Lors de la présentation, en octobre dernier, des grandes lignes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, le ministre du Budget et des Comptes publics a estimé que le déficit du régime général de la sécurité sociale devrait s’élever à 21,4 milliards d’euros en 2011. Dans ce cadre, le gouvernement a fait voter un objectif national des dépenses d’assurance maladie de 167,1 milliards d’euros, en progression de 2,9 % par rapport à 2010 (1). Les parlementaires ont en outre adopté un ensemble de dispositions visant à garantir de nouvelles recettes au régime général (hausse du forfait social par exemple) et une meilleure maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie (mise sous accord préalable des soins de suite et de réadaptation…). A cela s’ajoute la suppression ou la réduction de certaines niches sociales et fiscales à hauteur de 10 milliards d’euros, dont 7 milliards seront affectés au régime général (2). Plus précisément, a indiqué François Baroin, 3,5 milliards seront consacrés au financement de la dette sociale et 3 milliards à celui de la réforme des retraites. Le reste – 450 millions d’euros devant abonder la branche maladie. Comme les autres années, le gouvernement espère également faire des économies avec le renforcement de sa politique de lutte contre la fraude.
Au-delà de ses articles tendant à maîtriser les dépenses ou à engendrer des économies, la loi contient peu de mesures sociales marquantes. Relevons toutefois l’instauration d’un droit à la formation pour l’assuré en arrêt maladie, la suppression de la rétroactivité des aides au logement, ainsi que plusieurs dispositions en faveur des victimes de l’amiante.
A noter : les dispositions de la loi relatives aux établissements sociaux et médico-sociaux ont été traitées dans un précédent dossier des ASH (3).
La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2009 a offert la possibilité aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle d’accéder, sous certaines conditions, durant leur arrêt de travail, à un dispositif de retour à l’emploi (formation professionnelle, actions d’évaluation, d’accompagnement…) (4). La LFSS pour 2011 étend le bénéfice de ce dispositif aux personnes en arrêt maladie. Ainsi, tout en continuant à percevoir ses indemnités journalières, l’assuré peut demander, avec l’accord de son médecin traitant, à bénéficier d’actions de formation professionnelle continue ou d’actions d’évaluation, d’accompagnement, d’information et de conseil auxquelles la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) participe sous réserve que, après avis du médecin-conseil, la durée de ces actions de formation soit compatible avec la durée prévisionnelle de l’arrêt de travail. Cette dernière précision a pour objet de « garantir que les actions contribueront à prévenir la précarisation professionnelle de l’assuré et non à allonger la durée de l’arrêt de travail », a indiqué Jean-Pierre Door, rapporteur (UMP) de la loi à l’Assemblée nationale (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, page 235). La caisse d’assurance maladie doit faire part de son accord à l’assuré et, le cas échéant, à l’employeur, ce dernier devant en informer le médecin du travail (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 323-3-1 nouveau).
Dans ce cadre, le contrat de travail du salarié demeure suspendu. Il en est de même lorsqu’il a été victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (code du travail, art. L. 1226-1-1 nouveau).
Selon l’exposé des motifs du projet de loi initial, l’objectif de ce dispositif de retour à l’emploi vise « essentiellement [les salariés] en arrêt de longue durée qui, progressivement, se coupent du marché du travail et voient leurs compétences diminuer et qui, s’ils n’anticipent pas leur reconversion, risquent d’être licenciés pour inaptitude à la fin de leurs indemnités journalières et de basculer en invalidité ».
Jusqu’à présent, les établissements de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) n’étaient soumis à aucune procédure d’accord préalable du service médical de la caisse primaire d’assurance maladie lorsqu’ils prescrivaient des séjours en soins de suite et de réadaptation (SSR). Or, a indiqué Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé, lors des débats à l’Assemblée nationale, « il faut savoir que la rééducation en SSR n’est pas toujours recommandée et qu’il y a certaines dérives dans ce domaine » (J.O.A.N. n° 100 [C.R.] du 30 octobre 2010, page 7711). En effet, a-t-elle précisé plus tard aux sénateurs, pour des soins équivalents, la rééducation coûte 5 725 € en soins de suite et de réadaptation et 787 € en cabinet de ville de kinésithérapie. Sur la base de recommandations de bonnes pratiques professionnelles de 2006 et de 2008 de la Haute Autorité de santé (HAS), la caisse nationale d’assurance maladie a invité les prescripteurs hospitaliers à orienter les patients vers les cabinets de ville. « Aucun changement significatif n’a été observé, ce qui, naturellement, [a été] à l’origine de surcoûts tout à fait injustifiés », a souligné la ministre (J.O. Sén. n° 116 [C.R.] du 14 novembre 2010, page 9946). Aussi la LFSS pour 2011 prévoit-elle que peuvent être soumises à l’accord préalable du service du contrôle médical de la CPAM non seulement les prestations d’hospitalisation afférentes aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie mais aussi désormais celles pour les soins de suite ou de réadaptation, sauf en cas d’urgence attestée par le médecin de l’établissement prescripteur (CSS, art. L. 162-1-17, al. 1 et 2 modifiés).
La mise sous accord préalable des prestations d’hospitalisation pour les soins de suite ou de réadaptation est décidée par le directeur de l’agence régionale de santé (ARS), sur proposition du directeur de la CPAM, après mise en œuvre d’une procédure contradictoire. Elle est effectuée sur la base d’un programme régional établi par le directeur général de l’ARS, en lien avec la CPAM. La proposition de mise sous accord préalable du directeur de la caisse doit être motivée par le constat d’une proportion élevée de prestations d’hospitalisation avec hébergement qui auraient pu donner lieu à des prises en charge sans hébergement ou – ce qui nouveau – sans hospitalisation, d’une proportion élevée de prestations d’hospitalisation facturées non conformes aux référentiels établis par la HAS ou d’un nombre de prestations d’hospitalisation facturées significativement supérieur aux moyennes régionales ou nationales (CSS, art. L. 162-1-17, al. 1 modifié).
« Compte tenu du nombre de transferts des établissements MCO vers les établissements SSR (environ 900 000 par an), le champ d’application de cette mesure sera limité aux indications visées par les recommandations de la Haute Autorité de santé déjà publiées ou à venir et sera ciblé sur les établissements qui effectuent un nombre important de transferts », précise l’exposé des motifs du projet de loi initial. Au final, selon Jean-Pierre Door, cette mesure est « de nature à améliorer l’efficience du recours aux structures de SSR intégrées aux établissements hospitaliers, en favorisant un report de soins de suite et de réadaptation de l’hôpital vers les soins de ville pour une économie estimée […] à au moins 10 millions d’euros par an ». « Dans tous les cas, a-t-il ajouté, le retour au domicile du patient devra s’appuyer sur la kinésithérapie libérale et nécessitera ainsi des échanges suivis entre professionnels de santé, afin que celui-ci s’accomplisse dans des conditions de sécurité maximales qui respectent la qualité de vie du patient et de son entourage » (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Door, page 160).
Si l’établissement de santé, informé par l’ARS de la soumission à la procédure d’accord préalable, délivre des prestations d’hospitalisation malgré une décision de refus de prise en charge, il ne pourra pas les facturer au patient (CSS, art. 162-1-17, al. 1 modifié).
La procédure contradictoire débouchant sur la mise sous accord préalable sera mise en œuvre dans des conditions prévues par décret (CSS, art. 162-1-17, al. 1 modifié). Et ne s’appliquera qu’à compter de la parution de ce texte au Journal officiel et, au plus tard, le 1er juillet 2011.
Un rapport sur l’évaluation de la mise sous accord préalable des activités de soins de suite et de réadaptation sera établi et remis au Parlement le 1er octobre 2011. Il devra analyser l’impact de cette mesure sur le parcours de soins et la fluidité de la filière de prise en charge des patients en termes de délais de mise en œuvre des traitements et des transferts, de qualité de la prise en charge et du rapport bénéfices/risques pour le patient, ainsi que le coût de gestion administrative de la mesure pour les établissements de santé, les ARS et les CPAM (art. 37, III de la loi).
Jusqu’alors, aucun délai de prescription des demandes d’indemnisation auprès du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) n’avait été fixé par la loi. C’est le fonds qui avait fixé ce délai à 4 ans, délai dont le point de départ était différent selon la pathologie occasionnée. Mais ce régime de prescription était très critiqué. En effet, il est apparu « trop court » pour permettre aux victimes de faire valoir leurs droits. Et le calcul du délai de prescription à partir de points de départs différents a introduit une « différence de traitement, source d’iniquité et de contentieux », ont expliqué les députés (Rap.A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, page 262). Des pratiques qui ont également été remises en cause par la Cour de cassation (5).
Pour tenir compte de ces difficultés, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 modifie le régime de prescription devant le FIVA et retient désormais une durée de prescription légale de 10 ans, qui commence à courir à compter de la date du premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l’exposition à l’amiante (loi n° 2001-1257, art. 53 modifié). Selon le rapporteur Jean-Pierre Door, « ce nouveau délai présente l’intérêt de permettre aux éventuels recours déposés directement devant les juridictions par les victimes, qu’il s’agisse de recours devant les tribunaux des affaires sociales en matière de faute inexcusable ou de reconnaissance de maladies professionnelles, d’aboutir dans un délai de 10 ans » (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, page 265). La loi précise que le délai de 10 ans ne court :
pour l’indemnisation des préjudices résultant de l’aggravation d’une maladie dont un certificat médical a déjà établi le lien avec l’exposition à l’amiante, qu’à compter de la date du premier certificat médical constatant cette aggravation ;
pour l’indemnisation des ayants droit d’une personne décédée, quand son décès est lié à l’exposition à l’amiante, qu’à partir de la date du premier certificat médical établissant le lien entre le décès et cette exposition.
Le délai de prescription est dorénavant calculé à partir d’un point de départ identique pour toutes les victimes. « Le fait de fixer le point de départ de la prescription antérieurement à la date de consolidation offre l’avantage de permettre que la victime puisse être indemnisée de son vivant, sachant que dans le cas de maladies évolutives comme celles propres à l’amiante, la consolidation est bien souvent le décès de la victime », ont souligné les députés (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, page 266).
Ces dispositions sont applicables depuis le 21 décembre 2010 – date de publication de la LFSS pour 2011 au Journal officiel –, en tenant compte du délai écoulé depuis le premier certificat médical établissant le lien entre la maladie et l’exposition à l’amiante. Toutefois, à cette fin, les certificats médicaux établis avant le 1er janvier 2004 sont réputés l’avoir été à cette même date. En outre, les auteurs d’une demande d’indemnisation rejetée avant le 21 décembre 2010 au motif que les droits étaient prescrits, ou leurs ayants droit, peuvent, jusqu’au 1er janvier 2014, demander au FIVA de se prononcer à nouveau sur la demande à condition qu’ils se désistent, le cas échéant, de leur action en cours à l’encontre de la décision de rejet. Il appartient au fonds d’informer les requérants de cette possibilité (art. 92, II de la loi).
Auparavant, le FIVA devait présenter une offre de dédommagement si une indemnisation complémentaire était susceptible d’être accordée aux victimes de l’amiante dans le cadre d’une procédure pour faute inexcusable de l’employeur. « Pour autant, a souligné Jean-Pierre Door, la rédaction [de la loi n’était] pas pleinement satisfaisante dans la mesure où elle ne [précisait] pas suffisamment que l’indemnisation complémentaire que peut accorder le FIVA en cas de reconnaissance de la faute inexcusable ne trouve à s’appliquer que lorsque l’action en faute inexcusable de l’employeur qui y est mentionnée est celle à laquelle le FIVA est partie » (Rap.A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, pages 269-270). Aussi la LFSS pour 2011 indique-t-elle, de façon plus explicite, que « la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, à l’occasion de l’action à laquelle le FIVA est partie, ouvre doit à une majoration des indemnités versées à la victime ou à ses ayants droit en application de la législation de la sécurité sociale. L’indemnisation à la charge du fonds est alors révisée en conséquence » (loi n° 2001-1257, art. 53 modifié). Pour les députés, cette clarification est « de nature à assurer une plus grande transparence et une sécurité accrue des décisions de fond » (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Door, octobre 2010, page 270).
La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a maintenu à 60 ans l’âge légal de départ à la retraite et à 65 ans l’âge d’obtention du taux plein pour les bénéficiaires de la préretraite « amiante » (6). Elle n’a pas non plus modifié l’âge d’accès au dispositif, fixé à 50 ans. A la demande de la secrétaire d’Etat aux aînés, les parlementaires ont alors voté une disposition prévoyant que le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA) effectue un versement aux régimes légaux de retraite de base afin de financer les dépenses supplémentaires engendrées par les départs des victimes de l’amiante avant l’âge légal de départ à la retraite (loi n° 98-1194, art. 41, III modifié). En contrepartie, le fonds voit sa dotation annuelle augmenter (voir ci-dessous).
La dotation de la branche accidents du travail-maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du FIVA s’élève, en 2011, à 340 millions d’euros. Une enveloppe que la sénatrice (CRC-SPG) de l’Isère, Annie David, a jugée trop limitative au regard de l’affluence de dossiers que le fonds va avoir à traiter du fait de l’allongement du délai de prescription applicable devant le fonds (voir ci-dessus). D’autant que, a-t-elle rappelé, la commission des comptes de la sécurité sociale a indiqué, dans son rapport de septembre 2010, que les dépenses du FIVA devaient progresser de 15 % et ainsi occasionner un déficit de 80 millions d’euros pour 2010. Un déficit qui pourrait atteindre 180 millions d’euros en 2011, « ce qui conduirait à épuiser les excédents cumulés par le FIVA depuis 2011 » (J.O. Sén. n° 118 [C.R.] du 17 novembre 2010, page 10102).
Quant à la dotation accordée au FCAATA, elle s’établit à 880 millions d’euros en 2011. Ce fonds bénéficie ainsi de 10 millions supplémentaires par rapport à 2010 pour contribuer au financement des départs anticipés à la retraite.
« Dans un contexte d’augmentation des dépenses d’indemnités journalières, les instruments de contrôle des arrêts de travail abusifs doivent être améliorés », a expliqué Yves Bur, rapporteur (UMP) de la loi à l’Assemblée nationale. Les indemnités journalières ont en effet représenté près de 6 milliards d’euros en 2009 pour le seul régime général de la sécurité sociale, soit 10 % de l’ensemble des dépenses de soins de ville. Leur taux de croissance reste soutenu (5,6 % en 2008 et 5,1 % en 2009), une tendance qui devrait se confirmer pour 2010 selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (7). Pour le député, « des progrès ont été réalisés dans le contrôle des arrêts de travail abusifs [8] mais les sanctions sont insuffisamment dissuasives » (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Bur, octobre 2010, pages 306-307). C’est pourquoi la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 les renforce.
Conformément à l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale, pour percevoir les indemnités journalières l’assuré doit :
observer les prescriptions du praticien ;
se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical de la caisse d’assurance maladie ;
respecter les heures de sorties autorisées par le praticien selon certaines règles et modalités précises ;
s’abstenir de toute activité non autorisée.
Jusqu’à présent, en cas d’inobservation volontaire de ces obligations, la caisse primaire d’assurance maladie ne pouvait que retenir, à titre de pénalité, tout ou partie des indemnités journalières dues. Dorénavant, l’assuré doit restituer à la caisse les indemnités versées correspondantes (CSS, art. L. 323-6, al. 6 modifié). En outre, s’il exerce une activité non autorisée donnant lieu à une rémunération, à des revenus professionnels ou à des gains, la caisse peut prononcer une pénalité financière à son encontre. Le montant de cette pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci, soit, à défaut de sommes déterminées, forfaitairement dans la limite de 2 fois le plafond mensuel de la sécurité sociale (soit 5 892 € en 2011) (CSS, art. L. 323-6, al. 7 nouveau).
Ces dispositions doivent « permettre non seulement de récupérer des sommes indûment versées, mais aussi de dissuader les éventuelles fraudes aux indemnités journalières », a expliqué Yves Bur. La caisse nationale d’assurance maladie estime que cette fraude est « au moins aussi courante et importante en termes de volume que la falsification de pièces pour obtenir les indemnités journalières », et a représenté 8,6 millions d’euros en 2008. Ainsi, « avec un taux de pénalité encourue de 50 %, une économie minimale de 4,3 millions d’euros par an peut être envisagée », a avancé le rapporteur (Rap. A.N. n° 2916, tome 1, Bur, octobre 2010, page 309).
En vertu de l’article L. 114-19 du code de la sécurité sociale, les agents de contrôle des organismes de sécurité sociale jouissent d’un droit de communication, sans que s’y oppose le secret professionnel, des documents et informations nécessaires pour contrôler la sincérité et l’exactitude des déclarations souscrites ou l’authenticité des pièces produites en vue de l’attribution et du paiement des prestations sociales. Ce droit de communication est notamment exercé à l’égard d’établissements bancaires, de fournisseurs d’énergie ou encore d’opérateurs mobiles. Afin de compléter ce dispositif, les parlementaires ont, sur proposition du rapporteur Yves Bur, élargi ce droit de communication aux informations sur des tiers soupçonnés de bénéficier de prestations indûment versées (CSS, art. L. 114-19, al. 3 nouveau). Avec cette disposition, « il s’agit par exemple de pouvoir identifier les mandataires des comptes bancaires de prestataires décédés continuant à percevoir frauduleusement des pensions » (Rap. A.N. n° 2916, tome 2, Bur, octobre 2010, page 310). Le refus de répondre à une demande d’un contrôleur constitue un délit puni d’une amende de 7 500 € (CSS, art. L. 114-19, al. 7 nouveau).
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 élargit les prérogatives de contrôle des organismes de sécurité sociale. Ainsi, pour le service d’une prestation ou, désormais, le contrôle de sa régularité, ils doivent aussi vérifier l’identité du demandeur ou du bénéficiaire et, pour ce faire, peuvent lui demander toutes pièces justificatives utiles (CSS, art. L. 161-1-4, al. 1 modifié). Il peut s’agir du titre de séjour ou du passeport « qui peut porter la trace de certains de ses déplacements à l’étranger », a expliqué le rapporteur (UMP) de la loi au Sénat, Alain Vasselle. Cette modification était nécessaire, selon lui, dans la mesure où la totalité des prestations versées par les organismes de sécurité sociale sont servies sous réserve de justifier d’une résidence effective et régulière sur le territoire national (Rap. Sén. n° 88, tome VII, 2010-2011, Vasselle, page 281).
L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) a remplacé le minimum vieillesse depuis le 1er janvier 2007. Toutefois, les personnes titulaires du minimum vieillesse à cette date ont continué à bénéficier des prestations le composant (9). Contrairement au minimum vieillesse, l’ASPA est soumise à une condition de résidence sur le territoire national. Or il est apparu que l’absence de condition de résidence pour le bénéfice des anciennes composantes du minimum vieillesse, « qui constituent encore la grande majorité des prestations versées », est « source d’abus et ne facilite pas les contrôles » (Rap. Sén. n° 88, tome VII, 2010-2011, Vasselle, pages 290-291). C’est pourquoi les parlementaires ont modifié l’article 2 de l’ordonnance du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse afin de conditionner son service au critère de résidence stable et régulière sur le territoire national telle que définie à l’article R. 115-6 du code de la sécurité sociale. En cas de non-respect de cette condition, la prestation peut être supprimée.
Jusqu’alors, le demandeur d’une allocation de logement sociale, d’une allocation de logement familiale ou d’une aide personnalisée au logement pouvait bénéficier d’une rétroactivité de ses droits sur les 3 mois précédant sa demande s’il remplissait sur cette période les conditions d’octroi. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 supprime cette possibilité, harmonisant ainsi la date d’ouverture des droits aux aides personnelles au logement avec celle des minima sociaux. Ainsi, les aides personnelles au logement sont dues :
sans changement, à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel les conditions d’ouverture du droit sont réunies ;
lorsque les conditions d’ouverture du droit sont réunies antérieurement au mois de la demande, à compter du premier jour de ce mois.
Concrètement, illustre la caisse nationale des allocations familiales dans une circulaire du 21 décembre 2010 (10), en cas d’entrée dans les lieux et de paiement du loyer en janvier, l’aide sera due en février si la demande d’allocation de logement a été formulée en janvier. Et, si cette demande est seulement déposée au mois de juin, l’aide sera due à compter de juin (alors qu’auparavant, elle aurait été due à compter de mars, c’est-à-dire 3 mois avant le dépôt de la demande).
En outre, la caisse rappelle que la date du dépôt de la demande correspond à la date de la première manifestation du demandeur auprès de l’organisme, quelle qu’en soit sa forme (papier, téléprocédure…). Cette mesure ne concerne que les nouvelles demandes. Pour les demandes effectuées avant le 1er janvier 2011, l’aide au logement peut être versée dans la limite des 3 mois précédant la demande si les conditions d’ouverture de droit sont remplies.
Pour la rapporteure (SRC) de la loi à l’Assemblée nationale, Marie-Françoise Clergeau, cette mesure va « toucher de plein fouet les ménages les plus modestes, et plus particulièrement les familles monoparentales, qui représentent près de la moitié des bénéficiaires. De plus, les associations d’insertion qui, par l’intermédiaire du tiers payant, pouvaient toucher ces allocations, vont connaître des difficultés de trésorerie dans les mois à venir. » Des arguments qui n’ont pas ému Nadine Morano, alors secrétaire d’Etat chargée de la famille, pour qui cette mesure est une « mesure de bonne gestion qui permet de faire 240 millions d’euros d’économie qui iront pour moitié à la branche famille et pour moitié à l’Etat » (J.O.A.N. n° 100 [C.R.] du 30 octobre 2010, pages 7767-7768).
L’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale prévoit une exonération de cotisations patronales d’assurances sociales et d’allocations familiales pour les rémunérations des aides à domicile employées au service personnel de certaines personnes âgées ou handicapées, à leur domicile ou chez des membres de leur famille, ou bénéficiaires de prestations d’aide ménagère au titre de l’aide sociale légale ou dans le cadre de conventions conclues entre les associations d’aide à domicile et un organisme de sécurité sociale. La LFSS pour 2011 précise que cette exonération est désormais applicable aux rémunérations versées en contrepartie des tâches effectuées au « domicile à usage privatif » des personnes âgées ou des personnes handicapées. De fait, cette disposition exclut les structures d’hébergement collectif de personnes âgées ou de personnes handicapées du bénéfice du mécanisme d’exonération de charges sociales pour les activités d’aide à domicile dans le secteur des services à la personne. Un point critiqué par les élus de l’opposition qui ont ainsi dénoncé le caractère discriminant de cette mesure auprès du Conseil constitutionnel et souligné sa contradiction avec le principe d’égalité de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Cette argumentation n’a pas trouvé écho auprès de la Haute Juridiction qui a considéré que l’article L. 241-10 « tend à favoriser le maintien chez elles de personnes dépendantes ». Et que, dans ce cadre, « l’attribution du bénéfice de cette exonération en fonction du caractère privatif du domicile de la personne bénéficiaire de l’aide est en lien direct avec l’objet de cet article » qui, dès lors, « ne méconnaît pas le principe d’égalité devant la loi ».
Avec cette mesure, combinée à la suppression des exonérations patronales pour les services à domicile et à la personne prévue par la loi de finances pour 2011 (11), « on estime que 60 000 personnes fragiles sont menacées de ne plus avoir d’aides et que plus de 10 000 salariés risquent de se retrouver sans emploi », a indiqué le sénateur (PS) Bernard Cazeau (J.O. Sén. n° 115 [C.R.] du 13 novembre 2010, page 9774).
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a permis d’organiser, à titre expérimental, l’affiliation au régime général des personnes exerçant une activité économique réduite à fin d’insertion (petit commerce local, travaux de couture…) et bénéficiant d’un accompagnement en matière administrative et financière assuré par une association agréée (12). L’expérimentation, qui devait se terminer le 31 décembre 2010, est prorogée de 2 ans, soit jusqu’au 31 décembre 2012, car elle n’a pu débuter avant la mi-2010 et qu’aucune leçon n’a pu en être tirée, a expliqué le rapporteur Yves Bur (Rap. A.N. n° 2916, tome 1, Bur, page 193).
Rappelons que l’objectif de ce dispositif est de développer l’intégration par le travail et de diminuer les activités non déclarées afin de permettre aux personnes concernées d’accéder dans un deuxième temps au statut de travailleur indépendant et de s’insérer ainsi dans un système de protection sociale classique.
Les indemnités de licenciement étaient auparavant exonérées de cotisations sociales, une situation souvent dénoncée par la Cour des comptes qui voyait là une perte de 4,5 milliards d’euros, a expliqué Yves Bur, rapporteur à l’Assemblée nationale (Rap. A.N. n° 2916, tome 1, Bur, octobre 2010, page 172). A son initiative, les parlementaires ont donc modifié l’article L. 242-1, al. 12 du code de la sécurité sociale afin que, à compter de 2012, la part non imposable des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail ne soit désormais exclue de l’assiette des cotisations sociales que dans la limite de 3 fois le plafond annuel de la sécurité sociale (soit 106 056 € en 2011). En clair, les indemnités de licenciement seront assujetties aux cotisations sociales pour leur valeur au-delà de ce plafond. A titre transitoire, la LFSS pour 2011 prévoit que les indemnités de licenciement sont exclues de l’assiette des cotisations sociales dans la limite de 6 fois le plafond annuel de la sécurité sociale (soit 212 112 € en 2011) dans les cas suivants :
pour celles versées en 2011 au titre d’une rupture ayant pris effet le 31 décembre 2010 au plus tard ou intervenant dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi notifié au plus tard le 31 décembre 2010 ;
pour celles versées au titre d’une rupture prenant effet en 2011 dans la limite du montant prévu par la convention ou l’accord collectif en vigueur au 31 décembre 2010.
Selon Yves Bur, cette mesure devrait en particulier toucher « les revenus certes les plus élevés, mais également les salariés qui bénéficient d’un patrimoine non négligeable et d’un niveau élevé de formation leur permettant de retrouver plus facilement du travail ». Il s’agit là d’une « question de justice sociale », a-t-il estimé (Rap. A.N. n° 2916, tome1, Bur, octobre 2010, page 172).
HAUSSE DU FORFAIT SOCIAL (ART. 16)
La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2011 a de nouveau augmenté le taux du forfait social, contribution à la charge des employeurs portant notamment sur l’intéressement, la participation, l’épargne salariale et la retraite supplémentaire. Fixé à 2 % en 2009, puis à 4 % en 2010, il s’élève à 6 % depuis le 1er janvier 2011. Rendement attendu : 350 millions d’euros.
AUGMENTATION DES PLAFONDS DE L’ACS (ART. 27)
La LFSS pour 2011 relève progressivement le plafond de ressources à ne pas dépasser pour bénéficier de l’aide à l’acquisition d’une couverture complémentaire santé (ACS). Il est égal, depuis le 1er janvier 2011, au plafond de ressources de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) majoré de 26 % (contre 20 % actuellement) (13). A partir de 2012, il sera égal au plafond de la CMU-C majoré de 30 %.
RENFORCEMENT DU RÔLE DU COMITÉ D’ALERTE (ART. 48)
Jusqu’à présent, le comité d’alerte rendait un avis, au plus tard le 1er juin, sur le risque de dépassement de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Une intervention jugée tardive par la Cour des comptes et le président de la République lors de la conférence sur le déficit en mai 2010 (14). Afin de s’assurer du respect de cet objectif, Nicolas Sarkozy a donc décidé qu’il fallait renforcer le rôle de cette instance. Ainsi, le comité d’alerte doit désormais rendre, chaque année et au plus tard le 15 avril, un avis dans lequel il analyse les anticipations de réalisation de l’ONDAM de l’année précédente et en déduit les conséquences sur l’objectif de l’exercice en cours. Il doit en outre produire un autre avis, au plus tard le 15 octobre, dans lequel il contrôle les éléments ayant permis l’élaboration de l’ONDAM envisagé pour l’année à venir et présente ses réserves s’il constate que cet objectif ne peut pas être respecté au vu de l’évolution prévisionnelle des dépenses d’assurance maladie (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 114-4-1, al. 3 et 4 nouveaux).
BILAN DES CONVENTIONS CONCLUES AVEC LES PROFESSIONNELS DE SANTE (ART. 49)
Les engagements conventionnels des professionnels de santé ont un impact sur les dépenses de l’assurance maladie. Aussi la LFSS pour 2011 prévoit-elle que la commission des comptes de la sécurité sociale doit désormais inclure dans ses rapports un bilan d’évaluation du respect des engagements financiers contenus dans les conventions conclues entre les professions de santé et l’assurance maladie (CSS, art. L. 114-1, al. 6 nouveau). Pour les sénateurs, « cet article pourrait permettre de mieux informer le Parlement sur le réalisme de la construction de l’ONDAM » (Rap. Sén. n° 88, tomeVII, 2010-2011, Vasselle, page 164).
ÉVALUATION DES FRANCHISES MEDICALES (ART. 62)
Le gouvernement doit désormais remettre au Parlement, tous les ans avant le 30 septembre, un rapport d’évaluation des conséquences en termes d’accès aux soins des franchises médicales.
DOTATIONS DU FIQCS ET DE L’ONIAM (ART. 85)
En 2011, l’assurance maladie participe au financement du fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) à hauteur de 250 millions d’euros. En outre, elle octroie une enveloppe de 10 millions à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).
PRÊT À TAUX ZÉRO DES ASSISTANTS MATERNELS (ART. 104)
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a permis aux assistants maternels de bénéficier du prêt à taux zéro pour l’amélioration de leur habitat. Par la suite, une loi du 9 juin 2010 a créé les maisons d’assistants maternels, opérant ainsi une distinction entre ceux travaillant à domicile et en structure. Depuis, les assistants maternels exerçant au sein des maisons d’assistants maternels éprouvaient des difficultés à accéder au prêt à taux zéro. Aussi les parlementaires ont-ils clarifié l’article L. 542-9 du code de la sécurité sociale afin de permettre à tous les assistants maternels, sans distinction, de bénéficier des prêts destinés à l’amélioration du lieu d’accueil des enfants.
ANNUALISATION DU CALCUL DE LA « RÉDUCTION FILLON » (ART. 12, V)
La LFSS pour 2011 modifie le mode de calcul de l’allégement général de cotisations sociales patronales – dit « réduction Fillon » –, dont bénéficient les employeurs pour tous les salaires versés, dans la limite de 1,6 fois le montant du SMIC. Il convient désormais de prendre en compte la rémunération annuelle et non plus mensuelle des salariés (CSS, art. L. 241-13, VI). Un décret du 31 décembre 2010 a d’ores et déjà fixé les modalités de mise en œuvre de cette mesure (15), entrée en vigueur pour les cotisations dues depuis le 1er janvier 2011.
ASSIETTE CSG/CRDS (ART. 20)
L’assiette de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les revenus d’activité salariée est minorée de 3 % au titre des frais professionnels. Elle est donc égale à 97 % de ces revenus. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 limite à 4 fois le plafond annuel de la sécurité sociale – soit à 141 408 € en 2011 – le montant de la rémunération auquel s’applique cette réduction d’assiette. Au-delà, la CSG et la CRDS sont dues sur la totalité du salaire (CSS, art. L. 136-2, I, al. 2 modifié).
REPRISE DE LA DETTE SOCIALE PAR LA CADES (ART. 9)
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 organise les modalités de reprise de la dette sociale par la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), estimée à 130 milliards d’euros. Un décret du 5 janvier 2011 a d’ailleurs d’ores et déjà précisé les modalités de reprise des déficits cumulés prévisionnels des branches maladie, vieillesse et famille du régime général de la sécurité sociale ainsi que ceux du fonds de solidarité vieillesse (16).
(2) La loi de finances pour 2011 a aussi, de son côté, supprimé un certain nombre d’avantages liés aux niches fiscales et sociales – Voir ASH n° 2697 du 18-02-11, p. 48.
(5) La Haute Juridiction a effet émis un avis en la matière le 18 janvier 2010, avis conforté par deux arrêts du 3 juin 2010.
(6) Rappelons que, dans le cas général, le texte relève progressivement l’âge légal de départ à la retraite et d’obtention du taux plein de 4 mois par génération et par an, pour atteindre 62 et 67 ans en 2018 – Voir ASH n° 2681 du 5-11-10, p. 10, n° 2682 du 12-11-10, p. 11 et n° 2690 du 7-01-11, p. 5.
(8) Ont ainsi été mises en place la procédure de mise sous accord préalable des médecins forts prescripteurs d’indemnités ou encore celle de la contre-visite d’un médecin diligenté par l’employeur.
(9) A savoir l’allocation aux vieux travailleurs salariés, l’allocation aux vieux travailleurs non salariés, le secours viager, l’allocation aux mères de famille, l’allocation spéciale vieillesse et sa majoration, l’allocation viagère, l’allocation de vieillesse agricole et l’allocation supplémentaire.
(10) Circulaire CNAF n° 2010-021 du 21 décembre 2010.
Disponible dans la docuthèque, rubrique « infos pratiques », sur
(11) Une suppression qui a aussi déclenché une levée de boucliers des acteurs de l’aide à domicile – Voir notamment ASH n° 2687 du 17-12-10, p. 24 et n° 2689 du 31-12-10, p. 3.
(13) Sur les montants applicables en 2011, voir ASH n° 2690 du 7-01-11, p. 51.
(16) Décret n° 2011-20 du 5 janvier 2011, J.O. du 7-01-11.