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Relations PJJ-secteur associatif : l’inquiétante dérive

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Les associations ne décolèrent pas depuis la circulaire du 7 février dernier relative à la campagne budgétaire 2011 des établissements et services relevant de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) (1). Pour Gérard Tonnelet, président du GNDA (Groupement national des directeurs généraux d’association du secteur éducatif, social et médico-social), le pacte entre l’administration et le secteur habilité est rompu.

« En tant que dirigeants d’associations exerçant dans les différents champs de l’action sociale et médico-sociale, nous estimons que la publication de la circulaire du 7 février 2011, à effet immédiat, constitue le coup le plus rude et le plus destructeur donné à des décennies de construction en France de dispositifs d’action sociale visant avant tout la qualité des réponses, le respect des usagers, et l’efficience du service public dans le sens de l’intérêt général.

Comment imaginer encore, après la remise en cause d’environ 400 emplois du secteur associatif habilité, sans nullement tenir compte des contraintes d’employeur, et au mépris de la reconnaissance unanime des magistrats de la jeunesse pour la qualité des interventions, que le pacte entre administrations et associations sur lequel a reposé en France l’équilibre et le développement d’une action sociale de progrès ne soit pas définitivement atteint ? Comment croire encore au dialogue et à la concertation, quand des mois de réflexion sur le fond aboutissent à un tel déni de compétence, si ce n’est de justice ?

Le dialogue entre la PJJ et les associations n’a jamais été simple du fait notamment de la double fonction de cette administration, à la fois prestataire de service et en position de contrôle sur les dispositifs du secteur habilité associatif. Face aux risques de triangulation avec les prescripteurs que ne pouvait manquer d’impliquer cette double fonction, les associations ont toujours joué le jeu de la loyauté sans jamais manquer pour autant de développer leur propre qualité, cherchant avant tout à la mettre au service de l’intérêt général. Nous pouvions penser que l’administration de la PJJ, indiquant régulièrement qu’elle se portait garante du secteur habilité qu’elle contrôlait et de ses prestations, y trouvait elle-même son propre intérêt.

Nous sommes contraints aujourd’hui de déchanter brutalement. La seule logique qui préside depuis quelques années à la politique de la PJJ est celle de sauver ses propres moyens d’administration aux abois, et non pas celle de l’intérêt général. A travers ce mauvais coup, c’est la logique même du service public qui se trouve atteinte et, en tant que citoyens, avec tous les bénévoles et les professionnels de nos associations, nous nous en indignons au nom des personnes que nous accompagnons.

La LOLF (2) est venue mettre en évidence les fragilités structurelles de la PJJ. La fermeture accélérée depuis quelques années de ses foyers éducatifs est la simple conséquence des coûts insupportables (de deux à trois fois plus élevés que ceux du secteur associatif pour hébergement avec, en dépit des démentis, des jeunes présentant les mêmes symptômes) liée à une lisibilité accrue des résultats. Le repli de la PJJ sur des missions qu’elle s’estime mieux à même de mener ne peut se faire sur le dos du secteur habilité sans que celui-ci ne réagisse avec la plus grande fermeté au nom des jeunes et des familles auprès desquels il intervient.

Le démantèlement de la mesure d’investigation et d’orientation éducative à travers la création de la mesure judiciaire d’investigation éducative (3), réduisant les moyens éducatifs et d’administration, tirant vers le bas le dispositif pour l’ajuster à une logique de compétences au rabais, préfigure-t-il la tentation de l’ensemble des administrations publiques aujourd’hui de casser l’outil construit en France dans la seconde moitié du XXe siècle ? Nous ne le pensons pas et ne le constatons pas en général ; mais en ce qui concerne la PJJ, juge et partie dans un champ sur lequel elle peine depuis bien longtemps à assurer sa mission, nous finissons pas penser que le délestage brutal du secteur associatif habilité, qui déstabilise totalement sa structure et ses cadres institutionnels, démontre combien cette administration fait peu de cas de l’intérêt des personnes et des citoyens, et combien seule lui importe au final une gestion à courte vue de ses propres effectifs, sans aucune considération pour ce qu’elle nomme elle-même ses « prestataires » ni davantage pour les justiciables.

Dirigeants d’associations, nous sommes aussi garants de l’intérêt public, de la vie de nos concitoyens, et nous nous devons de le faire savoir au plus grand nombre : nous voulons témoigner que l’administration de la PJJ met aujourd’hui ses propres intérêts au-dessus des intérêts des familles en souffrance et des professionnels qui les accompagnent. »

Contact : gnda@gnda.org

Notes

(1) Voir ASH n° 2698 du 25-05-11, p. 22 et n° 2699 du 4-03-11, p. 23.

(2) Loi d’orientation sur les lois de finances, effective depuis janvier 2006.

(3) Sur les dernières annonces du ministère de la Justice sur cette nouvelle mesure, voir ce numéro, p. 18.

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