon lui, « la valorisation des débuts de carrière, une progression de l’ancienneté identique pour tous, la représentation des qualifications et de la professionnalisation des salariés, la mise en valeur des fonctions d’encadrement, la possibilité de réaliser de véritables parcours professionnels ». L’objectif est d’« adapter et d’améliorer notre convention collective au service des missions de nos associations et de nos établissements », argumente-t-il. Pour autant, si le contexte économique ne doit pas, pour l’organisation, constituer un frein, « ce nouveau texte aura forcément un coût, qui devra faire l’objet d’une enveloppe spécifique et d’une action appropriée du Syneas auprès des financeurs ».
D’accord sur ce périmètre de négociation, les syndicats de salariés ont obtenu que le calendrier fixé dépasse celui imposé par le processus de « révision » (1) : la première réunion est prévue le 11 mai et la dernière le 7 décembre. Auparavant, une séance consacrée à la politique salariale est prévue le 15 avril.
Reste que l’avenir des discussions dépendra de la Fegapei (Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées), qui maintient un projet différent : pour elle, la rénovation de la CC 66 doit d’ores et déjà converger avec l’objectif de la création d’une convention collective unique de branche pour « réguler la concurrence qui s’annonce dans le cadre de la procédure d’appels à projets ». Surtout, elle souhaite négocier sur un texte intégrant le temps de travail, indissociable à ses yeux des classifications et des rémunérations. « Nous ne pouvons déconnecter la convention du contexte budgétaire et devons regarder ces trois variables pour élaborer une convention moderne, équitable, dans le souci de la sauvegarde de l’emploi, justifie Céline Poulet, directrice générale adjointe de la Fegapei. Il faut mettre sur la table la question des congés trimestriels et de leurs conditions d’octroi, en lien avec la question de la pénibilité. » Une perspective contre laquelle s’élèvent justement les syndicats de salariés, qui y voient plutôt une volonté de démanteler la convention collective afin de réduire les coûts salariaux.
La Fegapei, qui prendra sa décision sur la suite des négociations « en concertation avec les associations adhérentes », a interrogé la direction générale du travail sur le maintien de la commission mixte paritaire en l’absence d’un projet commun des employeurs. Elle souhaite, par ailleurs, obtenir la garantie du financement d’un nouveau texte. « Nous allons poser deux questions au ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale, ajoute Céline Poulet : l’enveloppe pour rénover la convention existe-t-elle ? Et dans l’hypothèse d’une signature sans enveloppe, le texte pourrait-il être agréé ? Cela voudrait dire que le surcoût serait totalement porté par les associations. L’emploi deviendrait alors la variable d’ajustement, avec des conséquences sur la qualité de l’accompagnement, ce qui est pour nous inenvisageable ! »
En attendant ces réponses, les syndicats de salariés sont circonspects. « Nous nous interrogeons sur l’avenir d’une négociation avec deux organisations d’employeurs diamétralement opposées, sachant que la convention n’est pas étendue, explique Jean-Marie Faure, secrétaire général adjoint de la CFTC Santé-sociaux. Allons-nous nous retrouver avec des textes différents appliqués dans les établissements ? »
(1) D’après l’article 3 de la convention, les négociations doivent, dans ce cadre, démarrer trois mois après la « notification » du texte puis être conclues trois mois plus tard.